La Cour administrative d’appel de Lyon, par un arrêt du 10 juin 2025, examine la légalité d’une mesure d’éloignement assortie d’une assignation à résidence. Une ressortissante étrangère, entrée irrégulièrement en France en 2023, voit ses demandes de protection rejetées successivement par les autorités compétentes en matière de droit d’asile. Le préfet lui oppose alors une obligation de quitter le territoire sans délai et une interdiction de retour d’une durée fixée à deux ans. Le magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon rejette sa contestation par un jugement du 23 mai 2024 dont l’intéressée relève désormais appel. La requérante soulève l’irrégularité du jugement pour insuffisance de motivation ainsi que l’illégalité des décisions administratives pour erreur de droit et d’appréciation manifeste. La question centrale repose sur la validité du refus de délai de départ volontaire et sur la proportionnalité des modalités d’exécution de l’assignation. Il convient d’analyser la validation de la régularité du jugement et du refus de délai, avant d’aborder le contrôle de proportionnalité des mesures restrictives imposées.
I. La régularité du jugement et la légalité du refus de délai de départ volontaire
A. La validation de la motivation de la première instance
Le premier grief porte sur l’insuffisance de motivation du jugement concernant le moyen tiré de l’erreur de droit affectant l’obligation de quitter le territoire. La juridiction d’appel considère toutefois que la première juge a « suffisamment motivé sa réponse au moyen invoqué » en écartant toute situation de compétence liée. Elle précise qu’il « ne résulte ni des termes de l’arrêté attaqué ni d’aucune autre pièce du dossier » que l’administration se serait estimée juridiquement liée. Le juge administratif n’est pas tenu de répondre à l’intégralité des arguments dès lors que la réponse aux moyens principaux est explicitement formulée. Cette solution confirme la régularité formelle de la décision de première instance au regard des exigences posées par le code de justice administrative.
B. La caractérisation de la menace pour l’ordre public
Le refus d’octroyer un délai de départ volontaire est justifié par le comportement de l’intéressée, lequel est regardé comme une menace pour l’ordre public. La requérante a en effet reconnu des faits de vol aggravé lors d’une audition libre devant les services de gendarmerie territorialement compétents. L’article L. 612-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers permet de déroger au délai de principe dans une telle circonstance particulière. La cour relève également que l’intéressée a « déclaré son intention de ne pas repartir » dans son pays d’origine, caractérisant ainsi un risque de soustraction. Cette double circonstance fonde légalement la décision préfectorale de refuser tout délai de grâce pour l’exécution de la mesure d’éloignement contestée.
II. La proportionnalité des modalités de l’assignation à résidence
A. L’encadrement des mesures limitatives de liberté
L’assignation à résidence impose des contraintes qui doivent nécessairement être adaptées et proportionnées à l’objectif de garantie de l’exécution de la mesure d’éloignement. Les juges rappellent que ces mesures limitent l’exercice de la liberté d’aller et venir et exigent donc un contrôle de nécessité rigoureux par le juge. Le préfet dispose du pouvoir de fixer le périmètre de circulation et de désigner le service auquel le ressortissant doit se présenter quotidiennement. En l’espèce, l’autorité administrative a prescrit une présentation journalière au commissariat ainsi qu’une plage de présence obligatoire au domicile de la personne assignée. La légalité de ces modalités dépend de l’équilibre entre les nécessités de l’ordre public et le respect de la vie privée et familiale.
B. L’absence de disproportion au regard de la situation familiale
La requérante invoque sa qualité de mère d’un nourrisson et l’éloignement géographique du commissariat pour contester la sévérité des pointages quotidiens qui lui sont imposés. La cour estime cependant qu’il « n’est pas démontré que cette obligation et ses modalités présenteraient pour l’intéressée un caractère disproportionné » au regard de l’objectif poursuivi. Aucun élément médical probant ne vient établir une impossibilité physique de réaliser le trajet vers les services de police malgré les contraintes familiales alléguées. L’existence d’un autre commissariat à proximité du domicile ne suffit pas à rendre illégal le choix opéré par le préfet pour assurer la surveillance. La requête est par conséquent rejetée, confirmant ainsi que les dispositions législatives font obstacle au versement des sommes demandées au titre des frais irrépétibles.