Par un arrêt rendu le 4 juin 2025, la Cour administrative d’appel de Douai s’est prononcée sur la légalité d’une décision de transfert vers les autorités tchèques. Une ressortissante étrangère contestait son renvoi en invoquant des vices de procédure ainsi qu’une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée. Entrée sur le territoire national en juin 2023, l’intéressée avait sollicité l’asile avant de faire l’objet d’une mesure de transfert par le préfet compétent. Le tribunal administratif d’Amiens avait rejeté sa demande d’annulation en première instance par un jugement du 9 janvier 2024. La requérante soutenait notamment que la demande de prise en charge comportait des mentions erronées concernant son fondement juridique et l’absence de signature. Elle invoquait également sa relation avec un réfugié résidant en France, son état de grossesse et la reconnaissance anticipée de l’enfant à naître. La juridiction d’appel devait déterminer si des imprécisions formelles ou une situation familiale récente faisaient obstacle à l’exécution d’une mesure de transfert européen. La Cour administrative d’appel écarte l’ensemble des moyens en confirmant la validité de la procédure suivie et la proportionnalité de l’acte administratif.
I. La régularité de la procédure de détermination de l’État responsable
A. L’absence d’incidence des erreurs matérielles sur la validité du transfert
L’examen des griefs formels révèle une approche pragmatique du juge administratif concernant l’édition des formulaires de demande de prise en charge. La requérante soulignait l’invocation erronée de l’article 6 du règlement n° 604/2013 relatif aux garanties en faveur des mineurs. La Cour estime que cette circonstance est « sans incidence sur la régularité de la procédure » dès lors que les autres mentions sont explicites. Les magistrats privilégient la réalité du fondement juridique réellement appliqué, à savoir l’existence d’un visa délivré par un autre État membre. L’administration a suffisamment identifié la situation de l’intéressée malgré cette maladresse matérielle initiale dans la première rubrique du formulaire.
B. La prévalence de la transmission officielle sur le formalisme de l’acte
La question de l’absence de signature manuscrite sur le formulaire est résolue par la preuve d’une communication électronique entre les administrations nationales. La juridiction relève que l’autorité compétente a transmis cette demande par voie dématérialisée aux autorités tchèques qui ont donné leur accord. Cette modalité de transmission garantit l’authenticité de la requête et régularise l’absence de signature physique sur le document de liaison. Par ailleurs, la mention des articles relatifs à la détermination de la responsabilité plutôt que ceux traitant de l’instruction ne constitue pas une erreur. Les juges considèrent que ces précisions ne révèlent aucune méconnaissance des règles de droit par le préfet lors de l’édiction.
II. Le respect du droit à une vie privée et familiale normale
A. La caractérisation insuffisante de l’intensité des liens sur le territoire
L’appréciation de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme repose sur la stabilité et l’ancienneté des attaches invoquées. La requérante faisait valoir une relation sentimentale stable et une grossesse de cinq mois au moment de la décision contestée. Toutefois, les juges notent que l’intéressée ne justifie que d’une « faible durée de résidence sur le territoire français » à cette date. La vie commune était limitée à quelques mois et le mariage est intervenu postérieurement à l’édiction de l’arrêté préfectoral de transfert. Ces éléments temporels ne permettent pas de caractériser une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la mesure a été prise.
B. La conciliation entre droits fondamentaux et objectifs du régime d’asile
La décision souligne la possibilité de maintenir les liens familiaux malgré l’exécution du transfert vers un autre État membre de l’Union européenne. Le conjoint de l’intéressée, titulaire d’une carte de résident, bénéficie d’une liberté de circulation lui permettant de rejoindre temporairement son épouse. La mesure de transfert est jugée nécessaire pour « assurer le respect des règles organisant un régime d’asile européen commun ». L’intérêt général lié à l’application du règlement Dublin prime ici sur une situation privée dont la précocité limite la protection juridique. La Cour administrative d’appel de Douai confirme ainsi le rejet de la requête et la validité du jugement rendu en première instance.