Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6498 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 20 juin 2025, une décision relative au contrôle des comptes de campagne lors des élections législatives. Cette décision intervient dans un contentieux électoral classique portant sur le respect des délais impératifs de dépôt des documents comptables. Une candidate ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés devait remettre son compte de campagne au plus tard le 6 septembre 2024. Le dépôt effectif n’est intervenu que le 14 octobre 2024, soit après l’expiration du délai légal imparti par le code électoral. La candidate a invoqué les difficultés rencontrées par son mandataire financier pour ouvrir un compte bancaire afin de justifier ce retard manifeste. Saisi par l’organe de contrôle des comptes de campagne, le juge constitutionnel devait apprécier la gravité de la méconnaissance des règles de financement. Le juge considère que le non-respect des délais prescrits constitue un manquement d’une particulière gravité justifiant une sanction d’inéligibilité. La rigueur du juge se manifeste par le rejet des justifications liées aux obstacles bancaires pour maintenir l’intégrité du contrôle financier. Le Conseil constitutionnel retient le caractère substantiel de l’obligation de dépôt pour prononcer une inéligibilité d’un an envers la candidate défaillante. L’examen de cette décision commande d’analyser d’abord la caractérisation du manquement aux règles de financement avant d’étudier la portée de la sanction d’inéligibilité prononcée.

I. La caractérisation d’un manquement grave aux règles de financement

A. L’exigence impérative de dépôt du compte de campagne dans les délais

Le Conseil rappelle que tout candidat obtenant au moins 1 % des suffrages exprimés doit établir et déposer un compte de campagne équilibré. Ce document doit être transmis à l’autorité administrative compétente avant le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin sous peine de sanction. Le juge constitutionnel souligne que « ce compte de campagne doit être déposé […] au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour ». La fixation d’un délai précis garantit l’égalité entre les candidats et permet un contrôle efficace des ressources engagées durant la période électorale. Dans l’espèce commentée, le retard de plus d’un mois est jugé incompatible avec les exigences de célérité inhérentes au droit électoral français. L’absence de dépôt dans les temps prescrits prive l’administration de sa capacité à vérifier la régularité des recettes et des dépenses engagées. Cette obligation de ponctualité constitue une formalité substantielle dont le non-respect entache irrémédiablement la régularité de la candidature au regard du financement.

B. L’insuffisance des justifications liées aux obstacles bancaires

La candidate tentait de justifier ce dépôt tardif par les entraves rencontrées par son mandataire financier lors des démarches d’ouverture d’un compte bancaire. Le Conseil constitutionnel écarte cet argument en affirmant que cette circonstance « n’est pas de nature à justifier la méconnaissance des obligations » légales. Le juge estime que les difficultés administratives ou bancaires ne sauraient exonérer le candidat de sa responsabilité personnelle dans la gestion de sa campagne. Cette fermeté jurisprudentielle impose aux prétendants aux mandats nationaux une vigilance accrue dès le début de leur entrée en lice électorale. Le rejet de toute cause de justification externe renforce le caractère objectif de l’obligation de dépôt du compte de campagne dans les délais. La candidate aurait dû anticiper ces obstacles techniques pour garantir la transmission de ses documents comptables avant la date butoir du 6 septembre 2024. La constatation de ce manquement injustifié conduit naturellement le juge à en apprécier la gravité pour déterminer la sanction appropriée.

II. La sanction rigoureuse des obligations de transparence électorale

A. Le constat d’un manquement d’une particulière gravité

Le code électoral permet au juge de déclarer inéligible le candidat en cas de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement électoral. Le Conseil constitutionnel qualifie explicitement le retard constaté de « particulière gravité » pour fonder sa décision de retrait du droit de se présenter. Cette qualification juridique traduit la volonté de protéger la transparence financière contre les négligences graves pouvant fausser la sincérité du scrutin législatif. Le juge ne se contente pas de constater le retard mais il apprécie son ampleur pour en déduire une volonté de s’abstraire du contrôle. La sévérité de l’appréciation souligne l’importance accordée à la ponctualité des dépôts pour la régularité démocratique des opérations de financement politique. En l’absence de circonstances atténuantes reconnues, le dépassement du délai légal de plusieurs semaines revêt un caractère de gravité suffisant pour l’application des dispositions restrictives.

B. La portée de la déclaration d’inéligibilité d’une durée d’un an

Le dispositif de la décision prononce une inéligibilité d’une durée d’un an à compter de la date de son prononcé par les juges constitutionnels. Cette sanction prive la candidate de la possibilité de solliciter un nouveau mandat électoral durant cette période de temps déterminée par le juge. La décision sera notifiée selon les procédures habituelles et publiée au Journal officiel pour assurer une information complète des citoyens et des administrations. Cette mesure de police électorale confirme la fonction pédagogique et répressive du Conseil constitutionnel en matière de financement des activités politiques nationales. L’arrêt illustre ainsi la pérennité d’une jurisprudence stricte veillant au respect scrupuleux des calendriers légaux par l’ensemble des acteurs de la vie publique. La brièveté de la période d’inéligibilité n’enlève rien à la force du rappel à l’ordre adressé aux futurs candidats sur la rigueur comptable exigée.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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