Conseil constitutionnel, Décision n° 60-6 DC du 15 janvier 1960

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 15 janvier 1960, une décision relative à la promotion exceptionnelle des Français musulmans dans la magistrature. Cette loi organique visait à faciliter l’accès aux fonctions judiciaires pour les ressortissants originaires des départements algériens, des Oasis et de la Saoura. Saisi par le Premier ministre en vertu des articles 46 et 61 de la Constitution, le juge constitutionnel devait vérifier la régularité de ce texte. La procédure législative spécifique aux lois organiques fut scrupuleusement respectée durant l’élaboration de cette norme modifiant le statut de la magistrature. La question posée au Conseil portait sur la conformité de ces modalités de recrutement dérogatoires avec les principes fondamentaux de la Constitution de 1958. Le Conseil constitutionnel affirme que ce texte, pris selon les formes exigées, « n’est contraire à aucune des autres dispositions de la Constitution ».

I. La consécration de la régularité formelle de la loi organique

A. Le respect scrupuleux de la procédure de l’article 46

L’article 46 de la Constitution impose des conditions strictes pour l’adoption des lois organiques qui complètent le texte constitutionnel dans des domaines déterminés. Le Premier ministre a saisi la juridiction afin de garantir la validité du processus législatif avant la promulgation définitive de la loi. Le juge constate que le texte respecte les délais et les modalités de vote prévus pour cette catégorie particulière de normes juridiques. Cette vérification formelle constitue une garantie essentielle pour la stabilité des institutions et le respect de la hiérarchie des normes.

B. L’exercice du contrôle obligatoire sur le statut de la magistrature

L’article 64 de la Constitution prévoit que le statut des magistrats doit être fixé par une loi organique pour garantir leur indépendance. La décision souligne que le législateur a agi « dans le respect de la procédure prévue » pour modifier l’ordonnance relative au statut de la magistrature. Le Conseil exerce sa mission de gardien de la séparation des pouvoirs en s’assurant que le pouvoir exécutif n’empiète pas sur l’autorité judiciaire. Le texte soumis modifie ainsi l’ordonnance du 22 décembre 1958 sans altérer les principes fondamentaux qui régissent la carrière des magistrats.

II. L’affirmation de la constitutionnalité d’un recrutement dérogatoire

A. Une mesure exceptionnelle adaptée au contexte territorial spécifique

La loi prévoit une promotion exceptionnelle pour les Français musulmans originaires des départements algériens afin de favoriser leur intégration au sein de l’appareil d’État. Cette mesure semble déroger au principe d’égalité d’accès aux emplois publics mais se justifie par la nécessité de répondre à des circonstances historiques. Le Conseil valide cette approche car elle s’inscrit dans un « esprit » conforme aux exigences de l’organisation judiciaire de l’époque. La reconnaissance de cette spécificité territoriale permet d’ajuster les règles de recrutement sans pour autant rompre le pacte constitutionnel républicain.

B. La préservation de l’unité du corps judiciaire malgré la diversité des voies d’accès

En déclarant la loi conforme, le Conseil constitutionnel renforce l’autorité du statut organique de la magistrature tout en acceptant sa nécessaire évolution. Cette décision permet de stabiliser les règles d’accès à la profession judiciaire dans un contexte de mutation profonde des structures administratives françaises. La jurisprudence confirme que les modalités de recrutement peuvent varier pour répondre à des besoins d’intérêt général identifiés par le gouvernement. Cette validation marque le début d’un contrôle rigoureux de la production législative organique sous la Cinquième République.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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