Le Conseil constitutionnel a rendu, le 5 juin 2025, une décision relative au financement de la campagne d’une candidate aux élections législatives de juin 2024. Cette candidate n’a pas ouvert de compte bancaire spécifique par l’intermédiaire de son mandataire financier pour retracer l’intégralité de ses opérations. La Commission nationale des comptes de campagne a rejeté le compte le 23 janvier 2025 avant de saisir le juge de l’élection législative. La candidate n’a produit aucune observation devant le Conseil constitutionnel pour justifier l’absence de ce compte bancaire pourtant obligatoire. Le juge doit déterminer si le défaut d’ouverture d’un compte unique constitue un manquement suffisant pour justifier l’inéligibilité du candidat concerné. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet du compte de campagne et prononce une inéligibilité d’un an à l’encontre de l’intéressée. L’analyse de cette décision suppose d’étudier l’impératif de traçabilité financière avant d’apprécier la sévérité de la sanction prononcée par les juges.
**I. LA CONSÉCRATION D’UNE OBLIGATION STRICTE DE TRAÇABILITÉ DES FONDS ÉLECTORAUX**
**A. Le compte bancaire unique comme instrument indispensable de contrôle**
L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier d’ « ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières ». Ce dispositif permet à la commission nationale de vérifier l’origine des recettes ainsi que la réalité des dépenses engagées pour l’élection. L’ouverture de ce compte constitue une formalité substantielle destinée à prévenir toute confusion entre les fonds personnels et les moyens électoraux. Le législateur a entendu garantir la transparence financière en centralisant les flux monétaires sous le contrôle d’un établissement de crédit identifié. Chaque candidat est ainsi tenu d’établir un compte de campagne dès lors qu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés.
**B. Le constat objectif d’une méconnaissance des règles de financement**
Dans cette affaire, le manquement aux dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 du code électoral est matériellement établi par les pièces. Le mandataire n’ayant procédé à aucune ouverture de compte, les opérations financières ne pouvaient être utilement contrôlées par l’organe de vérification. Le Conseil constitutionnel relève que cette circonstance justifie légalement le rejet du compte de campagne initialement opéré par la commission nationale. L’absence de défense de la part de la candidate lors de la procédure contentieuse renforce la preuve de cette irrégularité manifeste et irrémédiable. La juridiction constate que le mandataire financier a méconnu une règle dont la candidate ne pouvait ignorer la portée juridique.
**II. LA SANCTION DU MANQUEMENT AU REGARD DE L’EXIGENCE DE PROBITÉ ÉLECTORALE**
**A. La validation du rejet du compte de campagne**
Le rejet du compte de campagne constitue la conséquence automatique de l’absence de traçabilité bancaire des fonds mobilisés par la candidate. Le Conseil constitutionnel considère que ce défaut d’ouverture empêche toute mise en état d’examen efficace des dépenses et des recettes électorales. Cette solution protège l’égalité entre les candidats en sanctionnant ceux qui s’affranchissent des règles comptables protectrices de la sincérité du scrutin. Le juge constitutionnel exerce ici un contrôle de légalité strict sur les décisions de la commission nationale chargée du contrôle financier. La méconnaissance des obligations déclaratives entraîne nécessairement l’irrégularité du compte au sens de l’article L. 52-12 du code électoral.
**B. L’appréciation souveraine du degré de gravité justifiant l’inéligibilité**
L’article L.O. 136-1 permet au juge de prononcer l’inéligibilité en cas de « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales ». Le Conseil constitutionnel estime que la candidate « ne pouvait ignorer la portée » de l’obligation de disposer d’un compte bancaire de campagne. La méconnaissance de cette règle fondamentale est qualifiée de grave car elle fait obstacle à toute mission de contrôle de la part publique. Le prononcé d’une « inéligibilité à tout mandat pour une durée d’un an » reflète la volonté du juge de sanctionner fermement l’opacité financière. Cette mesure de police électorale assure le respect des principes démocratiques en écartant de la vie publique les candidats aux comptes insincères.