Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6559 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, une décision relative au contentieux né des élections législatives de l’année 2024. Cette espèce porte sur l’obligation impérative imposée aux candidats de retracer leurs opérations financières au moyen d’un compte bancaire unique.

À la suite du scrutin, une candidate n’a pas procédé à l’ouverture du compte requis par l’entremise de son mandataire financier. L’autorité de contrôle des comptes de campagne a rejeté le compte le 25 novembre 2024 au motif de cette carence flagrante. Elle a ensuite saisi le juge constitutionnel afin qu’il statue sur la régularité de l’élection et l’inéligibilité de l’intéressée.

La candidate excipe du refus opposé par plusieurs établissements bancaires pour justifier l’absence de compte dédié à ses opérations électorales. La question se pose de savoir si l’impossibilité d’ouvrir un compte bancaire exonère le candidat de ses obligations de transparence financière.

Le juge décide que la méconnaissance des dispositions législatives constitue un manquement grave justifiant le rejet du compte et l’inéligibilité. Il convient d’analyser d’abord la rigueur de l’obligation de dépôt des fonds avant d’étudier la sévérité de la sanction prononcée.

I. La rigueur de l’obligation de dépôt des fonds sur un compte bancaire unique

A. Le caractère impératif de l’identification des flux financiers

L’article L. 52-6 du code électoral « impose au mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations ». Cette disposition garantit la traçabilité intégrale des recettes et des dépenses engagées durant la période électorale par chaque candidat.

Le texte précise que l’intitulé du compte doit mentionner la qualité de mandataire pour permettre un contrôle rigoureux des fonds. L’absence totale de ce support technique empêche l’autorité administrative de vérifier l’origine réelle des sommes collectées pour la campagne.

B. L’indifférence des obstacles matériels rencontrés par le candidat

L’intéressée invoque « les refus qui auraient été opposés par plusieurs établissements bancaires » pour expliquer l’absence de compte spécifique. Le juge constitutionnel écarte cet argument en affirmant que cette circonstance ne saurait justifier la violation des obligations électorales.

Cette position rigoureuse oblige le candidat à anticiper les obstacles bancaires ou à user du droit au compte pour régulariser sa situation. La passivité face aux réticences des banques ne constitue pas une cause d’exonération susceptible d’effacer l’irrégularité constatée par le juge.

II. La sévérité de la sanction du manquement aux règles de financement

A. La qualification d’un manquement d’une particulière gravité

Le juge estime que le défaut d’ouverture d’un compte bancaire unique constitue une infraction substantielle aux règles du droit électoral. Il affirme que « cette circonstance est établie » et confirme ainsi le rejet préalable opéré par l’autorité de contrôle des comptes.

La jurisprudence qualifie ici l’omission de « manquement d’une particulière gravité » pour souligner l’atteinte portée à la clarté du financement. Cette appréciation stricte interdit toute modulation de la faute en fonction de la bonne foi supposée de l’acteur politique concerné.

B. Le prononcé de l’inéligibilité comme mesure de protection du scrutin

L’article L.O. 136-1 permet au Conseil constitutionnel de déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté. Le juge prononce donc « l’inéligibilité de la candidate à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision ».

La durée fixée reflète la volonté du juge de sanctionner fermement l’absence de transparence sans toutefois prononcer la peine maximale. Cette mesure garantit l’égalité entre les candidats et assure le respect futur des mécanismes de contrôle des finances de la vie publique.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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