Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, une décision concernant la régularité du financement d’une campagne lors des élections législatives de 2024. Une candidate a vu son compte de campagne rejeté par l’autorité administrative compétente le 25 novembre 2024 en raison de l’absence de compte bancaire dédié. Saisie par cette commission le 4 mars 2025, la juridiction constitutionnelle devait se prononcer sur les conséquences juridiques de cette omission matérielle. La candidate invoquait, pour sa défense, les refus d’ouverture de compte opposés par plusieurs établissements bancaires sollicités durant la période électorale. Le litige porte sur l’obligation pour le mandataire financier d’utiliser un compte unique pour retracer l’ensemble des opérations financières liées à la candidature. Le juge devait déterminer si l’absence de compte bancaire justifie le rejet du compte et si ce manquement présente une gravité suffisante pour entraîner l’inéligibilité. Le Conseil confirme le rejet du compte et prononce une inéligibilité d’un an en soulignant la gravité du manquement aux règles du code électoral.
I. L’affirmation de l’obligation formelle d’ouverture d’un compte bancaire
A. Le caractère impératif de l’unicité du compte de campagne
L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier « d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières ». Cette règle constitue un pilier de la transparence financière en permettant une traçabilité intégrale des mouvements de fonds durant la période électorale. Le juge rappelle que ce compte doit préciser que le titulaire agit en qualité de mandataire financier d’un candidat nommément désigné lors de l’ouverture. Cette formalité administrative permet à la commission de contrôle d’exercer sa mission de vérification de l’origine et de la nature des dépenses engagées. L’absence totale de ce support bancaire empêche structurellement toute vérification fiable de la sincérité et de l’équilibre réel du compte de campagne déposé.
B. L’insuffisance des difficultés pratiques comme cause d’exonération
La candidate tentait de justifier l’absence de compte par les refus systématiques opposés par plusieurs banques lors de ses démarches préalables au scrutin. Le Conseil constitutionnel écarte cet argument en précisant que « cette circonstance n’est pas de nature, à elle seule, à justifier la méconnaissance des obligations ». Le droit au compte existe pourtant dans le système juridique français afin de permettre aux citoyens d’accomplir leurs obligations légales de mandataire. Il appartenait donc à la candidate de saisir la Banque de France pour obtenir la désignation d’un établissement d’office conformément aux dispositions législatives en vigueur. La négligence dans l’exercice de ces recours administratifs rend la violation des règles de financement imputable à la seule candidate et à son mandataire.
II. La sanction de la méconnaissance grave des règles de financement
A. La qualification juridique d’un manquement d’une particulière gravité
Le rejet du compte de campagne n’entraîne pas automatiquement l’inéligibilité du candidat car le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation selon l’article L.O. 136-1. Le Conseil constitutionnel recherche systématiquement s’il existe « une volonté de fraude ou un manquement d’une particulière gravité » pour justifier une telle mesure d’exclusion. En l’espèce, l’absence de compte bancaire est considérée comme une faute majeure car elle vide de sa substance le contrôle exercé par l’autorité publique. La jurisprudence constitutionnelle considère que le respect des formalités bancaires est une condition essentielle de la validité des opérations de financement de la vie politique. Le juge conclut ici « qu’il y a lieu de prononcer l’inéligibilité » en raison de l’importance fondamentale de cette règle pour la sincérité du scrutin.
B. La portée de la déclaration d’inéligibilité pour une durée d’un an
La sanction prononcée consiste en une inéligibilité à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la date de la présente décision. Cette durée minimale témoigne d’une volonté de proportionner la sanction à l’absence de volonté de fraude manifeste tout en réprimant la négligence grave. La décision rappelle que le juge constitutionnel veille scrupuleusement à l’égalité des candidats devant les charges et les obligations imposées par la législation électorale. Cette fermeté jurisprudentielle assure une discipline collective nécessaire au bon fonctionnement démocratique et à la confiance des citoyens dans le financement des élus. L’autorité de la chose jugée s’attache à cette décision qui sera notifiée aux autorités compétentes et publiée au Journal officiel de la République française.