Cour d’appel administrative de Lyon, le 13 février 2025, n°24LY00568

La Cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 13 février 2025, une décision précisant les conditions de délivrance des titres de séjour pour motifs de santé et d’études. Un ressortissant étranger contestait le refus de renouvellement de son droit au séjour alors qu’il invoquait les séquelles d’un grave accident de la circulation. La juridiction devait déterminer si l’état de santé du requérant et son parcours universitaire justifiaient le maintien de sa présence sur le territoire national.

L’intéressé est entré régulièrement en France en août 2020 pour y poursuivre des études supérieures sous couvert d’un titre de séjour portant la mention étudiant. Victime d’un accident de la route en février 2022, il a sollicité en octobre suivant le renouvellement de son titre en se prévalant également de sa santé. La préfète du Rhône a opposé un refus à cette demande par des décisions du 28 septembre 2023 assorties d’une obligation de quitter le territoire français.

Le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande d’annulation de ces décisions par un jugement rendu le 30 janvier 2024. Le requérant a interjeté appel devant la Cour administrative d’appel de Lyon le 28 février 2024 pour obtenir l’annulation de ce jugement et des décisions préfectorales. Il invoquait notamment l’irrégularité de l’avis médical de l’administration ainsi qu’une erreur manifeste dans l’appréciation de sa situation personnelle et de son projet universitaire.

La Cour administrative d’appel de Lyon rejette l’appel en confirmant la régularité de la procédure suivie devant l’Office français de l’immigration et de l’intégration. Elle retient que le requérant ne démontre pas l’impossibilité d’accéder à un traitement approprié dans son pays d’origine malgré la gravité de ses blessures initiales. Les juges soulignent également l’absence de progression académique réelle depuis son arrivée sur le territoire national pour confirmer le refus fondé sur la qualité d’étudiant.

I. La validation du formalisme rigoureux de la procédure médicale

A. La régularité formelle de l’avis du collège des médecins

Le juge administratif vérifie scrupuleusement le respect des garanties procédurales lors de l’examen des demandes de titre de séjour pour raisons médicales. L’article L. 425-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit la délivrance d’une carte de séjour au malade résidant habituellement en France. L’avis du collège des médecins de l’office doit être motivé et émis par trois praticiens n’ayant pas rédigé le rapport médical initial de l’intéressé.

La Cour administrative d’appel de Lyon écarte les moyens relatifs à l’incompétence des signataires et à l’insuffisance de motivation de l’avis médical du 31 août 2023. Elle précise que cet acte « indique que l’état de santé de l’intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité ». L’administration peut se fonder sur un avis mentionnant l’existence d’un traitement approprié dans le pays d’origine sans détailler précisément les pathologies du demandeur.

B. L’appréciation de l’accessibilité effective des soins nécessaires

La solution de l’arrêt repose sur l’absence de preuve rapportée par le requérant concernant l’indisponibilité des soins requis dans son pays d’origine. La loi subordonne le séjour à la condition que l’étranger « ne pourrait pas y bénéficier effectivement d’un traitement approprié » eu égard à l’offre de soins locale. Le juge souligne ici que les éléments médicaux produits, notamment un rapport d’expertise, ne justifient plus la nécessité des séances de rééducation après l’accident.

Le requérant invoquait le coût financier des soins au Pérou pour justifier son maintien en France mais n’apportait aucun élément sur ses ressources personnelles. La Cour considère que l’avis médical précisait explicitement que « les conditions dans lesquelles les soins sont dispensés lui permettent d’y avoir effectivement accès ». Cette motivation suffit à justifier la décision préfectorale en l’absence de documents probants contraires permettant de remettre en cause l’expertise des médecins de l’office.

II. L’exigence de sérieux et de progression du parcours académique

A. Le contrôle de la réalité du projet universitaire de l’étudiant

L’article L. 422-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile exige que l’étranger « établit qu’il suit un enseignement en France ». L’autorité administrative dispose d’un pouvoir d’appréciation sur le caractère réel et sérieux des études pour décider du renouvellement du titre de séjour temporaire. La jurisprudence administrative exige classiquement une progression dans le cursus ainsi qu’une assiduité minimale aux enseignements et aux examens organisés par l’université.

La Cour administrative d’appel de Lyon relève que le requérant était inscrit en première année de licence de droit durant trois années universitaires consécutives. Les juges notent avec sévérité qu’il n’a pu « valider aucun semestre de cette formation » malgré plusieurs renouvellements réguliers de ses titres de séjour précédents. Un tel constat d’échec répété permet à l’administration de rejeter légalement la demande de séjour au titre de la poursuite des études supérieures.

B. L’incidence limitée des problèmes de santé sur l’assiduité scolaire

Le juge administratif admet que des circonstances exceptionnelles comme un accident grave puissent expliquer un échec ponctuel dans le parcours d’un étudiant étranger. Toutefois, ces difficultés ne sauraient justifier indéfiniment l’absence totale de progression académique ou l’absentéisme prolongé sans justificatifs suffisants sur la durée. L’accident de la circulation subi en février 2022 avait déjà donné lieu à des aménagements de scolarité qui n’ont pas permis d’améliorer les résultats.

La Cour administrative d’appel de Lyon conclut que l’accident « ne suffit pas à justifier, au vu des pièces produites, l’absence de toute progression dans ses études ». Le maintien du refus de séjour est ainsi validé car le requérant n’établit pas de lien direct et exclusif entre sa santé et son échec scolaire. La décision confirme la fermeté du juge face aux parcours universitaires stagnants même lorsque des éléments de vulnérabilité personnelle sont invoqués par le demandeur.

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Hassan KOHEN
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