Le Conseil constitutionnel, par une décision du 19 juin 2025, s’est prononcé sur le contentieux des élections législatives s’étant déroulées en juin et juillet 2024. Un candidat à cette élection n’a pas respecté les prescriptions relatives au financement de sa campagne électorale malgré l’obtention d’un nombre suffisant de suffrages. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté l’absence d’ouverture d’un compte bancaire par le mandataire financier désigné. Elle a donc procédé au rejet du compte de campagne de l’intéressé le 23 janvier 2025 avant de saisir la haute instance constitutionnelle. Le Conseil constitutionnel doit déterminer si l’omission d’ouverture d’un compte bancaire par le mandataire constitue un manquement justifiant l’inéligibilité du candidat évincé. Les juges confirment la régularité du rejet et déclarent le candidat inéligible pour une durée d’un an à compter de la présente décision.
**I. La rigueur du contrôle de la traçabilité des fonds de campagne**
**A. L’obligation impérative d’ouverture d’un compte bancaire unique**
L’article L. 52-6 du code électoral prévoit que le mandataire financier doit obligatoirement ouvrir un compte bancaire unique retraçant la totalité des opérations financières. Cette exigence permet de garantir une transparence absolue des recettes et des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection législative considérée. Le titulaire du compte agit en qualité de mandataire financier du candidat et les opérations doivent figurer sur les relevés bancaires officiels transmis. La règle s’applique dès lors que le candidat a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou a bénéficié de dons de personnes physiques.
Le compte de campagne doit retracer l’ensemble des recettes perçues et l’ensemble des dépenses engagées par le candidat durant la période électorale définie. Cette obligation constitue une formalité substantielle destinée à prévenir toute dissimulation de fonds ou dépassement frauduleux du plafond des dépenses électorales autorisées. Le respect de ce formalisme bancaire assure l’égalité de traitement entre les candidats et facilite le contrôle exercé par l’administration sur la sincérité des comptes.
**B. Le rejet de plein droit pour défaut d’instrument de transparence financier**
En l’espèce, le mandataire financier n’a pas ouvert de compte bancaire en violation des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6. La Commission nationale des comptes de campagne a rejeté le compte car cette circonstance est établie de manière certaine par les pièces produites. Le Conseil constitutionnel valide cette interprétation en affirmant que « c’est à bon droit » que l’organe de contrôle a prononcé le rejet définitif du compte. Le juge de l’élection refuse d’excuser cette méconnaissance des règles fondamentales qui régissent le financement de la vie politique dans notre État de droit.
La présentation du compte par un expert-comptable ne saurait suppléer l’absence initiale d’un compte bancaire dédié à la gestion des opérations financières du candidat. L’équilibre du compte et l’absence de déficit ne permettent pas non plus de régulariser une telle omission constatée par la commission nationale compétente. Le rejet du compte de campagne constitue donc la conséquence inévitable d’un manquement grave aux obligations comptables pesant sur chaque postulant à la députation.
**II. La sévérité de la sanction pour manquement grave aux règles de financement**
**A. La caractérisation souveraine d’un manquement d’une particulière gravité**
Selon l’article L.O. 136-1, le Conseil peut déclarer inéligible le candidat en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité. Les juges retiennent ici une « particulière gravité du manquement à une règle dont le candidat ne pouvait ignorer la portée » juridique et pratique. L’absence totale de compte bancaire empêche tout contrôle efficace de la provenance des fonds et de la réalité des dépenses de campagne déclarées. Le juge n’exige pas la démonstration d’une intention frauduleuse dès lors que la violation concerne une obligation substantielle du droit électoral français.
La jurisprudence constitutionnelle considère de manière constante que le défaut d’ouverture d’un compte bancaire spécifique compromet irrémédiablement la transparence financière de la compétition électorale. La gravité est ici accentuée par le caractère élémentaire de l’obligation méconnue qui figure expressément dans les notices remises aux candidats lors de leur déclaration. L’inéligibilité apparaît alors comme une sanction nécessaire pour préserver la probité de la vie publique et le respect scrupuleux des règles de financement.
**B. La portée temporelle limitée de la déclaration d’inéligibilité**
La sanction prononcée consiste en une inéligibilité à tout mandat pour une durée d’un an à compter du jour de la décision rendue. Le Conseil constitutionnel adapte la durée de l’interdiction de se présenter à un scrutin en fonction de l’importance du manquement relevé par l’instruction. Cette mesure préventive vise à assurer l’équité entre les compétiteurs politiques et à sanctionner les comportements négligents lors des opérations de financement électoral. La durée d’une année est proportionnée à la nature de l’irrégularité commise sans pour autant priver excessivement le citoyen de ses droits politiques.
La décision sera notifiée au candidat et publiée au Journal officiel de la République française conformément aux règles de procédure applicables devant cette juridiction. Cette publicité assure l’effectivité de la sanction et informe les électeurs des conséquences juridiques attachées au non-respect des règles de transparence financière. L’autorité de la chose jugée par le Conseil constitutionnel s’impose ainsi à tous les pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives.