Le Conseil constitutionnel a été saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques le quatre février deux mille vingt-cinq. Un candidat aux élections législatives des trente juin et sept juillet deux mille vingt-quatre n’avait pas déposé son compte de campagne. Ce dernier avait pourtant obtenu plus de un pour cent des suffrages exprimés lors du premier tour de scrutin dans sa circonscription électorale. La Commission nationale a constaté l’absence de dépôt au terme du délai légal imparti par les dispositions impératives du code électoral français. Le candidat a soutenu que son mandataire financier n’avait pas effectué les démarches nécessaires pour l’ouverture du compte bancaire de la campagne. La question posée au juge constitutionnel porte sur la qualification de la gravité du manquement résultant de l’absence totale de dépôt du compte. Le Conseil constitutionnel juge que ce manquement justifie le prononcé d’une inéligibilité pour une durée de trois ans à compter de sa décision. Il convient d’étudier la rigueur de l’obligation déclarative pesant sur le candidat avant d’analyser la sévérité de la sanction face à l’absence de justification.
I. La rigueur de l’obligation déclarative pesant sur le candidat
A. Le caractère impératif du dépôt du compte de campagne
L’article L. cinquante-deux-douze du code électoral impose à chaque candidat l’établissement d’un compte retraçant l’ensemble des recettes et des dépenses électorales engagées. Cette obligation s’applique dès lors que le seuil de un pour cent des suffrages est atteint ou que des dons ont été perçus. Le respect des délais de dépôt constitue une garantie essentielle de la transparence financière du processus démocratique et de l’égalité entre les candidats. Le juge précise que ce compte doit être déposé « au plus tard avant dix-huit heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin ».
B. Le constat d’un manquement objectif aux règles de financement
En l’espèce, le candidat n’a déposé aucun document comptable à l’expiration du délai légal alors qu’il y était légalement et strictement tenu. L’omission totale de dépôt prive l’autorité de contrôle de toute possibilité de vérifier la sincérité et la légalité des opérations financières de campagne. Cette défaillance empêche notamment de s’assurer du respect des plafonds de dépenses ou de l’origine licite des fonds collectés par le candidat. Cette rigueur dans le constat du manquement conduit logiquement le juge à apprécier la portée de la sanction au regard des justifications présentées.
II. La sévérité de la sanction face à l’absence de justification
A. L’inefficacité des excuses tenant au comportement du mandataire
Le requérant tentait de justifier son omission par l’inertie de son mandataire financier qui n’aurait pas ouvert le compte bancaire indispensable. Le Conseil constitutionnel rejette fermement cette argumentation en soulignant qu’aucune circonstance particulière ne permettait de justifier la méconnaissance des obligations résultant de la loi. La négligence d’un tiers ne saurait exonérer le candidat de sa responsabilité personnelle quant à la direction de sa propre campagne électorale. Le juge considère ainsi que le respect des règles de financement demeure sous le contrôle ultime et constant de celui qui sollicite le suffrage.
B. La proportionnalité du prononcé d’une inéligibilité triennale
L’article L.O. cent-trente-six-un permet au Conseil constitutionnel de déclarer inéligible le candidat auteur d’un manquement d’une particulière gravité aux règles de financement. En l’espèce, la juridiction estime que « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement », il y a lieu de prononcer une telle mesure. La durée de trois ans retenue par les juges illustre la volonté de sanctionner fermement l’absence totale de transparence dans l’usage des fonds publics. Cette décision s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel cohérent visant à assurer l’intégrité du scrutin législatif par des sanctions dissuasives et proportionnées.