Conseil constitutionnel, Décision n° 87-237 DC du 30 décembre 1987

Le Conseil constitutionnel, par sa décision numéro quatre-vingt-sept-deux-cent-trente-sept DC du trente décembre mil neuf cent quatre-vingt-sept, se prononce sur la conformité de la loi de finances. Plusieurs membres du Parlement ont contesté la validité de dispositions relatives aux compensations fiscales communales, à la fiscalité des entreprises et aux sanctions pénales. Les requérants soutenaient principalement que le législateur avait méconnu sa propre compétence et porté atteinte au principe fondamental de proportionnalité des peines encourues. La question de droit posée au juge réside dans la définition des limites de l’habilitation législative et dans l’encadrement constitutionnel du pouvoir de sanction. La juridiction écarte les griefs relatifs à la compétence mais censure la disposition réprimant la divulgation des revenus car elle présente un caractère manifestement excessif. L’analyse portera d’abord sur le contrôle de la compétence législative avant d’étudier l’exigence de proportionnalité répressive et la modulation du principe d’égalité.

I. Le contrôle de l’étendue de la compétence législative et de la régularité des vecteurs financiers

A. La validité des délégations au pouvoir règlementaire et administratif

L’article seize de la loi prévoit que l’État compense les pertes de recettes fiscales communales résultant de certaines exonérations foncières accordées aux propriétaires forestiers. Les sages précisent qu’aucun principe n’interdit au législateur de « poser le principe d’un seuil en deçà duquel il n’y a pas lieu à compensation ». Le renvoi au décret pour fixer ce montant ne méconnaît pas l’article trente-quatre de la Constitution dès lors que les principes fondamentaux sont définis. En matière de fiscalité des groupes, l’exigence d’un agrément ministériel pour le report des déficits est également validée comme une simple mesure d’application individuelle. Cette prérogative permet seulement à l’autorité administrative de s’assurer que « l’opération de restructuration, de regroupement ou d’apport en cause satisfait aux conditions fixées par la loi ».

B. La conformité organique des dispositions relatives à l’indemnisation des rapatriés

L’article cent institue une indemnité forfaitaire pour les personnes ayant résidé habituellement dans un territoire étranger avant son accession à l’indépendance de ce pays. La juridiction écarte le grief tiré de la méconnaissance de l’ordonnance organique relative aux lois de finances en soulignant l’incidence financière directe de la mesure. Puisque les crédits nécessaires sont ouverts par le texte examiné, ces dispositions « relèvent d’un texte ayant le caractère de loi de finances » au sens organique. Le juge valide ainsi l’insertion de mesures d’indemnisation dans le vecteur financier annuel dès lors qu’elles pèsent directement sur le budget étatique. L’autonomie du législateur dans la définition des modalités de la solidarité nationale se trouve ainsi confirmée par une interprétation souple des règles de recevabilité.

II. L’exigence de proportionnalité répressive et la modulation du principe d’égalité

A. La censure d’une amende fiscale automatique aux effets manifestement excessifs

L’article quatre-vingt-douze prévoyait une amende égale au montant des revenus divulgués pour toute publication non autorisée d’informations fiscales concernant une personne nommément désignée. Le Conseil constitutionnel rappelle que le principe de nécessité des peines, énoncé à l’article huit de la Déclaration de 1789, s’applique à toute sanction punitive. En instaurant une sanction « égale au montant des revenus divulgués », le législateur a édicté une règle rigide susceptible de revêtir un caractère « manifestement disproportionné ». Cette automaticité empêche toute modulation en fonction de la gravité de la faute commise ou de la situation financière du contrevenant sanctionné. L’absence de marge d’appréciation pour l’autorité chargée de prononcer la punition conduit inévitablement à l’inconstitutionnalité de la disposition répressive ainsi critiquée.

B. La conciliation entre la diversité des situations et l’égalité devant les charges publiques

Le principe d’égalité devant la loi s’applique tant pour l’octroi de prestations que pour l’imposition de sujétions diverses aux citoyens de la République. Concernant l’indemnisation des rapatriés, le législateur peut définir des modalités appropriées à chaque cas sans être « astreint à appliquer des règles identiques ». Les différences de traitement constatées ne sont jugées contraires à la Constitution que si elles entraînent une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges. Dans cette espèce, le forfait de quarante-cinq mille francs permet un règlement rapide de situations complexes sans léser de manière excessive les bénéficiaires concernés. La décision souligne que la solidarité nationale autorise des régimes distincts dès lors que l’ampleur des écarts de traitement demeure raisonnablement justifiée.

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Hassan KOHEN
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