Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6461 AN du 20 juin 2025

Le juge constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, une décision relative au contentieux de l’élection des députés dans une circonscription départementale. Cette décision traite du respect des obligations comptables pesant sur les candidats, spécifiquement l’ouverture d’un compte bancaire par le mandataire financier.

Un candidat aux élections législatives de juin et juillet 2024 a omis de faire ouvrir un compte bancaire par son mandataire attitré. Le 23 janvier 2025, l’autorité administrative de contrôle a rejeté le compte de ce candidat pour violation flagrante du code électoral. La juridiction statue désormais sur les conséquences de ce manquement grave aux règles de financement dans sa décision du 19 juin 2025.

Le litige soulève la question de savoir si l’absence d’ouverture d’un compte bancaire unique justifie le rejet du compte et l’inéligibilité du candidat.

Le juge confirme le rejet du compte et déclare l’intéressé inéligible pour une durée d’un an en raison de la particulière gravité du manquement. L’analyse de cette solution impose d’étudier la sanction du non-respect des formalités substantielles avant d’envisager l’application rigoureuse du régime de l’inéligibilité.

**I. La sanction du non-respect des formalités substantielles de financement**

L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier « d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières ». Cette obligation garantit la transparence des fonds utilisés durant la période électorale et facilite le contrôle ultérieur des dépenses engagées.

**A. Le caractère obligatoire de l’ouverture d’un compte bancaire dédié**

La loi exige que chaque mandataire agisse pour le compte d’un candidat afin de centraliser l’ensemble des flux financiers de la campagne. Le juge rappelle ici que le compte doit retracer « selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ».

L’absence de ce support bancaire empêche toute vérification sérieuse de la licéité des fonds et de l’équilibre réel des comptes présentés par l’intéressé. Cette formalité n’est pas une simple recommandation technique, mais constitue une condition de validité de la démarche comptable du candidat devant l’autorité souveraine.

**B. Le rejet automatique résultant de l’omission du mandataire**

Le juge relève que le rejet du compte est justifié dès lors que le mandataire financier « n’avait pas ouvert de compte bancaire ». Cette circonstance, une fois établie, entraîne nécessairement l’irrégularité globale de la comptabilité de campagne soumise à l’examen de la commission de contrôle.

Le respect de la procédure d’encaissement et de décaissement par un compte unique demeure une règle fondamentale dont la méconnaissance vicie l’ensemble. La décision souligne ainsi que « c’est à bon droit » que l’administration compétente a écarté le compte en raison de cette violation structurelle.

**II. L’application rigoureuse du régime de l’inéligibilité**

Le prononcé de l’inéligibilité repose sur l’article L.O. 136-1 du code électoral, qui permet au juge de sanctionner les manquements d’une particulière gravité. Cette mesure protège l’égalité entre les candidats en s’assurant que personne ne s’affranchit des règles communes de financement électoral.

**A. La qualification d’un manquement d’une particulière gravité**

La juridiction estime que l’absence de compte bancaire constitue un « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales ». Le candidat ne pouvait ignorer la portée de cette obligation légale claire dont l’application stricte est constante dans la jurisprudence électorale.

Le caractère délibéré ou la simple négligence ne modifient pas la gravité objective de l’omission, laquelle porte atteinte à la clarté nécessaire du scrutin. Le juge considère que la faute commise interdit désormais au candidat de se présenter à de nouveaux suffrages pendant une période déterminée.

**B. La proportionnalité de la sanction d’inéligibilité**

La durée d’inéligibilité est fixée à un an, ce qui traduit une application proportionnée mais ferme du cadre organique prévu par la Constitution. Le juge précise que cette interdiction s’applique « à tout mandat » pour signifier la portée générale de la sanction frappant l’ancien candidat défaillant.

Cette décision s’inscrit dans une volonté de moralisation de la vie publique en rappelant que la probité financière conditionne l’accès aux fonctions électives. La solution rendue confirme ainsi la vigilance du juge constitutionnel face aux irrégularités affectant la transparence nécessaire au débat démocratique.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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