Le Conseil constitutionnel, par une décision n° 2025-6515 AN rendue le 19 juin 2025, statue sur les obligations de financement électoral. Cette affaire concerne le dépôt tardif du compte de campagne d’une candidate aux élections législatives de juin et juillet 2024. L’intéressée a obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés lors du scrutin organisé dans une circonscription départementale. Elle était donc tenue de déposer son compte de campagne avant le 6 septembre 2024 à 18 heures précises. Le dépôt effectif n’est intervenu que le 9 septembre 2024, soit trois jours après l’expiration du délai légal impératif.
L’autorité administrative de contrôle des comptes a saisi le juge constitutionnel le 19 février 2025 pour constater ce manquement substantiel. La question posée est de savoir si un retard de trois jours constitue une faute justifiant une déclaration d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel juge que le dépôt tardif présente ici une particulière gravité en l’absence de justification sérieuse. Il prononce ainsi l’inéligibilité de la candidate pour une durée d’un an à compter de la présente décision. L’examen de la rigueur des délais de dépôt précédera celui de la sévérité de la sanction retenue.
I. La rigueur impérative du respect des délais de dépôt
Le code électoral impose une transparence financière stricte pour garantir l’équité du scrutin et la sincérité du contrôle des fonds. L’article L. 52-12 dispose que le compte « doit être déposé […] au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour ». Cette exigence temporelle assure un traitement efficace des dossiers par l’autorité administrative compétente pour vérifier les recettes et les dépenses. Le compte doit retracer « l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées ». Le respect de ce calendrier permet d’identifier rapidement d’éventuels dépassements des plafonds autorisés par la législation électorale.
A. L’objectivité du calendrier de reddition des comptes
Le respect des délais constitue une condition substantielle du contrôle régulier du financement électoral par le juge et l’autorité spécialisée. La candidate a déposé ses documents comptables le 9 septembre 2024 alors que le terme légal était fixé au 6 septembre. Ce constat purement chronologique suffit à établir la méconnaissance des obligations résultant des dispositions législatives en vigueur. La précision des horaires mentionnés par le texte ne laisse aucune place à l’interprétation ou à la souplesse administrative.
B. Le caractère impératif de la date butoir
L’équilibre des comptes et leur dépôt ponctuel permettent de vérifier l’absence de dépassement du plafond des dépenses électorales autorisées. Le Conseil rappelle que chaque candidat doit retracer avec précision l’origine et la nature de tous ses mouvements financiers de campagne. Le dépassement de trois jours, bien que temporellement court, rompt l’égalité devant la loi entre tous les compétiteurs du scrutin. Cette rigueur temporelle justifie l’examen de la qualification juridique du manquement et de la sanction prononcée par le juge.
II. La sanction d’un manquement d’une particulière gravité
Le juge constitutionnel dispose du pouvoir de déclarer inéligible un candidat ayant méconnu les règles de financement de sa propre campagne. L’article L.O. 136-1 permet cette sanction en cas de « volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité » aux règles. La décision commentée illustre l’application de cette qualification juridique à un retard de dépôt sans aucune justification matérielle ou juridique.
A. L’absence souveraine de circonstances justificatives
L’inéligibilité n’est pas automatique car le juge recherche si des motifs légitimes peuvent expliquer le retard constaté durant l’instruction judiciaire. Le Conseil précise ici qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance ». L’intéressée n’a produit aucun élément probant pour démontrer une impossibilité matérielle ou un cas de force majeure insurmontable. Le juge constitutionnel exerce un contrôle strict sur les excuses invoquées par les candidats pour s’exonérer de leurs obligations légales.
B. La portée du prononcé de l’inéligibilité
La durée de l’inéligibilité fixée à une année témoigne de la volonté du juge de réprimer fermement les négligences administratives sérieuses. Cette sanction prive l’intéressée de la possibilité de solliciter un nouveau mandat pour une période déterminée par la présente décision. La jurisprudence confirme ainsi que le retard dans le dépôt du compte est assimilé par le juge à une absence de dépôt. Une telle solution protège l’ordre public électoral en dissuadant les futurs candidats de négliger les formalités prescrites par le code.