Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6560 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, la décision n° 2025-6560 AN portant sur le financement de la campagne électorale d’un candidat aux élections législatives. Un candidat ayant participé au scrutin de juin et juillet 2024 dans la troisième circonscription de l’Ain a vu son compte de campagne rejeté par la commission. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le juge électoral le 4 mars 2025 après avoir constaté plusieurs irrégularités graves. Le candidat n’a produit aucune observation devant la juridiction suprême malgré la communication régulière de cette saisine administrative effectuée par les services du secrétariat général. La question posée au juge constitutionnel résidait dans l’appréciation de la gravité de manquements cumulés relatifs aux modalités de gestion financière de la propagande électorale. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet du compte et prononce une inéligibilité de trois ans en raison du caractère substantiel des obligations législatives méconnues par l’intéressé.

I. La confirmation du rejet d’un compte de campagne irrégulier

A. La méconnaissance des règles relatives au mandataire financier

Le code électoral impose au candidat de désigner un mandataire financier chargé de retracer l’intégralité des recettes perçues et des dépenses engagées pour l’élection. Dans cette affaire, le mandataire financier choisi par l’intéressé était une association dont le candidat exerçait lui-même la fonction de président au moment des faits. Cette organisation contrevient directement aux dispositions législatives selon lesquelles « le candidat ne peut pas être membre de son association de financement électoral ». La juridiction souligne également que ce mandataire n’avait ouvert aucun compte bancaire ou postal unique pour enregistrer les diverses opérations financières liées au scrutin. L’absence de compte bancaire spécifique empêche le contrôle efficace de la traçabilité des fonds et constitue une violation caractérisée des exigences légales de transparence financière.

B. L’irrégularité tenant au règlement direct des dépenses électorales

Le juge électoral rappelle que le mandataire financier doit normalement régler les dépenses engagées en vue de l’élection à l’exception de menues factures isolées. Le candidat a toutefois procédé au règlement direct de la somme totale de sept cent soixante-treize euros représentant l’intégralité des frais de sa campagne électorale. Le Conseil constitutionnel juge que « les dispositions du troisième alinéa de l’article L. 52-4 n’avaient pas été respectées » en raison de ce paiement intégral. Cette pratique interdit au mandataire d’exercer sa mission de surveillance et de centralisation des flux financiers telle que définie par les textes législatifs en vigueur. Une telle méconnaissance globale des mécanismes de financement électoral justifie légalement la décision de rejet prise initialement par la commission de contrôle lors de son examen.

II. Le prononcé d’une inéligibilité proportionnée à la gravité des manquements

A. L’appréciation d’un manquement d’une particulière gravité

Le juge dispose de la faculté de déclarer inéligible un candidat dont le compte est rejeté en cas de manquement d’une particulière gravité aux règles. Le Conseil constitutionnel fonde sa décision sur « le cumul et le caractère substantiel des obligations méconnues » par le candidat lors des opérations électorales litigieuses. La juridiction estime que l’intéressé ne pouvait ignorer la portée de ces règles fondamentales régissant le financement de la vie politique dans notre État de droit. L’accumulation d’erreurs structurelles concernant l’identité du mandataire et le mode de règlement des factures dépasse le cadre de la simple erreur matérielle involontaire. La volonté de fraude n’est pas explicitement mentionnée mais la gravité objective des faits suffit à caractériser une atteinte sérieuse à la probité du scrutin.

B. La portée temporelle de la sanction d’inéligibilité

La sanction prononcée par les membres du Conseil consiste en une interdiction de se présenter à tout mandat électoral pour une durée de trois années. Cette mesure prend effet à compter de la date de la décision conformément aux dispositions organiques relatives au contentieux de l’élection des députés et sénateurs. Le juge use ici de son pouvoir d’appréciation pour fixer une durée significative mais conforme à l’échelle des peines prévues par le code électoral national. La publication de cette décision au Journal officiel assure l’information des tiers et l’exécution immédiate de la sanction sur l’ensemble du territoire de la République. Cette solution rigoureuse rappelle l’importance capitale du respect des formes prescrites pour garantir l’égalité entre les candidats et la clarté des fonds engagés.

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Hassan KOHEN
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