Le Conseil constitutionnel a rendu, le 15 mai 2025, la décision n° 2025-883 DC relative à la loi harmonisant le mode de scrutin municipal. L’autorité gouvernementale et de nombreux parlementaires ont déféré ce texte pour contester la validité de l’extension de la parité aux petites communes. Les requérants invoquaient principalement une atteinte à la liberté d’éligibilité des citoyens et au principe de libre administration des collectivités territoriales françaises. Ils critiquaient également la procédure d’adoption législative en raison de l’absence de consultation préalable de certaines collectivités situées dans l’outre-mer. Le juge devait déterminer si l’objectif constitutionnel de parité justifiait l’imposition du scrutin de liste proportionnel dans les villages de faible population. Le Conseil a validé l’intégralité du texte en soulignant l’existence de mesures d’adaptation concrètes destinées à faciliter la constitution des listes électorales. L’analyse portera sur la conciliation entre parité et pluralisme avant d’étudier la régularité formelle et temporelle de cette réforme électorale d’envergure.
**I. L’extension du scrutin proportionnel au défi de la composition des conseils municipaux**
**A. La recherche d’une effectivité du principe de parité**
L’article premier de la loi modifie le code électoral afin de généraliser le mode de scrutin proportionnel à prime majoritaire sur tout le territoire. Cette réforme concerne désormais l’ensemble des communes de moins de mille habitants, au détriment de l’ancien scrutin majoritaire plurinominal avec panachage. Le législateur a souhaité mettre en œuvre le second alinéa de l’article premier de la Constitution relatif à l’égal accès aux mandats électoraux. L’objectif affiché consiste à « favoriser, dans les communes de moins de 1 000 habitants, l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats ». Cette volonté de parité s’accompagne d’une recherche de cohésion de l’équipe municipale autour d’un projet politique collectif clairement défini par les candidats. En outre, le passage au scrutin de liste impose une présentation ordonnée des citoyens pour garantir une présence féminine minimale au sein des assemblées.
**B. Une conciliation proportionnée avec la liberté d’éligibilité**
Les requérants soutenaient que l’obligation de constituer des listes paritaires nuirait gravement au droit d’éligibilité dans les zones rurales les plus dépeuplées. Le Conseil constitutionnel a toutefois relevé que le législateur avait assorti la réforme de « différentes mesures d’adaptation » permettant de surmonter ces difficultés. La loi prévoit notamment que les listes sont réputées complètes si elles comptent jusqu’à deux candidats de moins que l’effectif légalement requis. Le juge estime ainsi que le législateur n’a pas procédé à une conciliation « manifestement déséquilibrée » entre le pluralisme et l’objectif de parité. Cette solution préserve la libre administration des collectivités territoriales en limitant le risque de vacance prolongée des conseils municipaux dans les campagnes françaises. La validité matérielle de la réforme étant établie, il convient d’examiner la régularité de la procédure suivie devant les assemblées parlementaires.
**II. La consécration de la régularité procédurale et de la sécurité électorale**
**A. La validation du recours à la proposition de loi**
Les parlementaires contestaient la procédure législative en invoquant un détournement de procédure lié à l’usage d’une proposition de loi d’origine parlementaire. Le Conseil constitutionnel rappelle que « l’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement » selon la Constitution. Aucune règle n’interdisait l’usage de cette voie pour réformer le régime électoral des assemblées locales, compétence dévolue au législateur national français. L’absence de consultation préalable des collectivités d’outre-mer est également écartée car le texte initial ne comportait pas de dispositions particulières les concernant. Le recours aux ordonnances pour l’extension du texte en Nouvelle-Calédonie est enfin validé au regard des exigences posées par l’article trente-huit. La sérénité du débat parlementaire confirme la validité formelle du texte, dont l’application immédiate soulevait néanmoins des interrogations relatives au calendrier électoral.
**B. L’admission d’une réforme électorale proche du scrutin**
L’article sept de la loi fixe l’entrée en vigueur de la réforme au premier renouvellement général des conseils municipaux suivant sa promulgation. Les requérants invoquaient le principe de sécurité juridique pour contester une modification des règles de jeu à moins d’un an du scrutin. Le Conseil constitutionnel juge par ailleurs qu’aucune exigence constitutionnelle n’interdit de modifier le régime électoral dans l’année précédant la date du renouvellement. Le grief tiré de la méconnaissance de l’article seize de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen est donc logiquement écarté. Le juge refuse en revanche d’examiner la conformité du texte aux engagements internationaux de la France dans le cadre du contrôle de constitutionnalité. Cette décision confirme la souveraineté du législateur pour adapter les modalités de la démocratie locale aux nouveaux impératifs de la parité politique.