Conseil constitutionnel, Décision n° 62-20 DC du 6 novembre 1962

La haute juridiction a rendu, par sa décision n° 62-20 DC du 6 novembre 1962, un arbitrage fondamental concernant le contrôle de constitutionnalité des lois référendaires. Suite au scrutin du 28 octobre 1962 portant sur l’élection de l’autorité exécutive au suffrage universel direct, un texte législatif fut adopté par le corps électoral. L’autorité de saisine sollicita alors l’instance régulatrice sur le fondement de l’article 61 de la Constitution pour apprécier la validité de cette norme juridique nouvelle. La question posée résidait dans l’étendue des compétences de la juridiction face aux textes législatifs adoptés par l’expression directe de la souveraineté nationale. La haute instance a affirmé son incompétence en jugeant que les lois visées par l’article 61 sont uniquement les lois votées par l’organe législatif.

I. Une compétence juridictionnelle strictement cantonnée aux actes parlementaires

A. L’interprétation restrictive du champ d’application de l’article 61

Le juge souligne d’emblée que sa mission demeure « strictement délimitée par la Constitution ainsi que par les dispositions de la loi organique ». Cette approche textuelle permet d’exclure toute extension prétorienne de ses prérogatives initiales au-delà des hypothèses formellement prévues par les textes fondamentaux. La décision précise que l’article 61 concerne les lois ordinaires et organiques sans toutefois détailler l’ensemble des catégories de textes législatifs existantes.

B. L’exclusion des normes issues de l’expression directe de la souveraineté

La juridiction considère que les lois référendaires « constituent l’expression directe de la souveraineté nationale » et échappent au contrôle régulateur classique des pouvoirs publics. Elle mobilise l’esprit du texte fondamental pour restreindre son examen aux seules normes votées par les représentants élus au sein des assemblées délibérantes. Cette distinction fondamentale repose sur la nature de l’auteur de l’acte législatif, plaçant le corps électoral dans une position d’infaillibilité juridique.

II. Les conséquences juridiques d’un refus de contrôle des lois référendaires

A. La consécration de la nation souveraine au-dessus de tout contrôle juridictionnel

En se déclarant incompétente, l’instance reconnaît implicitement que le pouvoir souverain de la nation ne peut subir de limitations par un organe technique de contrôle. L’article 11 ne prévoit effectivement « aucune formalité entre l’adoption d’un projet de loi par le peuple et sa promulgation par le Président ». Cette absence de verrou procédural confirme la volonté du constituant de laisser au suffrage universel une liberté totale d’action législative ou constitutionnelle.

B. La pérennité d’une lacune dans la protection de l’ordre constitutionnel

Cette solution engendre néanmoins un risque de méconnaissance des règles fondamentales par le biais d’une procédure référendaire éventuellement détournée de son objet initial. Le juge refuse de s’ériger en censeur de la volonté populaire, préférant maintenir une lecture littérale des dispositions figurant dans sa loi organique. La portée de cette décision demeure considérable puisqu’elle sanctuarise les lois adoptées par référendum contre toute velléité de censure par la juridiction compétente.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture