Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6516 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 20 juin 2025, une décision relative au contrôle des comptes de campagne des élections législatives de juin 2024. Un candidat s’étant présenté dans la première circonscription de Mayotte a obtenu au moins un pour cent des suffrages exprimés lors du scrutin. Cette performance électorale imposait à l’intéressé l’établissement et le dépôt d’un compte de campagne retraçant l’ensemble de ses recettes et dépenses engagées. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté l’absence de dépôt du document dans le délai légal prescrit. Saisi par cette autorité administrative, le juge constitutionnel doit déterminer si le défaut total de présentation du compte justifie l’inéligibilité du candidat. Le Conseil constitutionnel retient l’existence d’un manquement d’une particulière gravité et prononce une inéligibilité pour une durée de trois années. L’examen de cette décision conduit à analyser l’affirmation d’une obligation comptable impérative (I), puis la sanction d’un manquement d’une particulière gravité (II).

I. L’affirmation d’une obligation comptable impérative

L’article L. 52-12 du code électoral oblige tout candidat obtenant au moins un pour cent des voix à déposer son compte de campagne en équilibre. Ce document doit être remis à la commission nationale compétente au plus tard « le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin » selon la loi. Cette formalité permet d’assurer l’égalité entre les candidats et la sincérité du scrutin par un contrôle effectif des ressources et des dépenses électorales. Le Conseil précise que le compte « retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées ». La méconnaissance de ce calendrier ou de la forme du dépôt constitue une violation directe des règles de financement des campagnes électorales françaises.

A. Le cadre rigoureux du dépôt du compte de campagne

Le candidat n’a produit aucune observation devant le Conseil constitutionnel malgré la communication de la saisine effectuée par les services de la commission nationale. Le juge souligne dans ses motifs qu’à l’expiration du délai légal, l’intéressé « n’a pas déposé de compte de campagne alors qu’il y était tenu ». Aucune difficulté technique ou force majeure n’a été invoquée pour expliquer l’omission totale de cette obligation déclarative pourtant fondamentale dans notre système électoral. Le Conseil constitutionnel affirme qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations » légales. Cette rigueur juridique témoigne de la volonté du juge d’écarter toute tolérance envers les omissions purement passives des candidats aux élections législatives.

B. L’absence de circonstances justificatives

II. La sanction d’un manquement d’une particulière gravité

L’article L.O. 136-1 permet de déclarer inéligible le candidat qui n’a pas respecté les conditions de dépôt en cas de manquement d’une particulière gravité. Le Conseil constitutionnel considère que l’absence totale de compte de campagne prive l’administration de tout moyen de contrôle sur les financements perçus. Une telle carence constitue par nature une faute lourde qui altère la transparence financière indispensable à la légitimité démocratique des élus de la nation. La décision énonce que « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement », il convient de prononcer une sanction d’inéligibilité à l’encontre de l’intéressé. Cette qualification juridique montre que le juge assimile l’abstention totale à une volonté délibérée de se soustraire aux obligations de vérification comptable.

A. La caractérisation de la gravité du défaut de dépôt

Le juge prononce une inéligibilité à tout mandat pour une durée de trois ans, soit une durée significative qui dépasse le minimum parfois retenu. Cette sanction prive l’intéressé de la possibilité de se présenter à de nouveaux scrutins pendant cette période, assurant ainsi une moralisation de la vie politique. Le dispositif prévoit que le candidat est « déclaré inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral » à compter de la présente décision. Le jugement sera notifié aux autorités compétentes et publié au Journal officiel pour informer les tiers de cette incapacité électorale frappant l’ancien candidat. Cette fermeté jurisprudentielle confirme la politique constante du Conseil constitutionnel visant à sanctionner sévèrement les irrégularités majeures affectant le financement des campagnes électorales.

B. La portée de la déclaration d’inéligibilité

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Hassan KOHEN
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