Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-883 DC du 15 mai 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 15 mai 2025, une décision relative à la loi visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales. Ce texte généralise le scrutin de liste paritaire aux petites communes, lesquelles relevaient jusqu’alors d’un régime majoritaire autorisant les candidatures isolées. Saisi par les représentants du pouvoir exécutif ainsi que par de nombreux parlementaires, le juge constitutionnel devait se prononcer sur la validité de cette transformation structurelle. Les requérants dénonçaient notamment une atteinte au droit d’éligibilité, au secret du suffrage et au principe de libre administration des collectivités territoriales. La question centrale consistait à déterminer si l’objectif constitutionnel de parité justifiait la suppression des modalités électorales traditionnelles propres aux territoires ruraux. Le Conseil a déclaré les dispositions conformes en estimant que le législateur avait opéré une conciliation équilibrée entre les exigences constitutionnelles concurrentes. Cette décision consacre la primauté de l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux tout en encadrant les conditions techniques de la réforme.

I. La primauté de l’objectif de parité dans l’organisation du scrutin municipal

A. La généralisation du scrutin de liste paritaire

L’article 1er de la loi déférée réécrit les articles L. 252 et L. 255-2 du code électoral pour imposer la représentation proportionnelle dans toutes les communes. Le Conseil rappelle que le législateur peut instaurer « tout dispositif tendant à rendre effectif l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux ». Cette volonté de favoriser la parité constitue la clé de voûte du raisonnement juridique suivi par la haute juridiction. Les juges soulignent que cette modification vise également à renforcer la « cohésion de l’équipe municipale autour d’un projet politique défini collectivement ». En validant ce choix, le juge écarte les griefs portant sur la fin des candidatures isolées et du panachage autrefois autorisés. L’intérêt général attaché à l’effectivité de l’article 1er de la Constitution l’emporte ainsi sur la flexibilité historique du vote dans les villages.

B. L’encadrement des contraintes démographiques par des mesures d’adaptation

Pour éviter que l’exigence de listes complètes ne paralyse la vie locale, le législateur a prévu des dérogations spécifiques aux règles de composition. Le Conseil relève ainsi que « la liste est réputée complète si elle compte jusqu’à deux candidats de moins » que l’effectif légal. Ces adaptations permettent de maintenir le droit d’éligibilité des citoyens malgré la faible population de certaines circonscriptions électorales rurales. Les juges considèrent que ces mesures garantissent une « conciliation qui n’est pas manifestement déséquilibrée » entre le pluralisme et l’objectif de parité. Le principe de libre administration des collectivités territoriales se trouve respecté puisque la formation des conseils demeure juridiquement et matériellement possible. L’existence de seuils réduits pour la validité des listes constitue une garantie légale préservant la continuité du service public communal.

II. La reconnaissance de la souveraineté législative face aux traditions électorales

A. Le rejet d’une protection constitutionnelle spécifique pour les petites communes

Les requérants invoquaient l’existence d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République imposant des règles particulières pour les territoires ruraux. Le Conseil rejette fermement cette argumentation en précisant qu’aucune loi antérieure à 1946 n’a fixé un tel principe de distinction électorale. Il affirme que « le législateur est compétent pour fixer les règles concernant le régime électoral des assemblées locales » selon l’article 34 de la Constitution. L’uniformisation des modes de scrutin ne heurte donc aucune règle de valeur supérieure ni aucune tradition républicaine juridiquement contraignante. Le juge écarte également le grief de détournement de procédure lié à l’utilisation d’une proposition de loi pour porter cette réforme majeure. Cette position réaffirme la liberté du Parlement d’apprécier l’opportunité de modifier des textes antérieurs pour répondre aux besoins nouveaux.

B. La validation de la temporalité et des modalités de mise en œuvre

La décision examine enfin les critiques relatives au délai d’application de la loi et au recours aux ordonnances pour les collectivités ultramarines. Les juges précisent qu’aucune règle n’interdit de modifier le régime électoral « dans l’année qui précède la date de leur renouvellement général ». Le principe de sécurité juridique ne saurait donc faire obstacle à l’entrée en vigueur immédiate de nouvelles dispositions électorales souverainement votées. Le Conseil valide aussi l’habilitation donnée à l’autorité exécutive pour étendre la réforme dans certains territoires d’outre-mer par voie d’ordonnance. Il considère que le Parlement a été suffisamment informé de la finalité et du domaine d’intervention des mesures projetées. La conformité de l’article 7 confirme ainsi la pleine capacité du législateur à piloter le calendrier des mutations démocratiques de la nation.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture