Cour d’appel administrative de Lyon, le 19 février 2025, n°24LY01893

La cour administrative d’appel de Lyon, dans sa décision du 19 février 2025, examine la validité d’une interdiction de retour sur le territoire français. Un ressortissant étranger, résidant sur le sol national depuis six années, a fait l’objet d’une mesure d’éloignement assortie d’une interdiction de retour d’un an. L’intéressé a sollicité l’annulation de ces actes ainsi que de son assignation à résidence devant le tribunal administratif de Lyon. Par un jugement du 5 juin 2024, le premier juge a rejeté l’intégralité de ses demandes, poussant le requérant à former un appel. Ce dernier soutient que l’autorité administrative a méconnu son droit au respect de sa vie privée et a commis une erreur d’appréciation. La juridiction d’appel doit déterminer si une relation sentimentale récente et une présence prolongée font obstacle à une interdiction de retour d’une telle durée. La cour confirme la solution de première instance en estimant que l’insertion du requérant ne présente pas un degré de stabilité suffisant.

I. L’application encadrée des critères légaux relatifs à la durée de l’interdiction

A. La prise en compte effective de la situation individuelle par l’autorité administrative

Le juge administratif vérifie d’abord si l’autorité préfectorale a procédé à une analyse complète de la situation du ressortissant étranger avant de statuer. En l’espèce, la cour relève que l’administration « a fait état des éléments en sa possession au jour de l’édiction de l’interdiction de retour ». Cette mention démontre que les éléments relatifs à la vie sentimentale du requérant ont été intégrés lors de la phase de décision. Le moyen tiré du défaut d’examen est ainsi écarté car les pièces du dossier attestent d’une motivation circonstanciée de l’acte administratif contesté. L’administration a ainsi respecté ses obligations procédurales en évaluant la situation personnelle et administrative du ressortissant au moment des faits.

B. La proportionnalité de la mesure au regard de l’absence d’exécution de l’éloignement antérieur

L’article L. 612-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile fixe les critères pour déterminer la durée de l’interdiction. L’autorité doit tenir compte de la durée de présence, de la nature des liens et de l’existence d’une éventuelle menace pour l’ordre public. Bien que l’administration n’ait pas retenu de menace particulière, la cour valide la durée d’un an en raison de l’inexécution d’une précédente mesure. La décision « n’est pas, compte tenu des autres éléments susvisés, entachée d’erreur d’appréciation » malgré les six années de résidence continue du requérant. Cette solution illustre la sévérité du juge administratif envers les ressortissants qui se maintiennent irrégulièrement sur le territoire après un délai de départ.

II. Une conciliation stricte entre police des étrangers et droit à la vie privée

A. L’insuffisance d’une relation sentimentale récente pour caractériser une insertion durable

Le droit au respect de la vie privée et familiale, garanti par l’article 8 de la convention européenne, suppose une intégration réelle et stable. Le requérant invoquait une relation avec une ressortissante nationale, mais la cour juge que la « réalité de la vie commune ne saurait être regardée comme établie ». Les preuves fournies ne démontraient une communauté de vie que pour une période de moins de six mois à la date de l’acte. Cette brièveté empêche de considérer que l’interdiction de retour porte une atteinte disproportionnée aux buts légitimes poursuivis par l’autorité de police administrative. L’intention de mariage ne suffit pas à elle seule pour inverser l’appréciation portée sur la fragilité des liens noués sur le territoire.

B. La prépondérance des attaches familiales maintenues dans le pays de provenance

L’absence d’intégration professionnelle renforce la position des juges lyonnais quant à la possibilité pour l’intéressé de poursuivre sa vie hors du sol français. Le ressortissant « conserve de fortes attaches familiales dans son pays d’origine puisqu’y résident ses parents et deux de ses sœurs ». La persistance de ces liens familiaux dans l’État de provenance justifie l’absence de violation des stipulations conventionnelles relatives à la vie familiale. La cour administrative d’appel de Lyon confirme ainsi que les attaches privées ne sauraient primer sur les nécessités de l’éloignement sans une preuve probante d’insertion. Le rejet de la requête confirme la légalité des modalités de l’assignation à résidence, faute de contestation précise des conditions de présentation.

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Hassan KOHEN
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