Le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2025-6498 AN du 20 juin 2025, se prononce sur le financement des campagnes électorales lors du scrutin législatif de juin 2024. Une candidate ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés devait déposer son compte de campagne avant le 6 septembre 2024 à 18 heures. Le dépôt effectif n’est intervenu que le 14 octobre 2024, soit après l’expiration du délai légal imparti par le code électoral. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le juge constitutionnel le 13 février 2025 pour constater ce manquement. L’intéressée invoque des difficultés bancaires rencontrées par son mandataire pour justifier ce retard important dans la transmission des documents comptables requis. La question posée au Conseil concerne la qualification de ce retard de dépôt au regard de l’exigence de particulière gravité justifiant une déclaration d’inéligibilité. Les juges décident que le non-respect des délais prescrits constitue un manquement grave et prononcent une inéligibilité d’un an à l’encontre de la candidate. L’analyse de la rigueur des délais légaux précédera l’étude des conséquences juridiques attachées au constat d’un manquement d’une particulière gravité.
I. La rigueur absolue des délais de dépôt du compte de campagne A. L’assujettissement légal aux obligations de transparence financière Le code électoral impose à chaque candidat obtenant au moins 1 % des suffrages exprimés l’établissement d’un compte de campagne retraçant l’ensemble des recettes. Cette obligation de transparence financière vise à garantir l’équilibre des dépenses engagées en vue de l’élection et à prévenir toute fraude électorale potentielle. « Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne » dans un délai strict de dix semaines après le scrutin. Le respect de ce calendrier permet un contrôle efficace et rapide de la régularité des financements utilisés par les prétendants à la représentation nationale.
B. L’inefficacité des justifications fondées sur des obstacles matériels Pour contester le grief, la candidate invoquait « les difficultés rencontrées par son mandataire financier pour obtenir l’ouverture d’un compte bancaire » durant la période légale. Le Conseil rejette fermement cet argument en précisant que cette circonstance ne saurait « justifier la méconnaissance des obligations résultant de l’article L. 52-12 ». La jurisprudence maintient ainsi une approche rigoureuse où les aléas administratifs ne permettent pas d’écarter la responsabilité personnelle du candidat sur sa gestion comptable. Si le respect du calendrier comptable s’impose de manière absolue, son non-respect entraîne l’application d’une sanction rigoureuse par le juge électoral.
II. La sévérité de la sanction pour manquement grave aux règles de financement A. La caractérisation d’un manquement d’une particulière gravité Le juge constitutionnel dispose du pouvoir de déclarer inéligible le candidat n’ayant pas respecté les conditions de dépôt prévues par les dispositions organiques en vigueur. Un retard de plusieurs semaines est analysé par le Conseil comme un manquement d’une particulière gravité au regard des règles essentielles du financement politique. « Compte tenu de la particulière gravité de ce manquement », l’autorité juridictionnelle estime nécessaire d’appliquer la sanction prévue à l’article L.O. 136-1 du code électoral. L’absence de volonté de fraude n’exonère pas le candidat lorsque la négligence compromet le contrôle exercé par l’administration sur les comptes.
B. La proportionnalité de la mesure d’inéligibilité prononcée La décision du 20 juin 2025 fixe la durée de l’inéligibilité à un an à compter de sa publication officielle au Journal officiel de la République. Cette sanction demeure proportionnée à l’objectif de préservation de la probité des élus et de la clarté des opérations financières électorales menées sur le territoire. En statuant ainsi, le Conseil constitutionnel réaffirme l’importance primordiale du calendrier comptable pour assurer le contrôle effectif des ressources utilisées par tous les candidats. La décision garantit l’égalité devant le suffrage en sanctionnant fermement les omissions susceptibles de fausser la perception publique de la régularité des financements électoraux.