Par un arrêt rendu le 18 septembre 2025, la cour administrative d’appel de Lyon précise les conditions de renouvellement du droit au séjour des parents d’enfants malades. Une ressortissante étrangère conteste le refus de renouveler son autorisation provisoire de séjour motivé par la disponibilité des soins dans son pays d’origine.
Arrivée en France en mai 2019 avec ses quatre enfants, l’intéressée bénéficiait d’un titre provisoire en raison de l’état de santé de son fils cadet. Ce dernier souffre d’une ostéogenèse imparfaite, pathologie grave entraînant des fractures récurrentes et nécessitant un suivi pluridisciplinaire ainsi qu’un traitement par bisphosphonates. Saisie d’une demande de renouvellement, l’autorité préfectorale a opposé un refus le 13 avril 2021 en s’appuyant sur un avis médical institutionnel.
Le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande d’annulation de cette décision par un jugement du 26 décembre 2023 dont la requérante fait appel. Celle-ci invoque une irrégularité procédurale concernant la collégialité de l’avis médical ainsi qu’une méconnaissance de son droit au respect de la vie familiale. Elle soutient également que les soins indispensables à la survie et au développement de son enfant ne sont pas effectivement accessibles dans son État d’origine.
Le litige soulève la question de la force probante de l’avis du collège des médecins face à des certificats médicaux privés soulignant des carences locales. La juridiction administrative doit déterminer si l’absence de délibération formelle entre les médecins experts entache la légalité de la décision de refus de séjour.
La cour administrative d’appel confirme le jugement de première instance en validant la procédure suivie et l’appréciation portée sur la disponibilité effective du traitement médical. Le juge d’appel écarte les moyens tirés de l’atteinte à la vie privée et familiale en raison de la brièveté du séjour sur le territoire.
**I. La validation de la légalité formelle et substantielle du refus de séjour**
**A. Le caractère non délibératif de l’avis du collège des médecins**
La requérante soutient que l’avis médical, fondement du refus de séjour, est irrégulier car il n’a pas fait l’objet d’une véritable délibération collégiale. La cour écarte ce moyen en précisant que « les médecins signataires de l’avis ne sont pas tenus, pour répondre à ces questions, de procéder à des échanges entre eux ». L’avis résulte d’une réponse binaire à des questions précises posées par la réglementation, ce qui dispense les experts d’une discussion orale ou physique.
Cette solution réduit la portée de la garantie procédurale offerte à l’étranger en limitant l’exigence de collégialité à la seule signature plurielle du document final. Le juge considère que la simple juxtaposition des conclusions médicales suffit à satisfaire aux prescriptions de l’arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux certificats médicaux. La procédure n’impose donc aucune réunion formelle des membres du collège de l’Office français de l’immigration et de l’intégration pour valider leur position technique.
**B. La primauté de l’expertise médicale institutionnelle**
Sur le fond, l’intéressée produit des documents médicaux, notamment des certificats d’un hôpital étranger, pour contester l’accessibilité réelle des soins dans son pays. La cour juge toutefois que ces pièces, qui « se bornent à faire état de doutes ou de l’ignorance de leur auteur », sont insuffisantes. Elle souligne que l’absence de pratique antérieure d’une intervention chirurgicale par des médecins locaux ne suffit pas à établir l’indisponibilité structurelle du traitement.
Le juge administratif consacre ici une présomption de fiabilité de l’avis rendu par l’administration au détriment des éléments médicaux versés par la partie requérante. Même si le défaut de soins pourrait entraîner des « conséquences d’une exceptionnelle gravité », la preuve de l’absence de traitement approprié doit être apportée avec précision. L’insuffisance des preuves contraires conduit ainsi le juge à valider l’analyse technique de l’Office français de l’immigration et de l’intégration sur la situation sanitaire locale.
**II. Une conciliation stricte entre l’état de santé et l’insertion territoriale**
**A. La préservation de l’unité familiale dans le pays d’origine**
Le refus de séjour est également contesté sur le terrain de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La cour relève que la requérante résidait en France depuis moins de deux ans à la date de la décision, ce qui limite son insertion territoriale. Elle conserve des attaches familiales prépondérantes dans son pays d’origine où elle a vécu la majeure partie de sa vie et où réside le père.
L’absence de démonstration probante concernant l’isolement ou les violences conjugales alléguées fragilise l’argumentation relative à une rupture définitive des liens avec l’État de départ. Le juge estime que le droit au respect de la vie privée n’implique pas systématiquement un droit au maintien sur le sol français. L’unité familiale peut ainsi être reconstituée hors de France sans que l’ingérence administrative ne soit considérée comme disproportionnée par rapport aux buts poursuivis.
**B. L’interprétation rigoureuse de l’intérêt supérieur de l’enfant**
La décision traite enfin de l’application de la convention internationale relative aux droits de l’enfant pour justifier le maintien du séjour de la famille. La juridiction écarte ce moyen en relevant que « la requérante ne démontre pas que l’état de santé de son fils cadet nécessite qu’elle demeure sur le territoire français ». La scolarisation récente des enfants et une courte activité professionnelle ne suffisent pas à caractériser une situation d’exception exigeant une régularisation.
Cette approche confirme que l’intérêt de l’enfant est intimement lié à l’appréciation faite de la disponibilité des soins médicaux dans l’État de nationalité. Dès lors que la prise en charge médicale est jugée possible à l’étranger, le départ de la famille n’est pas considéré comme préjudiciable à l’enfant. L’autorité administrative ne commet donc pas d’erreur manifeste d’appréciation en refusant de faire usage de son pouvoir de régularisation discrétionnaire pour des motifs humanitaires.