La cour administrative d’appel de Bordeaux a rendu, le 23 septembre 2025, une décision relative au séjour des conjoints de ressortissants français. Un ressortissant étranger sollicitait le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de Français après plusieurs années de résidence régulière. L’autorité préfectorale a opposé un refus au motif que la communauté de vie avec l’épouse avait cessé suite à une décision de justice. Le tribunal administratif de Limoges a rejeté la demande d’annulation de cet arrêté par un jugement rendu le 12 novembre 2024. Le requérant soutient que la rupture de la vie commune ne lui est pas imputable car elle résulte d’une interdiction judiciaire de contact. L’administration estime au contraire que la seule constatation matérielle de la séparation permet de justifier légalement le refus de renouvellement du titre. La juridiction doit déterminer si l’absence de vie commune imposée par le juge judiciaire fait obstacle à l’application des conditions de séjour. La cour confirme que la séparation constitue une situation de fait opposable à l’administré indépendamment de son origine ou de son caractère contraint. L’examen de la légalité du refus de séjour précède ainsi l’analyse de la validité d’une mesure d’éloignement prise sous contrôle judiciaire.
**I. L’appréciation factuelle de la condition de communauté de vie**
**A. L’exigence de résidence partagée comme critère de légalité du séjour**
L’article L. 423-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile subordonne le renouvellement du titre au maintien du lien conjugal. Cette disposition impose une communauté de vie effective entre l’étranger et son conjoint français pour justifier la prolongation du droit au séjour. Les juges bordelais rappellent que cette exigence constitue une condition de fond dont le respect est impératif pour l’obtention du document sollicité. La preuve d’une rupture de cette vie commune autorise l’autorité administrative à refuser le séjour malgré les justifications avancées par le demandeur.
**B. L’indifférence des causes juridiques de la cessation de cohabitation**
Le requérant invoquait le caractère involontaire de la décohabitation résultant d’une ordonnance du juge judiciaire lui interdisant tout contact avec son épouse. La cour écarte ce moyen en précisant que « la séparation des époux constituait une situation de fait dont le préfet pouvait tenir compte ». L’administration ne commet aucune erreur de droit en constatant l’absence de vie commune, même si celle-ci découle d’une mesure de contrôle judiciaire. Cette solution consacre une approche strictement matérielle de la condition de résidence partagée sans égard pour les motifs ayant conduit à la rupture.
L’appréciation souveraine des faits par l’administration fonde le rejet de la demande de titre et ouvre la voie à l’examen de la mesure d’éloignement.
**II. La validité de la mesure d’éloignement face aux contraintes judiciaires**
**A. La substitution opérante des fondements légaux de l’obligation d’éloignement**
Le préfet avait fondé l’obligation de quitter le territoire français sur la menace à l’ordre public et sur le refus de séjour. Le tribunal a procédé à une neutralisation du motif tiré de la menace pour ne maintenir que celui fondé sur l’absence de titre. La cour valide cette méthode en soulignant que l’intéressé ne critique pas utilement le jugement en se bornant à contester la réalité du risque. Le juge administratif confirme ainsi que le bien-fondé du refus de titre suffit à justifier légalement l’édiction d’une mesure d’éloignement.
**B. La distinction impérative entre l’édiction et l’exécution de l’acte**
Le contrôle judiciaire interdisant la sortie du territoire français est soulevé comme un obstacle à la légalité de l’obligation de quitter le pays. Les juges affirment que cette mesure « ne fait pas obstacle à l’édiction » de l’acte mais suspend simplement la mise en œuvre de la contrainte. L’autorité de police doit seulement « s’abstenir d’exécuter cette mesure jusqu’à la levée du contrôle par le juge judiciaire » pour respecter la hiérarchie. Cette distinction fondamentale assure la validité de l’acte administratif tout en préservant l’efficacité des prérogatives de la juridiction judiciaire compétente.