Le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2025-6454 AN du 5 juin 2025, se prononce sur les conséquences juridiques du défaut de dépôt d’un compte de campagne. Une candidate s’est présentée dans la septième circonscription du département du Finistère lors des élections législatives organisées les 30 juin et 7 juillet 2024. Ayant obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés lors du premier tour, elle était légalement tenue de soumettre ses documents comptables à l’administration. L’autorité de contrôle a saisi le juge constitutionnel le 24 janvier 2025 après avoir constaté l’absence de transmission du dossier dans les délais impartis. La requête sollicite ainsi l’application des dispositions du code électoral relatives à l’inéligibilité des candidats n’ayant pas respecté leurs obligations de transparence financière. La candidate n’a produit aucune observation au cours de l’instruction pour justifier la méconnaissance des délais prescrits par les textes organiques et législatifs applicables. Le litige soulève la question de savoir si l’omission totale de dépôt d’un compte de campagne constitue un manquement d’une particulière gravité justifiant l’inéligibilité. Le juge constitutionnel répond par l’affirmative en déclarant l’intéressée inéligible pour une durée de trois ans en raison de la nature substantielle de la faute commise. L’analyse portera sur le manquement constaté aux obligations comptables avant d’examiner la sanction d’inéligibilité prononcée par le juge pour garantir la probité électorale.
I. Le constat d’un manquement d’une particulière gravité aux obligations comptables L’article L. 52-12 du code électoral impose aux candidats ayant obtenu 1 % des voix de déposer un compte équilibré avant une date limite impérative. La candidate en cause n’a pas transmis ses documents à l’autorité compétente malgré l’obligation de transparence qui pèse sur chaque participant au scrutin législatif. Le manquement s’apprécie d’abord par l’omission matérielle du dépôt avant d’être confirmé par l’absence totale de circonstances atténuantes ou justificatives de la part de l’intéressée.
A. Le non-respect caractérisé de l’obligation de dépôt du compte de campagne La transparence financière constitue un pilier fondamental de l’équilibre démocratique en assurant le contrôle effectif des ressources mobilisées pendant la période de la campagne électorale. Le Conseil constitutionnel relève que la candidate était tenue d’établir ce document comptable puisqu’elle avait obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés au premier tour. Le juge rappelle que le dépôt doit intervenir « au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin » pour être régulier. L’omission totale de cette formalité prive l’administration de toute possibilité de vérifier la licéité des fonds perçus et la nature des dépenses engagées pour l’élection.
B. L’absence de circonstances justificatives de la méconnaissance légale Le juge constitutionnel examine systématiquement si des faits imprévisibles ou insurmontables pourraient expliquer le non-respect des délais de dépôt par les candidats soumis à cette obligation. Les magistrats affirment dans cette espèce qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations ». Le silence gardé par la candidate durant la phase d’instruction confirme le caractère délibéré ou négligent de la violation des règles essentielles de financement électoral. La caractérisation du manquement substantiel permet désormais d’apprécier la sévérité de la mesure d’inéligibilité retenue par le Conseil dans sa mission de contrôle de la régularité.
II. L’application d’une sanction d’inéligibilité ferme au service de la probité électorale L’article L.O. 136-1 du code électoral permet au juge de prononcer une inéligibilité lorsque le candidat a commis un manquement d’une particulière gravité aux règles comptables. La décision s’appuie sur une qualification rigoureuse de la faute pour justifier l’éviction de la candidate de la vie publique pendant une période de trois années. Le raisonnement repose sur l’appréciation souveraine de la gravité de l’omission avant de fixer la durée de l’interdiction de solliciter à nouveau le suffrage des électeurs.
A. La qualification juridique souveraine de la gravité du manquement L’absence totale de compte de campagne empêche par nature toute vérification de la légalité des financements et de la sincérité des dépenses engagées par le candidat concerné. Le Conseil constitutionnel souligne la « particulière gravité de ce manquement » pour fonder une réponse juridictionnelle ferme face à l’inobservation manifeste des dispositions législatives en vigueur. Cette sévérité jurisprudentielle vise à protéger l’ordre public électoral en écartant les candidats qui s’abstiennent de se soumettre au contrôle financier obligatoire de leur activité.
B. La durée triennale de l’inéligibilité comme mesure de protection démocratique La sanction prononcée prive la candidate de la possibilité de se présenter à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision. Cette mesure de police électorale reflète la volonté du juge de garantir la probité des futurs scrutins en sanctionnant une négligence jugée incompatible avec l’exercice de fonctions électives. Le Conseil constitutionnel réaffirme ainsi sa détermination à faire respecter l’égalité de traitement entre les candidats et la transparence indispensable à la sincérité de la vie démocratique.