Le Conseil constitutionnel a rendu, le 20 juin 2025, une décision marquante relative au contrôle de la régularité des comptes de campagne des candidats législatifs. Une candidate ayant participé aux élections législatives de juin 2024 a fait l’objet d’un signalement par l’organe administratif chargé du contrôle des comptes. Cette autorité a rejeté les documents comptables de l’intéressée car son mandataire financier n’avait pas ouvert de compte bancaire spécifique pour l’élection.
L’intéressée a soutenu devant le juge qu’elle n’avait engagé aucune dépense et ignorait les obligations prévues par les textes législatifs en vigueur. La question posée au juge constitutionnel portait sur la validité du rejet du compte et sur le prononcé éventuel d’une peine d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet de la comptabilité et déclare la candidate inéligible pour une durée d’un an à compter de la décision. L’analyse de cette solution exige d’étudier l’impératif de l’ouverture d’un compte bancaire avant d’apprécier la sévérité de la sanction prononcée par le juge.
**I. L’obligation stricte d’ouverture d’un compte bancaire de campagne**
**A. Le compte bancaire comme support nécessaire à la transparence financière** Le code électoral impose aux candidats de désigner un mandataire financier chargé d’ouvrir un compte bancaire unique pour retracer l’intégralité des flux financiers. Cette règle assure une séparation étanche entre les finances personnelles du candidat et les fonds mobilisés exclusivement pour les besoins de la compétition électorale. Le juge précise que le mandataire doit ouvrir un compte « retraçant la totalité de ses opérations financières » afin de permettre un contrôle administratif efficace. L’existence de ce support bancaire constitue le préalable indispensable à la certification des comptes par un expert-comptable avant leur dépôt devant l’autorité compétente.
Si le principe de l’ouverture du compte est absolu, sa méconnaissance entraîne des conséquences radicales sur la validité de la présentation de la comptabilité électorale.
**B. Le rejet de plein droit du compte en l’absence de mandatement bancaire** Le non-respect de cette formalité entraîne irrémédiablement le rejet du compte, car l’absence de compte bancaire empêche toute vérification réelle de l’origine des recettes. L’organe de contrôle a ainsi décidé de rejeter le dossier de la candidate au motif que l’obligation légale n’avait manifestement pas été respectée. Le Conseil constitutionnel confirme cette analyse en jugeant que « c’est à bon droit » que l’administration a prononcé le rejet des comptes de la requérante. Cette rigueur formelle s’applique indépendamment de la bonne foi ou des intentions réelles du candidat lors de l’établissement de son document de synthèse financière.
Au-delà de l’aspect purement technique de la présentation des comptes, le juge doit apprécier la portée répressive de cette irrégularité formelle majeure.
**II. La caractérisation d’un manquement d’une particulière gravité**
**A. L’inopérance de la bonne foi et de l’absence de dépenses engagées** La candidate soutenait qu’elle n’avait engagé aucune dépense de campagne et ignorait la nécessité d’ouvrir un compte bancaire spécifique dans une telle situation. Cependant, ces circonstances sont jugées insuffisantes pour « justifier la méconnaissance des obligations » résultant directement des dispositions impératives figurant au sein du code électoral. Le juge souligne ainsi que la règle s’applique à tous dès lors qu’un mandataire financier a été désigné, même en l’absence de mouvements monétaires. La passivité financière ne dispense donc pas les candidats de respecter le cadre procédural garantissant l’égalité des armes et la probité du scrutin républicain.
La constatation de cette omission substantielle conduit alors le juge à tirer les conséquences juridiques nécessaires sur la capacité électorale de l’intéressée.
**B. La proportionnalité de la sanction d’inéligibilité pour une durée d’un an** L’omission constatée est qualifiée de « manquement d’une particulière gravité » justifiant le prononcé d’une peine d’inéligibilité à l’encontre de la candidate concernée. La durée d’un an retenue par le juge constitutionnel témoigne d’une volonté de sanctionner fermement toute entrave au contrôle de la transparence électorale. Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence constante protégeant l’ordre public électoral contre les négligences graves pouvant altérer la sincérité des résultats du vote. L’inéligibilité constitue ainsi l’ultime rempart assurant que seuls les citoyens respectant scrupuleusement les règles du jeu démocratique peuvent prétendre à l’exercice d’un mandat.