Le Conseil constitutionnel, par une décision n° 2025-6440 AN du 19 juin 2025, statue sur le respect des obligations de financement lors d’un récent scrutin législatif. Un candidat aux élections législatives a négligé de déposer son compte de campagne dans les délais impartis par les textes en vigueur. Ayant réuni plus de 1 % des suffrages exprimés, il demeurait pourtant assujetti à cette formalité substantielle prévue par le code électoral. L’autorité administrative chargée du contrôle des comptes a saisi le juge constitutionnel après avoir constaté l’absence manifeste du document financier requis. Bien que l’intéressé ait produit ses comptes tardivement, il admet son erreur sans invoquer de circonstances exceptionnelles pour justifier un tel retard. Le Conseil doit décider si ce défaut de dépôt caractérise un manquement d’une particulière gravité justifiant une déclaration d’inéligibilité pour l’avenir. La juridiction conclut à la faute du candidat et prononce une sanction d’inéligibilité pour une durée de trois ans à compter du jugement. L’examen de la caractérisation du manquement aux obligations comptables précédera l’étude de la rigueur de la sanction prononcée par la haute juridiction.
I. La caractérisation d’un manquement substantiel aux obligations de transparence financière
A. Le constat objectif de l’absence de dépôt des comptes dans le délai légal L’article L. 52-12 du code électoral impose aux candidats ayant obtenu au moins 1 % des voix d’établir un compte de campagne rigoureux. Ce document « retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection ». Le juge rappelle que ce compte « doit être déposé […] au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour ». En l’espèce, le candidat n’a transmis aucune pièce comptable dans le délai prescrit malgré l’obligation légale pesant sur sa situation électorale particulière. Cette règle garantit le contrôle effectif des financements politiques et assure l’égalité indispensable entre les différents prétendants à la représentation de la nation.
B. L’inefficacité des justifications tardives pour écarter l’irrégularité initialement constatée Le candidat a produit un compte de campagne postérieurement à la saisine initiale du juge par l’autorité administrative de contrôle financier. Le Conseil constitutionnel relève toutefois qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations ». L’erreur reconnue par l’intéressé ne constitue pas une cause exonératoire suffisante pour écarter l’application stricte des dispositions impératives du code électoral. La jurisprudence constitutionnelle maintient une exigence élevée de ponctualité pour permettre aux organes de régulation d’accomplir leur mission dans les temps impartis. La régularisation tardive ne saurait effacer le vice résultant de l’inobservation des formes prescrites par le législateur pour assurer la transparence financière. La constatation de cette irrégularité formelle conduit logiquement le juge à exercer son pouvoir de sanction pour réprimer la faute ainsi commise.
II. La répression disciplinaire d’une négligence jugée d’une particulière gravité
A. La qualification souveraine de la gravité du manquement aux règles de financement Selon l’article L.O. 136-1 du code électoral, le Conseil peut déclarer inéligible le candidat auteur d’un manquement d’une particulière gravité. Cette notion juridique permet au juge d’apprécier la portée de l’omission en fonction des faits propres à chaque espèce soumise à son examen. Dans cette affaire, le juge estime que « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement », l’inéligibilité doit être nécessairement prononcée. L’absence totale de dépôt dans les temps est perçue comme une atteinte sérieuse aux mécanismes de vérification de l’honnêteté des scrutins publics. La volonté de fraude n’est pas requise dès lors que la négligence présente un caractère suffisant pour entraver le contrôle de l’autorité publique.
B. Les conséquences de l’inéligibilité triennale sur l’exercice futur des mandats électifs En conséquence de la faute établie, le juge déclare le candidat « inéligible à tout mandat pour une durée de trois ans ». Cette mesure prend effet immédiatement à compter de la date de la décision rendue par les membres du Conseil constitutionnel en séance. La durée triennale illustre la volonté de la juridiction de sanctionner fermement les comportements négligents qui compromettent la clarté du financement électoral. Le dispositif assure ainsi une fonction préventive tout en écartant temporairement de la vie publique les citoyens ayant méconnu leurs obligations comptables. La décision sera publiée officiellement pour garantir l’opposabilité de la mesure d’inéligibilité et assurer l’information des électeurs sur l’intégrité des futurs candidats.