La Cour administrative d’appel de Douai a rendu un arrêt le 4 juin 2025 relatif à l’indemnisation des congés non pris par un praticien hospitalier. Cette décision traite de l’articulation entre le code du travail et le statut des personnels médicaux recrutés sous contrat à durée déterminée. Un praticien avait été recruté en 2016 par un centre hospitalier avant que son engagement ne prenne fin au mois d’avril 2020. Le médecin sollicitait le versement d’indemnités pour des congés annuels qu’il n’avait pu poser avant la cessation définitive de ses fonctions. Le tribunal administratif d’Amiens avait rejeté la requête comme tardive par une ordonnance rendue le 18 mars 2022. Après une cassation partielle prononcée par le Conseil d’État, l’affaire a été renvoyée devant la Cour administrative d’appel de Douai. Le litige porte sur la possibilité d’indemniser financièrement les congés non pris lorsque les nécessités du service ont empêché leur jouissance effective. La juridiction d’appel juge que les dispositions légales priment sur les clauses contractuelles limitant le droit au repos des agents publics.
I. La primauté du droit à congé sur les stipulations contractuelles
A. L’application des dispositions protectrices du code du travail
L’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Douai se fonde sur l’application conjointe du code de la santé publique et du droit social. Le juge relève que « le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée déterminée a droit à une indemnité compensatrice de congés payés ». Cette garantie s’applique aux praticiens contractuels dès lors que le régime des congés ne permet pas de les prendre pendant l’exécution du contrat. La protection légale assure ainsi l’effectivité du droit au repos pour les agents médicaux employés par les établissements publics de santé. Le bénéfice de cette indemnisation financière constitue un droit personnel attaché à la qualité de travailleur quel que soit l’organisme employeur. L’administration ne saurait écarter ces dispositions impératives au motif d’une spécificité liée au statut de la fonction publique hospitalière.
B. L’inefficacité des clauses contractuelles restrictives de droits
La juridiction écarte les clauses du contrat de recrutement stipulant qu’un congé non pris ne donnerait lieu à aucune indemnité compensatrice de fin d’activité. Le juge administratif considère que le praticien est « fondé à demander la condamnation » de son employeur malgré l’existence de ces réserves écrites. Cette solution renforce la hiérarchie des normes en faisant prévaloir la loi sur les accords particuliers conclus entre les parties au contrat. La signature de l’engagement par l’agent ne vaut pas renonciation à un droit fondamental garanti par le code du travail français. L’ordre public social s’oppose en conséquence à ce que l’employeur s’exonère de son obligation d’indemnisation par de simples mentions contractuelles ou réglementaires.
II. La caractérisation de l’empêchement imputable à l’administration
A. Les conséquences des nécessités du service durant la crise sanitaire
Le droit à l’indemnité compensatrice suppose que l’agent prouve avoir été mis dans l’impossibilité de solder ses congés du fait de son employeur. Le requérant invoquait des demandes de repos restées sans réponse en raison de la crise sanitaire et du manque chronique d’effectifs médicaux. La Cour constate qu’il a été « dans l’impossibilité de bénéficier de ceux-ci en raison du manque d’effectif » au sein de l’établissement hospitalier. L’organisation du service public a donc constitué un obstacle insurmontable à la prise effective des jours de repos acquis par l’agent. La responsabilité de l’administration est engagée dès lors que les contraintes professionnelles priment sur le droit individuel au congé annuel.
B. La délimitation stricte du préjudice financier indemnisable
Le juge administratif procède à une évaluation précise des sommes dues tout en rejetant les demandes dépourvues de fondement légal ou contractuel. L’indemnisation est accordée pour « les dix jours et demi de congés » non pris, sous réserve d’une liquidation ultérieure par le centre hospitalier. La Cour refuse cependant d’allouer une rémunération pour une journée de travail postérieure au terme du contrat fixé au 4 avril 2020. Le demandeur n’est pas fondé à solliciter un rappel de salaire dès lors que son engagement juridique a cessé de produire ses effets. La décision assure ainsi un équilibre entre la réparation intégrale des droits sociaux et le respect des dates de fin de contrat.