Conseil constitutionnel, Décision n° 94-352 DC du 18 janvier 1995

Le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 94-352 DC du 18 janvier 1995, s’est prononcé sur la conformité de la loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité. Des membres du Parlement ont saisi la juridiction pour contester la validité de mesures relatives à la vidéosurveillance, aux fouilles de véhicules et aux manifestations. Les requérants soutenaient que le texte portait atteinte à la liberté individuelle, au droit au respect de la vie privée et au droit d’expression collective. Il s’agissait de déterminer si le législateur avait instauré des garanties suffisantes pour concilier la sécurité publique avec l’exercice des libertés fondamentales protégées. La juridiction valide partiellement la loi mais censure l’autorisation tacite de vidéosurveillance ainsi que les fouilles de véhicules dépourvues de contrôle par l’autorité judiciaire. Cette analyse portera d’abord sur l’encadrement des systèmes de vidéosurveillance avant d’étudier les mesures de police liées au maintien de l’ordre public.

I. L’encadrement des systèmes de vidéosurveillance par les garanties de liberté

A. Une conciliation nécessaire entre la sauvegarde de l’ordre public et la vie privée

Le législateur peut autoriser la vidéosurveillance pour prévenir des atteintes à l’ordre public dans des lieux particulièrement exposés aux risques d’agression ou de vol. Cependant, le juge précise que « la méconnaissance du droit au respect de la vie privée peut être de nature à porter atteinte à la liberté individuelle ». La juridiction constitutionnelle exige donc des garanties strictes comme l’information claire du public et l’interdiction de visualiser l’intérieur ou l’entrée des immeubles d’habitation. Le respect de la vie privée constitue ici le pivot de l’équilibre nécessaire entre l’efficacité de la police administrative et la protection des droits individuels.

B. L’éviction de l’autorisation tacite au profit d’un contrôle administratif rigoureux

Le dispositif initial prévoyait qu’une autorisation de vidéosurveillance était réputée acquise après un silence de l’administration prolongé pendant un délai de quatre mois. Le Conseil constitutionnel censure cette disposition car elle prive de garanties légales les principes constitutionnels en subordonnant la liberté individuelle à la diligence administrative. Cette décision de principe réaffirme qu’une atteinte potentielle à la vie privée nécessite impérativement un acte positif et motivé de l’autorité publique compétente. Une telle rigueur juridique assure que le silence de l’autorité préfectorale ne puisse jamais valoir consentement pour la mise en œuvre de moyens de surveillance.

II. La limitation des prérogatives de police au nom de l’autorité judiciaire

A. L’exigence d’un contrôle juridictionnel sur les opérations de fouille de véhicules

L’article 16 de la loi déférée permettait au représentant de l’État d’interdire le transport d’objets pouvant servir de projectiles et d’ordonner la fouille des véhicules. Le Conseil juge que les opérations de fouille mettent en cause la liberté individuelle et doivent impérativement être préalablement autorisées par l’autorité judiciaire. Il rappelle que le magistrat est le seul gardien de cette liberté fondamentale en vertu de l’article 66 de la Constitution de la République. Le législateur ne saurait donc confier au pouvoir administratif le soin de diriger des mesures de police judiciaire touchant à l’intégrité de la sphère privée.

B. La validation des sanctions pénales respectueuses du principe de proportionnalité

La création d’une peine complémentaire d’interdiction de manifester est jugée conforme aux exigences de nécessité et de proportionnalité des peines par la juridiction constitutionnelle. Le juge pénal décide souverainement de l’application de cette mesure en fixant précisément les lieux interdits pour une durée maximale de trois ans. Cette disposition concilie efficacement la garantie du droit d’expression collective avec l’impératif de sécurité des personnes et des biens lors des rassemblements. La proportionnalité de la sanction est ici assurée par le rôle central du juge qui adapte l’interdiction à la gravité des infractions commises.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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