Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6458 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, une décision relative au contentieux électoral des députés à l’Assemblée nationale. Cette affaire concerne le rejet des comptes de campagne d’une candidate aux élections législatives organisées en juin et juillet 2024. L’intéressée s’était présentée dans une circonscription départementale avant de voir sa situation financière examinée par l’autorité administrative de contrôle. Cette commission nationale a rejeté ses comptes le 9 janvier 2025 puis a saisi le juge constitutionnel le 28 janvier 2025. La candidate n’a produit aucune observation au cours de la procédure contentieuse malgré la communication officielle de la saisine.

Le juge constitutionnel devait déterminer si l’absence d’ouverture d’un compte bancaire par le mandataire financier justifie le rejet du compte. Il devait également apprécier si un tel manquement présentait une gravité suffisante pour entraîner l’inéligibilité de la candidate. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet du compte et prononce une inéligibilité d’un an à compter de sa décision. La solution repose sur l’identification d’un manquement formel substantiel avant l’application d’une sanction administrative et électorale proportionnée.

I. La caractérisation d’un manquement substantiel aux obligations de financement électoral

A. L’exigence impérative de l’ouverture d’un compte bancaire unique

L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier « d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières ». Cette règle constitue le pivot de la transparence financière en permettant une traçabilité rigoureuse de toutes les recettes et dépenses électorales. En l’espèce, il est établi que le mandataire de la candidate n’a pas respecté cette obligation légale de nature comptable. Le Conseil constitutionnel relève que « cette circonstance est établie » après l’examen des pièces du dossier par le rapporteur. Le respect de ce formalisme permet à l’administration de s’assurer de l’absence de financements occultes ou de dons illicites.

B. Le rejet légitime du compte de campagne par l’autorité de contrôle

Le code électoral dispose que chaque candidat « est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ». La commission nationale rejette le compte lorsqu’elle constate une violation directe des dispositions impératives relatives au mandataire financier. Cette décision administrative s’appuie sur le constat d’une omission matérielle qui empêche tout contrôle efficace de la régularité des flux. Le juge constitutionnel estime alors que « c’est à bon droit » que l’autorité administrative a rejeté le compte de la candidate. Cette validation du rejet constitue le préalable indispensable avant que le juge ne statue sur l’éventuelle inéligibilité de l’intéressée.

II. Le prononcé d’une sanction d’inéligibilité fondée sur la gravité du manquement

A. L’appréciation de la particulière gravité de l’omission commise

L’article L.O. 136-1 du code électoral permet au juge de déclarer inéligible le candidat en cas de « manquement d’une particulière gravité ». La jurisprudence constitutionnelle considère que l’absence de compte bancaire dédié n’est pas une simple erreur technique mais une faute grave. Dès lors, le Conseil affirme que la candidate ne pouvait ignorer la portée de cette règle dont le caractère est fondamental. Le juge insiste sur la « particulière gravité du manquement » pour justifier le recours à une sanction restreignant l’exercice du droit. Cette sévérité vise à garantir le respect égalitaire des règles de financement par l’ensemble des compétiteurs lors des scrutins nationaux.

B. Une sanction temporelle limitée à la protection de l’ordre électoral

La déclaration d’inéligibilité emporte des conséquences majeures sur la carrière politique de la candidate pour une durée fixée par le juge. La décision du 19 juin 2025 fixe cette inéligibilité à « tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision ». Ce délai d’une année témoigne d’une volonté de proportionnalité tout en marquant la désapprobation du juge face à l’ignorance des textes. La publication de cette sanction au Journal officiel assure l’information des citoyens et la pleine efficacité de la mesure prise. Aussi, cette portée dissuasive renforce l’autorité des règles encadrant les ressources financières des candidats aux fonctions de représentation à l’Assemblée.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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