La cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 19 décembre 2024, une décision relative à la légalité d’une obligation de quitter le territoire. Un ressortissant étranger contestait le refus de son titre de séjour et l’interdiction de retour prononcée par l’autorité préfectorale de l’Isère. L’intéressé affirmait résider en France depuis l’année 2012 et avoir développé des liens privés ainsi que familiaux stables sur le sol national.
Le tribunal administratif de Grenoble avait initialement rejeté sa demande d’annulation par un jugement rendu le 29 septembre 2023. Le requérant a donc interjeté appel devant la juridiction supérieure en invoquant la violation du droit au respect de sa vie privée. Il soutenait également que la décision portait atteinte à l’intérêt supérieur de ses enfants en méconnaissance des engagements internationaux de la France.
La question posée aux juges consistait à déterminer si la mesure d’éloignement constituait une ingérence disproportionnée dans la vie personnelle de l’appelant. La juridiction d’appel devait apprécier la réalité de l’insertion et de la cellule familiale au regard des preuves produites par le requérant. La cour administrative d’appel de Lyon rejette la requête au motif que la continuité du séjour et l’entretien des enfants ne sont pas démontrés.
I. La confirmation de la mesure d’éloignement face à l’insuffisance des preuves de séjour
A. L’exigence d’une continuité du séjour sur le territoire national
La cour administrative d’appel de Lyon souligne d’abord que le requérant ne justifie pas d’une présence ininterrompue sur le sol français. Bien que l’intéressé allègue une arrivée durant sa minorité en 2012, les magistrats considèrent que les pièces fournies demeurent largement lacunaires. La décision relève ainsi que « les éléments du dossier sont insuffisants pour établir la continuité de son séjour depuis 2018 ».
Cette exigence probatoire stricte répond à la nécessité pour l’étranger de démontrer une installation durable et stable pour prétendre à une protection. La simple déclaration de présence ne suffit pas à compenser l’absence de documents administratifs ou de témoignages probants sur une longue période. Le juge administratif exerce ici un contrôle concret sur la réalité de la vie privée en exigeant des justificatifs pour chaque année.
B. L’incidence du comportement administratif sur l’appréciation de l’insertion
Le refus de la cour s’appuie également sur l’absence d’insertion sociale et le mépris des décisions de justice antérieures par le ressortissant. L’arrêt précise que le requérant « s’est soustrait à deux précédentes mesures d’éloignement » intervenues en 2018 et en 2021. Ce comportement nuit gravement à la reconnaissance d’une intégration réussie dans la société française malgré la durée alléguée du séjour.
Le juge estime que l’insertion ne peut être reconnue à un étranger qui se maintient irrégulièrement sur le territoire après plusieurs injonctions de départ. La persistance de l’irrégularité administrative neutralise les arguments relatifs à l’ancienneté de la présence pour l’application de l’article 8 de la convention européenne. La mesure d’éloignement apparaît alors comme une réponse légitime de l’autorité publique à la violation répétée des règles du séjour.
II. Une protection encadrée de la vie familiale et de l’intérêt des enfants
A. La nécessité d’une preuve matérielle de la vie commune et de l’entretien
Le contentieux portait aussi sur la cellule familiale formée par le requérant avec une compatriote et leurs deux jeunes enfants nés en France. La cour juge cependant que les pièces produites « ne permettent pas d’établir une communauté de vie avec sa compagne ». Elle ajoute que l’intéressé ne prouve pas qu’il « contribuerait effectivement à l’entretien de ses enfants » de manière régulière.
Cette position rappelle que la filiation seule ne suffit pas à caractériser une vie familiale normale au sens de la jurisprudence conventionnelle. Le requérant doit démontrer une implication quotidienne et matérielle dans l’éducation de sa progéniture pour espérer la protection de son droit au séjour. L’insuffisance des preuves conduit la juridiction à écarter le grief tiré de l’atteinte disproportionnée à l’intimité de la vie privée.
B. La viabilité de la cellule familiale dans le pays d’origine du ressortissant
Enfin, la cour examine l’intérêt supérieur de l’enfant en tenant compte de la possibilité de poursuivre la vie familiale à l’étranger. Les juges constatent que les fils de l’appelant « ne sont pas encore en âge d’être scolarisés » à la date de la décision. Par conséquent, la juridiction affirme que « rien ne s’oppose à la reconstitution de la cellule familiale » dans le pays d’origine.
L’absence de scolarisation facilite le déplacement de la famille sans nuire de manière irréparable au développement et à l’équilibre des jeunes enfants. Le juge administratif conclut ainsi à l’absence de méconnaissance des stipulations de la convention internationale relative aux droits de l’enfant. La légalité de l’obligation de quitter le territoire français est donc confirmée en l’absence de circonstances faisant obstacle au retour.