La Cour administrative d’appel de Lyon, le 14 mai 2025, a rendu une décision relative au séjour et à l’éloignement d’un ressortissant de nationalité tunisienne. Le requérant, entré en France en 2014, contestait un refus de titre de séjour accompagné d’une obligation de quitter le territoire français sans aucun délai. L’administration lui opposait également une interdiction de retour d’une durée de trois ans malgré la présence de nombreux membres de sa famille sur le sol national. La juridiction d’appel devait déterminer si l’intensité des liens familiaux et l’insertion professionnelle justifiaient la délivrance d’un titre de séjour ou l’annulation de l’éloignement. Le juge a finalement confirmé le refus de séjour mais a censuré la durée de l’interdiction de retour en raison d’une erreur manifeste d’appréciation.
I. La validation du refus de séjour et de la mesure d’éloignement
A. La protection limitée du droit au respect de la vie privée et familiale
L’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme protège le droit de toute personne au respect de sa vie privée et familiale. Le juge administratif considère que « la décision portant refus de délivrance d’un titre de séjour n’a pas porté une atteinte disproportionnée » à la vie familiale. Bien que ses parents et sa fratrie résident en France, l’intéressé n’établit pas être dépourvu d’attaches dans son pays d’origine où il a vécu longuement. Le requérant est en effet entré sur le territoire national à l’âge de vingt-quatre ans et n’apporte aucune preuve certaine d’une vie commune avec sa compagne.
B. L’exigence stricte du visa de long séjour pour les travailleurs salariés
« La délivrance aux ressortissants tunisiens d’un titre de séjour portant la mention ‘salarié’ est subordonnée à la présentation d’un visa de long séjour ». L’autorité administrative a légalement opposé ce défaut de visa, alors même que le requérant justifiait d’un contrat de travail dans le secteur de la restauration. L’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 régit de manière spécifique ces conditions d’admission au travail et prime sur les dispositions générales du code des étrangers. L’absence de visa de long séjour constitue ainsi un motif suffisant pour rejeter la demande de titre malgré une insertion professionnelle réelle depuis plusieurs années.
II. L’annulation de l’interdiction de retour pour disproportion manifeste
A. L’appréciation souveraine des critères de durée de l’interdiction
L’autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d’une interdiction de retour sur le territoire français en l’absence de délai accordé. Pour fixer la durée de cette mesure, le préfet doit tenir compte de la menace à l’ordre public et de l’ancienneté des liens avec la France. Le magistrat vérifie si l’administration a pris en considération la durée de présence de l’étranger ainsi que la nature de ses relations avec ses proches parents. Le contrôle juridictionnel s’exerce ici sur l’adéquation entre la gravité de la mesure d’éloignement et la situation personnelle du ressortissant étranger faisant l’objet du litige.
B. La prévalence de l’insertion familiale sur le non-respect des mesures d’éloignement
L’autorité administrative a, « en retenant une durée d’interdiction de retour en France de trois ans », entaché sa décision finale d’une erreur de disproportion caractérisée. La présence régulière des deux parents et de trois membres de la fratrie constitue un obstacle juridique majeur à une interdiction d’une durée aussi longue. Le juge souligne l’absence de menace pour l’ordre public pour censurer cette décision, bien que l’intéressé n’ait pas exécuté de précédentes mesures d’éloignement par le passé. Ainsi, la Cour administrative d’appel de Lyon annule partiellement le jugement de première instance pour protéger l’équilibre des liens familiaux du requérant sur le territoire.