La Cour administrative d’appel de Bordeaux, par un arrêt rendu le 11 juillet 2025, précise les conditions de délivrance du titre de séjour au parent d’enfant français. Un ressortissant étranger contestait le refus de renouvellement de sa carte de séjour temporaire malgré la reconnaissance de son enfant né sur le territoire en 2020. L’administration avait opposé l’absence de contribution effective à l’entretien et à l’éducation du mineur pour justifier le rejet de la demande de titre de séjour. Le tribunal administratif de Pau avait rejeté le recours de l’intéressé le 7 octobre 2024, confirmant ainsi la légalité de l’obligation de quitter le territoire français. La juridiction d’appel devait déterminer si une dispense de pension alimentaire pour impécuniosité suffit à établir la contribution requise par le code de l’entrée et du séjour.
I. La rigueur probatoire imposée au parent étranger quant à l’entretien de l’enfant
A. L’insuffisance des preuves matérielles ponctuelles et du constat d’impécuniosité
La Cour administrative d’appel de Bordeaux juge que des preuves d’achats vestimentaires ou de rares rencontres médiatisées ne permettent pas d’établir une contribution stable et effective. Le requérant ne peut se prévaloir de sa seule présence épisodique pour satisfaire aux exigences de l’article L. 423-7 du code de l’entrée et du séjour. Les magistrats soulignent que « la production d’un relevé de comptes indiquant un achat de vêtements » demeure insuffisante pour démontrer un engagement réel auprès de l’enfant français.
Le jugement du juge aux affaires familiales constatant l’absence de ressources financières ne dispense pas non plus le parent étranger de prouver son implication dans l’éducation. Les juges administratifs affirment que l’intéressé « demeure tenu d’établir […] qu’il contribue, effectivement, à la hauteur de ses ressources, à l’entretien et à l’éducation de son enfant ». Cette exigence impose une participation concrète et régulière qui dépasse le simple cadre d’une obligation financière fixée ou non par une juridiction civile compétente.
B. L’autonomie de l’appréciation administrative face aux décisions du juge judiciaire
L’autorité préfectorale conserve un pouvoir d’appréciation autonome sur la réalité de la vie familiale indépendamment des décisions rendues par le juge aux affaires familiales. Le tribunal administratif de Pau avait déjà validé ce raisonnement en considérant que le constat d’une absence de contribution sur quatre années n’était pas irrégulier. La décision administrative n’ajoute pas de condition supplémentaire à la loi mais se borne à vérifier le respect de la durée minimale de deux ans d’implication.
La solution retenue confirme que le droit au séjour reste subordonné à l’effectivité d’un lien parental qui doit être documenté par des éléments probants et concordants. L’éloignement géographique entre le domicile du père et celui de l’enfant ne constitue pas une circonstance atténuante suffisante pour justifier une carence dans l’entretien. Le juge administratif exerce ainsi un contrôle strict sur la réalité des attaches familiales pour éviter que la reconnaissance de paternité ne devienne un simple instrument procédural.
II. Le champ d’application restreint des dispenses de preuve liées à la filiation
A. L’inopérance de l’article L. 423-8 pour justifier l’entretien par l’étranger demandeur
La Cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle que les dispositions protectrices de l’article L. 423-8 ne bénéficient qu’à la preuve de la contribution de l’autre parent français. Le demandeur étranger ne peut invoquer la production d’une décision de justice pour s’exonérer de l’obligation de prouver sa propre implication matérielle ou morale constante. La juridiction précise qu’il appartient au demandeur de produire la décision « quelles que soient les mentions de celle-ci, peu important notamment qu’elles constatent l’impécuniosité » du parent français.
Cette interprétation restrictive de la loi assure une application cohérente des principes dégagés par l’avis du Conseil d’État en date du 27 octobre 2022. Le moyen tiré de la méconnaissance de cet article est jugé inopérant puisque ces dispositions ne dispensent jamais l’étranger de justifier de sa contribution personnelle. Le droit au séjour demeure un avantage conditionné par l’accomplissement des devoirs parentaux effectifs tels que définis par le code civil et le code administratif.
B. La proportionnalité de la mesure d’éloignement face à l’absence d’insertion caractérisée
La mesure d’obligation de quitter le territoire français est validée car elle ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale. Le requérant est séparé de la mère de son enfant et ne justifie d’aucune insertion professionnelle ou personnelle stable sur le territoire national français. La Cour note également qu’il « n’allègue pas être dépourvu de liens personnels et familiaux » dans son pays d’origine où résident encore plusieurs membres de sa famille.
L’absence de démonstration d’une éducation active de l’enfant français rend la décision préfectorale conforme aux stipulations de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. La juridiction d’appel rejette l’ensemble des conclusions du demandeur en confirmant la légalité du refus de séjour assorti d’une mesure d’éloignement vers le pays de destination. Cette jurisprudence souligne la fermeté des tribunaux administratifs face aux situations de carence parentale prolongée malgré l’existence d’un lien de filiation légalement établi.