Le Conseil constitutionnel a rendu, le 14 juin 1976, une décision fondamentale concernant la conformité à la Constitution de la loi organique modifiant l’élection présidentielle. Le Premier Ministre a saisi la juridiction le 3 juin 1976 afin d’examiner les nouvelles restrictions apportées aux modalités de présentation des candidats nationaux. La loi prévoit d’augmenter le nombre de parrainages nécessaires et de limiter la qualité des signataires aux seuls titulaires d’un mandat électif en vigueur. Ces modifications législatives visent à rationaliser l’accès au scrutin suprême en évitant la multiplication de candidatures dépourvues d’une réelle représentativité sur le territoire français. La question de droit posée aux juges portait sur la validité constitutionnelle du durcissement des conditions de candidature au regard du principe d’égalité des citoyens. La haute juridiction déclare le texte conforme en estimant que les nouvelles règles ne contreviennent à aucune disposition constitutionnelle ou principe fondamental de la République.
I. Le durcissement des conditions numériques et territoriales de présentation
A. L’exigence d’un soutien politique renforcé par l’augmentation des signataires L’augmentation du nombre de signataires constitue le pivot de cette réforme organique destinée à limiter l’émiettement des suffrages lors du premier tour de scrutin. Le Conseil constitutionnel souligne que la loi a pour objet d’« augmenter le nombre des signataires de présentations requis pour la validité des candidatures à l’élection présidentielle ». Cette mesure impose aux prétendants une démarche de persuasion plus intense auprès des instances de représentation politique locales et nationales pour obtenir leur investiture. Le législateur souhaite garantir que chaque candidat dispose d’un socle de légitimité suffisant pour justifier sa participation à une consultation de nature nationale. La validation de ce seuil numérique plus élevé confirme la volonté des pouvoirs publics de stabiliser la compétition politique autour des formations les plus structurées.
B. L’affirmation d’une représentativité géographique étendue des parrainages Le texte impose également une dispersion géographique des soutiens pour s’assurer que les candidatures reflètent une adhésion dépassant le cadre purement local ou régional. La loi prévoit d’« élever le nombre des départements ou territoires d’outre-mer dont ces signataires doivent être les élus » au sein de la République. Le dispositif de contrôle précise qu’au maximum « un dixième d’entre eux puissent être les élus d’un même département ou territoire d’outre-mer » pour chaque candidat. Cette règle de répartition territoriale empêche la capture du processus de présentation par des intérêts géographiques trop restreints ou des réseaux d’influence purement locaux. Le Conseil constitutionnel valide ainsi un mécanisme qui renforce le caractère national de l’élection présidentielle tel que défini par le texte constitutionnel de 1958.
II. L’encadrement institutionnel de la sélection et de la publicité
A. La restriction du droit de présentation aux titulaires d’un mandat électif La réforme organique opère une sélection qualitative des parrains en réservant l’exercice de ce droit de présentation aux citoyens investis d’une onction électorale. La décision relève la volonté du législateur de « limiter l’exercice de ce droit aux titulaires d’un mandat électif » pour filtrer les candidatures présidentielles. Cette disposition exclut désormais les simples citoyens du processus formel de parrainage au profit des maires, parlementaires et conseillers élus au suffrage universel direct. Le juge constitutionnel considère que ce choix relève de la compétence du législateur organique et ne porte pas atteinte à la liberté fondamentale de candidature. L’institutionnalisation du parrainage par les élus locaux devient ainsi le socle de la régulation démocratique du scrutin le plus important de la vie politique.
B. La constitutionnalité de la publicité partielle des soutiens officiels Le Conseil constitutionnel examine enfin les modalités de transparence en validant la divulgation de l’identité d’une partie des citoyens ayant apporté leur précieux parrainage. La loi prescrit que « soient rendus publics, dans la limite du nombre exigé pour la validité de la candidature, le nom et la qualité des citoyens ». Cette publicité limitée permet de concilier le besoin d’information des électeurs avec la protection du secret des intentions politiques des élus signataires de surplus. La juridiction affirme que ce texte a été « pris dans la forme exigée par l’article 6, deuxième alinéa, de la Constitution » et respecte la procédure. Cette validation globale de la loi organique de 1976 consacre le rôle de filtre des élus dans le processus de désignation du chef de l’État.