Cour d’appel administrative de Bordeaux, le 24 septembre 2025, n°25BX01217

La cour administrative d’appel de Bordeaux a rendu, le 24 septembre 2025, une ordonnance relative à la désignation d’un expert dans le cadre d’un marché public.

Un prestataire de services a sollicité une mesure d’instruction pour constater l’état des équipements d’un centre pénitentiaire lors de sa prise de fonctions contractuelles.

Le juge des référés du tribunal administratif de la Guyane avait initialement fait droit à cette demande afin d’établir les éventuelles responsabilités découlant du contrat.

Le prestataire sortant conteste cette décision en invoquant l’incompétence de la juridiction administrative pour trancher un différend opposant exclusivement deux entités de droit privé.

La question posée porte sur la compétence du juge administratif et sur l’utilité d’une expertise technique malgré le temps écoulé depuis le début des prestations.

La cour rejette l’appel en considérant que le litige se rattache à l’exécution d’un contrat administratif et présente une utilité certaine pour les parties intéressées.

L’analyse de cette solution impose d’étudier d’abord la compétence retenue du juge administratif avant d’examiner les critères d’utilité de la mesure d’expertise ordonnée.

I. La compétence confirmée du juge administratif en matière contractuelle

A. Le rattachement du litige à l’exécution d’un contrat administratif

La juridiction rappelle que le juge des référés peut ordonner une mesure d’instruction dès lors que le litige relève même partiellement de sa compétence juridictionnelle.

En l’occurrence, la responsabilité du nouveau titulaire est « susceptible d’être recherchée par l’administration » dans le cadre de l’exécution du contrat souscrit en octobre 2023.

Le différend porte donc sur un marché public, ce qui justifie l’intervention du juge administratif nonobstant la nature privée des sociétés commerciales alors en présence.

B. L’absence de méconnaissance du principe de séparation des autorités

Le juge des référés a compétence « sans que soit en cause le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires » pour ordonner la mesure d’instruction.

Il suffit que le litige principal ne relève pas manifestement et exclusivement d’un autre ordre de juridiction pour que la demande d’expertise soit jugée recevable.

Cette solution permet au juge du provisoire d’intervenir précocement pour préserver les preuves nécessaires à la résolution d’un futur litige porté devant le juge.

II. L’appréciation souveraine de l’utilité de la mesure d’expertise

A. Le critère de l’intérêt de la mesure pour le litige futur

L’article R. 532-1 prévoit que le juge peut prescrire toute « mesure utile d’expertise » au regard de l’intérêt qu’elle présente pour un litige éventuel.

Le désaccord entre les parties porte ici sur l’état d’usage des équipements de sécurité dont la maintenance incombe désormais au nouveau titulaire du marché public.

La détermination des causes des dysfonctionnements constitue une mesure indispensable pour éclairer le tribunal sur la réalité et l’ampleur des désordres techniques ainsi allégués.

B. Le rejet des arguments relatifs à l’impossibilité matérielle des constats

Le prestataire sortant soutenait que le climat humide et le temps écoulé rendaient impossible toute constatation fiable par l’expert désigné par le tribunal administratif.

Le juge écarte cet argument en soulignant que ces affirmations ne sont étayées par aucun élément probant permettant d’infirmer la pertinence actuelle de la mission.

L’ordonnance confirme ainsi que l’expertise doit porter sur la nature des désordres affectant les équipements dits critiques à la date du démarrage effectif des prestations.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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