La Cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 10 juillet 2025, une décision relative au droit au séjour d’une ressortissante étrangère parent d’un enfant handicapé. Une ressortissante algérienne est entrée sur le territoire national en 2018 pour accompagner son fils souffrant de multiples pathologies lourdes découlant d’une paralysie cérébrale. L’autorité préfectorale a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l’a obligée à quitter la France malgré la gravité de cette situation. Le Tribunal administratif de Lyon a initialement rejeté sa demande d’annulation par un jugement rendu le 13 février 2024 dont l’intéressée a interjeté appel. La requérante soutient que l’état de santé précaire de son enfant nécessite une prise en charge spécialisée qui demeure absolument indisponible dans son pays d’origine. La question posée aux juges porte sur la proportionnalité de l’éloignement d’un parent dont l’assistance est vitale pour un enfant lourdement handicapé. La juridiction d’appel annule le refus de séjour en retenant une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante. L’examen des circonstances particulières de l’espèce permet de caractériser cette violation des stipulations conventionnelles avant d’analyser la force probante des certificats médicaux produits.
I. La reconnaissance d’une atteinte disproportionnée à la stabilité de la cellule familiale
A. L’importance déterminante du lien d’assistance envers l’enfant handicapé
La juridiction souligne que le fils de la requérante souffre d’un « cumul grave et compliqué de pathologies » nécessitant une surveillance constante et très spécialisée. L’assistance apportée par la mère est jugée indispensable au regard de l’état très avancé de handicap dont souffre ce jeune homme depuis sa naissance. Le juge administratif considère ici que les liens personnels et familiaux en France justifient pleinement la délivrance d’un certificat de résidence d’un an. Cette analyse repose sur les stipulations de l’article 6, 5° de l’accord franco-algérien protégeant le droit au respect de la vie privée. La Cour relève ainsi « l’assistance déterminante » que la mère apporte à son fils pour justifier le maintien de sa présence sur le sol français.
B. La sanction de l’erreur d’appréciation commise par l’autorité préfectorale
L’administration avait estimé que l’éloignement de la requérante ne portait pas une atteinte disproportionnée à ses droits fondamentaux malgré la vulnérabilité de sa situation. La Cour administrative d’appel de Lyon censure cette position en relevant que les buts poursuivis par la mesure d’éloignement ne sauraient primer l’intérêt supérieur. Les juges affirment explicitement que « le refus de séjour et la mesure d’éloignement décidés par la préfète » portent une atteinte excessive au droit de l’intéressée. Cette solution conduit nécessairement à l’annulation des décisions fixant le délai de départ volontaire ainsi que l’interdiction de retour sur le territoire français. La reconnaissance de cette erreur d’appréciation impose désormais une protection juridique renforcée des aidants familiaux dont la présence est médicalement requise.
II. La primauté de l’expertise médicale concrète sur les avis administratifs généraux
A. La remise en cause de l’appréciation portée sur l’offre de soins étrangère
L’autorité préfectorale s’était appuyée sur l’avis du collège de médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration pour justifier sa décision initiale. Cet organisme administratif estimait qu’un traitement approprié était disponible en Algérie pour soigner les pathologies dont souffre le fils de la requérante. La juridiction écarte pourtant cette évaluation générale en se fondant sur des documents médicaux « nombreux et circonstanciés » produits directement par la partie requérante. Ces certificats hospitaliers démontrent que le suivi technique d’une pompe à Baclofène intrathécale n’est pas réalisable dans le système de santé du pays d’origine. Le juge privilégie donc les constatations des praticiens traitants qui ont une connaissance directe et précise de l’évolution clinique du patient concerné.
B. La protection effective du droit à la santé au titre de la vie privée
La Cour administrative d’appel de Lyon utilise le droit au respect de la vie familiale pour garantir indirectement la continuité des soins d’un enfant majeur. Les magistrats insistent sur le fait que le défaut de prise en charge peut « entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité » pour la personne handicapée. L’arrêt ordonne ainsi à l’administration de délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai de trois mois à compter de sa notification officielle. Cette décision renforce l’obligation pour le préfet de procéder à un examen réel et complet de la situation médicale effective avant toute mesure d’éloignement. La solution retenue illustre la volonté du juge administratif de soumettre les avis techniques de l’administration à un contrôle de proportionnalité concret et rigoureux.