Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6457 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel, par une décision n° 2025-6457 AN du 20 juin 2025, se prononce sur le respect des obligations de financement électoral. Un candidat aux élections législatives de juin et juillet 2024 dans l’Hérault a omis de déposer son compte de campagne. Ayant recueilli plus de un pour cent des suffrages exprimés, l’intéressé était pourtant légalement tenu à cette formalité comptable. L’autorité administrative de contrôle a saisi le juge constitutionnel le 27 janvier 2025. Elle conteste l’absence de dépôt du document financier dans le délai légal imparti par les dispositions du code électoral. Le candidat, bien qu’informé de cette saisine, n’a produit aucune observation pour justifier son manquement aux règles de transparence financière. La question posée au juge porte sur la qualification de ce défaut de dépôt et sur la proportionnalité de la sanction d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel retient la gravité particulière du manquement pour prononcer une inéligibilité de trois ans à l’encontre du candidat négligent. L’analyse de cette solution impose d’étudier d’abord la caractérisation du manquement aux obligations comptables, avant d’envisager la rigueur de la sanction d’inéligibilité.

I. La caractérisation du manquement aux obligations comptables

A. L’exigence impérative de dépôt du compte de campagne

L’article L. 52-12 du code électoral impose à chaque candidat d’établir un compte de campagne lorsqu’il atteint un seuil de suffrages. Ce document doit retracer « l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection ». Le dépôt doit intervenir avant le dixième vendredi suivant le scrutin, garantissant ainsi le contrôle effectif de la probité des élus. En l’espèce, le candidat avait obtenu au moins un pour cent des voix, mais il n’a transmis aucune pièce à l’autorité. Le juge constate simplement qu’à « l’expiration du délai prévu à l’article L. 52-12 du code électoral, il n’a pas déposé de compte de campagne ». Cette obligation constitue le pivot de la réglementation visant à prévenir tout financement occulte ou disproportionné durant les opérations électorales. L’absence totale de compte prive l’administration de tout moyen de vérification sur l’origine et l’utilisation des fonds utilisés.

B. L’absence de circonstances justificatives probantes

La jurisprudence constitutionnelle admet parfois des tempéraments si des circonstances particulières expliquent le retard ou l’omission du dépôt des comptes. Dans cette affaire, le Conseil relève qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance » des obligations. Le silence du candidat durant la procédure contradictoire devant le Conseil constitutionnel renforce le constat de sa carence injustifiée. Aucun motif de force majeure ou erreur purement matérielle n’a été invoqué pour atténuer la responsabilité de l’acteur politique défaillant. Le manquement est alors appréhendé dans sa dimension objective, résultant du seul constat du dépassement irrémédiable de l’échéance légale. Cette rigueur assure l’égalité devant la loi électorale entre tous les candidats soumis aux mêmes contraintes de transparence comptable. Le défaut de justification conduit alors le juge à qualifier juridiquement la gravité de la faute commise par l’intéressé.

II. La rigueur de la sanction d’inéligibilité prononcée

A. La reconnaissance d’un manquement d’une particulière gravité

L’article L.O. 136-1 permet de déclarer inéligible le candidat n’ayant pas respecté les prescriptions relatives au dépôt de son compte financier. Le Conseil constitutionnel souligne ici que, « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement », une sanction d’inéligibilité doit être ordonnée. La jurisprudence considère traditionnellement que le défaut de dépôt d’un compte de campagne prive le contrôle de toute substance juridique réelle. Cette omission délibérée ou négligente altère la confiance des citoyens dans la régularité du financement de la vie politique nationale. Le juge ne dispose pas d’un pouvoir d’appréciation illimité, mais il doit adapter sa réponse à l’importance de la faute. La qualification de particulière gravité découle ici directement de l’absence totale de transparence, rendant impossible toute validation par l’autorité compétente.

B. L’effectivité de la durée de l’inéligibilité fixée

Le dispositif de la décision fixe à trois ans la durée de l’interdiction de se présenter à tout mandat électoral. Ce délai court à compter de la publication de la décision, conformément aux règles classiques régissant le contentieux électoral parlementaire. La sanction est ferme et ne souffre d’aucun sursis, marquant ainsi la volonté du juge de protéger l’ordre public électoral. Cette solution s’inscrit dans une ligne jurisprudentielle constante visant à écarter les candidats refusant de se soumettre aux vérifications financières. La décision sera publiée au Journal officiel de la République française pour assurer une information complète des électeurs et des administrations concernées. Par cette mesure, le Conseil constitutionnel réaffirme que la démocratie représentative exige une discipline budgétaire stricte de la part de ses prétendants.

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Hassan KOHEN
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