Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-882 DC du 15 mai 2025

Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 15 mai 2025, a examiné la conformité d’une loi organique réformant les modalités des scrutins municipaux. Le Premier ministre a sollicité ce contrôle afin de valider l’harmonisation des règles électorales visant à garantir la vitalité démocratique et la parité. Plusieurs sénateurs ont adressé des observations concernant l’impact de ces modifications sur les droits des citoyens ressortissants de l’Union européenne résidant en France. L’objet du litige porte sur l’extension du scrutin de liste paritaire aux communes dont la population est inférieure à mille habitants.

Les faits reposent sur l’adoption définitive d’un texte législatif modifiant les conditions de candidature et les mentions obligatoires portées sur les bulletins. La procédure a respecté les exigences de l’article 46 de la Constitution, la loi ayant été votée dans les mêmes termes par les assemblées. La question de droit consistait à savoir si l’unification des règles électorales respectait les limites posées par l’article 88-3 relatif au droit de vote européen. Le Conseil constitutionnel a conclu à la pleine conformité des dispositions critiquées, validant ainsi la simplification du cadre juridique applicable aux élections locales. L’analyse de cette décision conduit à étudier la consécration d’un régime électoral unifié pour les citoyens européens avant d’aborder l’adaptation structurelle du droit électoral.

I. La consécration d’un régime électoral unifié pour les citoyens européens

A. La réitération des conditions d’éligibilité constitutionnelles

Le juge constitutionnel rappelle que le droit de vote et d’éligibilité peut être accordé « aux seuls citoyens de l’Union résidant en France ». Cette prérogative s’exerce selon les modalités prévues par le Traité sur l’Union européenne, tout en respectant une clause impérative de réciprocité. La décision souligne que ces citoyens étrangers ne peuvent cependant jamais « exercer les fonctions de maire ou d’adjoint » ni participer au collège électoral sénatorial. Ces limitations visent à préserver l’exercice de la souveraineté nationale au sein des institutions de la République française, conformément à la tradition constitutionnelle.

L’article 1er de la loi organique ajuste les textes en vigueur pour tirer les conséquences de l’extension du mode de scrutin de liste paritaire. Le législateur a souhaité supprimer les distinctions procédurales fondées sur la taille des communes, afin de renforcer la clarté du processus électoral. Le Conseil valide cette approche qui ne porte aucune atteinte aux garanties offertes aux ressortissants communautaires lors des scrutins locaux. La décision confirme la compétence du législateur organique pour déterminer « les conditions d’application » de ces droits civiques spécifiques au sein du code électoral.

B. Le renforcement de la transparence par l’indication de la nationalité

La décision valide la modification de l’article L.O. 247-1 imposant la mention de la nationalité des candidats ressortissants d’un État membre sur les bulletins. Cette règle s’applique désormais à l’ensemble des communes françaises, sans distinction liée au nombre d’habitants, afin d’assurer l’information complète et sincère des électeurs. Le défaut de cette précision est sanctionné par la nullité des bulletins, garantissant ainsi l’effectivité de la mesure de transparence souhaitée par le Parlement. Cette obligation purement technique ne constitue pas une entrave disproportionnée à la liberté de candidature ou au principe d’égalité devant le suffrage.

Le Conseil constitutionnel estime que cette exigence d’identification participe à la loyauté de la consultation électorale dans un cadre démocratique moderne et harmonisé. L’extension de cette mesure de coordination à toutes les communes permet de supprimer des régimes d’exception devenus complexes et potentiellement sources d’erreurs matérielles. Les juges considèrent que cette formalité administrative respecte parfaitement l’équilibre entre l’ouverture des mandats municipaux et la nécessaire identification des candidats. Cette transparence renforcée accompagne naturellement la mutation globale des structures de candidature au sein des territoires ruraux désormais soumis à des exigences communes.

II. L’adaptation structurelle du droit électoral aux exigences de parité

A. La simplification des modalités de candidature en zone rurale

L’abrogation de l’article L.O. 255-5 du code électoral marque la fin des régimes dérogatoires pour les communes comptant moins de mille habitants résidents. Jusqu’alors, ces territoires bénéficiaient de modalités particulières de candidature pour les ressortissants européens, lesquelles disparaissent au profit d’un cadre juridique désormais totalement commun. Cette suppression découle directement de la généralisation du scrutin de liste, lequel impose des contraintes de parité et de présentation globale des équipes municipales. Le juge constitutionnel valide cette mutation législative qui simplifie les opérations de vérification des candidatures par les services de l’État.

Cette unification procédurale évite les confusions juridiques lors de l’organisation simultanée de scrutins sur l’ensemble du territoire national lors des renouvellements généraux. La loi organique tire ainsi toutes les conséquences logiques de la réforme structurelle engagée par le législateur ordinaire dans le texte de référence. Le Conseil constitutionnel reconnaît la cohérence globale de ce dispositif qui assure une meilleure vitalité démocratique au sein des plus petites structures communales. La décision confirme que le législateur peut légitimement harmoniser les règles de forme sans méconnaître les droits fondamentaux protégés par la Constitution.

B. La préservation de la hiérarchie des mandats électifs

La réforme modifie également l’article L.O. 141 afin de maintenir l’incompatibilité entre le mandat de député et celui de conseiller municipal. Cette mesure de coordination est jugée indispensable pour assurer le bon fonctionnement des institutions et éviter le cumul excessif des fonctions électives nationales. Le Conseil constitutionnel veille à ce que l’extension du scrutin de liste ne perturbe pas l’équilibre préexistant relatif à l’exercice des mandats publics. Cette disposition organique garantit que les élus se consacrent pleinement à leurs missions au sein des assemblées parlementaires ou des exécutifs de proximité.

La validation de l’article 2 fixe les conditions d’entrée en vigueur de la réforme, assurant ainsi la sécurité juridique nécessaire aux futurs candidats. Le juge constitutionnel conclut à la conformité totale du texte, soulignant la qualité du travail législatif accompli pour moderniser notre droit électoral républicain. Cette décision illustre la volonté de concilier l’ouverture européenne avec les impératifs de parité et de cohésion au sein des collectivités territoriales françaises. L’ensemble des dispositions soumises à l’examen apparaît comme une traduction fidèle des engagements constitutionnels pris en faveur de la démocratie locale.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture