Cour d’appel administrative de Lyon, le 14 avril 2025, n°24LY00951

La Cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 14 avril 2025, une décision importante concernant le régime indemnitaire des assistants familiaux au sein de la fonction publique territoriale.

Une assistante familiale contestait le refus de son employeur de lui verser une prime annuelle de gratification pour les années deux mille dix-huit à deux mille vingt-et-un.

Le Tribunal administratif de Grenoble avait rejeté sa demande initiale par un jugement rendu le 6 février 2024, validant ainsi la position de la collectivité publique employeuse.

La requérante soutenait que cette prime constituait un avantage collectivement acquis dont l’exclusion portait atteinte au principe d’égalité entre les différents agents de la collectivité territoriale.

Le litige invite à s’interroger sur la force probante d’une délibération postérieure à 1984 pour établir l’existence d’un droit acquis au sens des textes statutaires en vigueur.

La juridiction d’appel écarte les prétentions de l’agent en soulignant l’absence de preuve d’une création de l’avantage antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi de réforme.

I. L’interprétation stricte de la condition d’antériorité des avantages acquis

A. La charge de la preuve de l’existence d’un droit avant 1984

L’article cent onze de la loi du 26 janvier 1984 permet le maintien des avantages collectivement acquis sous réserve d’une mise en place antérieure à cette date précise.

Le juge administratif relève ici « l’impossibilité de déterminer la date à laquelle cet avantage collectif a été ouvert pour les agents » de la collectivité territoriale concernée par l’instance.

La simple mention d’une rémunération servie antérieurement dans un acte de 1985 ne suffit pas à établir que les conditions de l’article susvisé sont effectivement remplies.

Cette exigence de précision chronologique garantit que seules les primes véritablement historiques bénéficient de la dérogation aux limites du régime indemnitaire de la fonction publique territoriale.

B. L’inefficacité juridique des actes postérieurs sur la qualification de l’avantage

La requérante invoquait une délibération de l’année 2004 mentionnant que tous les agents devaient percevoir cette prime sans aucune distinction particulière liée à leur statut professionnel.

La cour considère néanmoins que cette circonstance est sans influence sur la détermination de la nature juridique de la prime au regard du droit alors applicable au litige.

Les délibérations augmentant le montant de la prestation après l’année 1984 ne peuvent pas davantage conférer le caractère d’un avantage collectivement acquis à une simple gratification locale.

L’absence de preuve d’une inscription budgétaire régulière avant la date charnière empêche la requérante de se prévaloir utilement d’un quelconque montant au titre de ces exercices.

II. La primauté de la légalité sur les revendications d’égalité de traitement

A. L’exclusion du principe d’égalité face à la règle de droit

L’agent soutenait que le fait d’exclure les assistants familiaux du bénéfice de cette prime annuelle constituait une rupture caractérisée du principe d’égalité entre les personnels départementaux.

Le juge écarte fermement cet argument en précisant qu’un tel principe constitutionnel ne saurait « justifier l’octroi d’un avantage indu » à un agent public de la collectivité.

Une pratique administrative illégale ou dépourvue de base textuelle ne crée jamais de droits au profit des agents, même si d’autres collègues en bénéficient indûment par ailleurs.

La légalité administrative s’impose donc comme une limite infranchissable aux prétentions fondées sur une simple identité de situation par rapport à des bénéficiaires d’avantages irréguliers.

B. La préservation de l’équilibre financier et statutaire des collectivités

Le régime indemnitaire des agents non titulaires doit respecter les limites fixées par l’organe délibérant conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables à chaque collectivité territoriale.

Cette décision confirme la volonté du juge d’empêcher l’extension incontrôlée de primes historiques dont le fondement juridique n’a pas été rigoureusement conservé ou formellement prouvé.

La solution adoptée par la Cour administrative d’appel de Lyon protège la gestion des deniers publics contre des revendications indemnitaires automatiques fondées sur des textes anciens imprécis.

Enfin, cet arrêt renforce la sécurité juridique des employeurs territoriaux en clarifiant les conditions strictes de survie des compléments de rémunération issus de la période antérieure aux statuts.

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Hassan KOHEN
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