Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6457 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, une décision importante relative au contrôle du financement des élections législatives organisées durant l’été 2024. À la suite du scrutin, un candidat ayant franchi le seuil des suffrages exprimés requis a négligé de déposer ses documents comptables dans le délai légal. L’autorité administrative chargée du contrôle des comptes de campagne a saisi le juge constitutionnel le 27 janvier 2025 afin de constater cette carence. Le candidat n’a produit aucune observation pour justifier le défaut de dépôt de son compte de campagne malgré la communication régulière de la saisine officielle. La question posée au juge consistait à déterminer si l’absence totale de dépôt d’un compte obligatoire constituait un manquement justifiant une déclaration d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel a répondu par l’affirmative, soulignant la particulière gravité de cette omission avant de prononcer une sanction d’inéligibilité pour une durée de trois années.

I. La caractérisation objective d’un manquement aux obligations de transparence électorale

A. L’exigence impérative de dépôt d’un compte de campagne équilibré

L’article L. 52-12 du code électoral impose à tout candidat ayant obtenu au moins un pour cent des suffrages exprimés d’établir un compte financier. Ce document doit retracer « l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection ». La loi exige que ce compte soit déposé avant le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin auprès de l’autorité de contrôle compétente. La transparence financière constitue un pilier essentiel de la sincérité des opérations électorales en garantissant le respect du plafonnement des dépenses engagées par les candidats. Cette obligation comptable permet d’assurer une égalité de traitement entre les prétendants au suffrage universel tout en informant les citoyens sur l’origine des fonds.

B. La constatation d’une absence injustifiée de reddition des comptes

Dans cette espèce, le candidat concerné n’a déposé aucun compte de campagne à l’expiration du délai légal alors qu’il y était strictement tenu. Le Conseil constitutionnel relève qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier » la méconnaissance de ces obligations. L’absence de défense ou d’explications de la part de l’intéressé renforce le caractère inexcusable de cette violation manifeste des dispositions du code électoral. Ce silence procédural laisse au juge la seule constatation d’une méconnaissance frontale des règles relatives au financement des activités politiques lors de la période électorale. La méconnaissance des règles comptables appelle une analyse rigoureuse de la réponse juridictionnelle apportée par le juge électoral afin de garantir l’intégrité du scrutin.

II. La rigueur de la sanction attachée à la méconnaissance du droit électoral

A. L’appréciation de la particulière gravité du manquement constaté

Selon l’article L.O. 136-1, le juge peut déclarer inéligible le candidat n’ayant pas respecté ses obligations en cas de manquement d’une particulière gravité. Le défaut total de dépôt d’un compte est traditionnellement analysé comme une faute majeure privant l’autorité administrative de tout pouvoir de contrôle efficace. La juridiction constitutionnelle fonde sa décision sur « la particulière gravité de ce manquement » pour justifier l’éviction temporaire du candidat de la vie publique nationale. Cette qualification juridique permet de distinguer les simples erreurs matérielles des omissions volontaires qui altèrent durablement le contrôle démocratique du financement des campagnes. L’absence de compte empêche toute vérification de la légalité des recettes et des dépenses, ce qui porte atteinte à l’ordre public de l’élection.

B. L’application d’une inéligibilité triennale au service de la sincérité du scrutin

Le juge déclare le candidat « inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans à compter de la présente décision ». Cette mesure vise à protéger le corps électoral en écartant les candidats qui ne se soumettent pas loyalement aux exigences de la probité financière. La durée de trois ans marque la volonté du Conseil constitutionnel de réprimer avec fermeté les comportements qui entravent la transparence indispensable du financement politique. Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence constante garantissant l’équité entre les compétiteurs et la clarté absolue des sources de financement de la vie politique. La sanction assure ainsi la crédibilité des institutions représentatives en imposant une discipline comptable stricte à l’ensemble des acteurs de la compétition électorale.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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