Le Conseil constitutionnel, par une décision du 5 juin 2025, s’est prononcé sur la conformité d’une loi organique relative au statut du procureur anti-criminalité organisée. Saisi par l’autorité de saisine en application de l’article 61 de la Constitution, le juge devait examiner des dispositions modifiant l’ordonnance du 22 décembre 1958. Le texte législatif instaure notamment un emploi de premier vice-procureur au sein de ce parquet spécialisé afin de lutter contre la délinquance organisée.
La procédure législative respecte les exigences de l’article 46 de la Constitution, tandis que le fond porte sur l’indépendance de l’autorité judiciaire garantie constitutionnellement. Le litige porte sur la validité de l’exclusion des priorités d’affectation pour ces magistrats et sur les conditions de nomination du procureur responsable. Les juges déclarent l’intégralité de la loi conforme, validant ainsi la création de ce nouveau statut dérogatoire au droit commun des tribunaux judiciaires.
L’étude de cette décision nécessite d’analyser l’aménagement des règles de mobilité géographique avant d’aborder l’alignement statutaire sur le procureur de la République de Paris.
I. Un aménagement spécifique des règles de mobilité et d’affectation
A. L’exclusion des priorités d’affectation pour les fonctions de premier vice-procureur
L’article 1er de la loi organique écarte la priorité d’affectation dont bénéficient habituellement les magistrats placés après deux ans d’exercice dans leurs fonctions. Cette dérogation s’applique désormais au « emploi de premier vice-procureur de la République anti-criminalité organisée » afin d’assurer une stabilité nécessaire à ces services. Le législateur justifie cette mesure par la technicité particulière des contentieux traités qui impose une continuité de l’action publique sur le long terme. Toutefois, cette restriction doit concilier les nécessités du service public de la justice avec les garanties statutaires traditionnellement accordées aux magistrats du siège.
B. La préservation de l’équilibre hiérarchique au sein du parquet spécialisé
Le Conseil constitutionnel valide cette modification qui s’inscrit dans une logique de spécialisation croissante des fonctions judiciaires au sein de la hiérarchie du parquet. L’organisation interne du nouveau service repose sur une structure pyramidale permettant une coordination efficace des enquêtes complexes sur l’ensemble du territoire national. Cette architecture administrative ne porte pas atteinte à l’indépendance de l’autorité judiciaire, dès lors que les garanties fondamentales du statut demeurent pleinement applicables. La décision confirme ainsi la possibilité de créer des régimes d’affectation particuliers tout en assurant une équivalence de statut avec les plus hautes fonctions du parquet.
II. Un alignement statutaire sur le régime du procureur de Paris
A. L’assimilation du procureur spécialisé aux magistrats placés hors hiérarchie
L’article 2 de la loi organique prévoit que le procureur anti-criminalité organisée soit soumis aux mêmes conditions que le procureur près le tribunal judiciaire de Paris. Le texte précise que les dispositions relatives aux fonctions de procureur placé hors hiérarchie sont « applicables au procureur de la République anti-criminalité organisée ». Cette assimilation permet d’offrir au titulaire de la fonction un rang protocolaire et une rémunération conformes à l’importance de ses responsabilités juridictionnelles. Elle garantit également une cohérence institutionnelle indispensable dont la validité constitutionnelle repose sur la nature singulière des missions confiées à ce nouveau procureur.
B. La constitutionnalité d’un régime dérogatoire fondé sur la nature des fonctions
Le juge constitutionnel estime que ces dispositions ne méconnaissent aucun principe supérieur, la loi ayant été « prise sur le fondement de l’article 64 ». La validation globale du texte souligne la volonté du Conseil de permettre l’adaptation des structures judiciaires face à l’évolution de la criminalité moderne. L’entrée en vigueur de la loi, fixée par l’article 3, parachève l’édifice législatif sans heurter les règles de procédure prévues par le texte fondamental. Cette jurisprudence renforce la légitimité des parquets à compétence nationale dont le régime juridique s’éloigne progressivement du droit commun des tribunaux judiciaires de province.