Conseil constitutionnel, Décision n° 77-87 DC du 23 novembre 1977

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 23 novembre 1977, une décision fondamentale concernant la loi complémentaire relative à la liberté de l’enseignement. Plusieurs sénateurs ont saisi la juridiction afin de contester la conformité de ce texte à la Constitution de la République française. Le litige porte sur l’obligation imposée aux enseignants des établissements privés sous contrat d’association de respecter le caractère propre de ces structures. Les auteurs de la saisine critiquaient également les modalités du financement public accordé à ces établissements privés par les services de l’État.

La question juridique réside dans la compatibilité entre la protection du caractère propre confessionnel et le respect de la liberté de conscience des maîtres. Le Conseil constitutionnel juge que la loi est conforme aux normes supérieures en affirmant le rang constitutionnel de la liberté d’enseignement. La décision précise que l’obligation de réserve des enseignants ne saurait toutefois autoriser une atteinte disproportionnée à leur liberté de conscience personnelle. L’analyse de cette décision suppose d’étudier la constitutionnalisation de la liberté de l’enseignement avant d’examiner la conciliation opérée avec la liberté de conscience.

I. La reconnaissance constitutionnelle de la liberté de l’enseignement Le juge constitutionnel identifie la liberté de l’enseignement comme un principe fondamental dont la valeur juridique est désormais égale aux autres droits protégés.

A. L’affirmation d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République Le Conseil constitutionnel énonce que le principe de la liberté de l’enseignement « constitue l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Cette reconnaissance s’appuie sur le Préambule de la Constitution de 1946 et l’article 91 de la loi de finances du 31 mars 1931. Le juge consacre ainsi une liberté publique essentielle qui limite désormais le pouvoir d’intervention du législateur dans le domaine éducatif. La protection constitutionnelle de cette liberté justifie l’existence d’un système éducatif dualiste composé de structures publiques et d’établissements privés.

B. La légitimité du concours financier de l’État Le juge précise que le devoir de l’État d’organiser un enseignement public gratuit et laïque « ne saurait exclure l’existence de l’enseignement privé ». L’octroi d’une aide publique à ces établissements est jugé conforme dès lors que la loi en définit précisément les conditions d’attribution. Cette solution valide le système contractuel mis en place par le législateur pour assurer la pérennité financière des écoles privées associées au service public. Le financement par l’État ne porte donc pas atteinte au principe de laïcité tel qu’il est entendu par le bloc de constitutionnalité.

II. L’équilibre entre les spécificités de l’établissement et les droits individuels La décision organise une cohabitation entre la nécessaire préservation de l’identité des établissements privés et la protection constitutionnelle des libertés individuelles des enseignants.

A. L’obligation de respecter le caractère propre de l’établissement La sauvegarde du caractère propre constitue selon le juge constitutionnel une « mise en oeuvre du principe de la liberté de l’enseignement » garantie constitutionnellement. Les maîtres sont donc tenus de respecter cette spécificité au sein des structures liées à l’État par un contrat d’association obligatoire. Cette exigence impose une neutralité comportementale qui permet à l’établissement de maintenir son projet pédagogique ou religieux face à son public scolaire. Le Conseil constitutionnel valide ainsi une limitation fonctionnelle de l’autonomie des personnels enseignants au nom de la liberté institutionnelle de l’école.

B. La protection de la liberté de conscience des enseignants Le juge tempère cette obligation en soulignant que le respect du caractère propre « ne saurait être interprété comme permettant une atteinte à leur liberté de conscience ». Cette liberté individuelle est également érigée au rang de principe fondamental reconnu par les lois de la République par le juge constitutionnel. L’enseignant bénéficie ainsi d’une protection juridique contre tout licenciement qui serait fondé exclusivement sur ses opinions personnelles ou ses croyances. La conciliation opérée par le Conseil constitutionnel impose un devoir de réserve sans exiger une adhésion idéologique totale de la part du personnel.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture