La Cour administrative d’appel de Lyon, dans son arrêt du 19 juin 2025, statue sur la légalité d’une mesure d’éloignement assortie d’un refus de délai de départ. Un ressortissant étranger, entré plusieurs fois illégalement sur le territoire national, contestait son obligation de quitter la France après le rejet de ses demandes d’asile successives. Le requérant invoquait le respect de sa vie privée et familiale en raison de la présence de son frère, lequel souffre d’une insuffisance rénale terminale. Le Tribunal administratif de Dijon avait annulé l’interdiction de retour mais maintenu l’obligation de quitter le territoire et le refus de délai de départ volontaire. La juridiction d’appel devait déterminer si les liens familiaux et le projet de don d’organe du requérant rendaient la mesure d’éloignement disproportionnée au droit au séjour. La Cour administrative d’appel de Lyon rejette la requête en considérant que l’administration n’a pas méconnu les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
I. La préservation de l’équilibre entre vie familiale et police des étrangers
A. Une appréciation souveraine de la durée et de la stabilité du séjour
Le juge administratif souligne que le requérant est revenu sur le territoire français en dépit d’une interdiction de retour dont il faisait l’objet précédemment. La Cour administrative d’appel de Lyon relève que l’intéressé « n’est présent que depuis moins d’un an à la date de l’arrêté litigieux » lors de son second séjour. Cette brièveté de la présence sur le sol national affaiblit l’invocation d’une intégration privée ou familiale suffisamment stable pour faire obstacle à l’éloignement. Les magistrats rappellent que le respect de la vie privée suppose une insertion réelle que les multiples entrées irrégulières et les rejets d’asile ne sauraient établir. L’autorité administrative dispose ainsi d’un pouvoir d’appréciation pour sanctionner le non-respect des mesures d’éloignement antérieures par une nouvelle décision de quitter le territoire français.
B. La conciliation des impératifs de santé avec l’exécution de l’éloignement
Le requérant faisait valoir sa qualité de donneur vivant potentiel pour son frère dont l’état de santé nécessite une greffe de rein sous peine de décès. La Cour administrative d’appel de Lyon écarte cet argument en précisant que « l’obligation de quitter le territoire ne fait pas par elle-même obstacle » à une demande de visa ultérieure. Les juges considèrent que la mesure d’éloignement ne préjuge pas de la possibilité pour l’intéressé de revenir légalement sur le territoire pour des motifs médicaux. Cette solution préserve la validité de la police des étrangers tout en renvoyant la question du don d’organe à une phase de demande de séjour régulière. L’atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale n’est donc pas jugée disproportionnée au regard des buts de sécurité et d’ordre public.
II. L’application rigoureuse du refus de délai fondé sur le risque de soustraction
A. La caractérisation du risque de fuite par le comportement de l’intéressé
L’autorité administrative peut refuser un délai de départ volontaire s’il existe un risque que l’étranger se soustraie à la mesure de police prise à son encontre. La Cour administrative d’appel de Lyon constate que le requérant a déjà fait l’objet de deux mesures d’éloignement dont la dernière a été exécutée par la force. Le retour clandestin sur le sol national après une interdiction de retour constitue un élément factuel déterminant pour établir la volonté de l’étranger de ne pas coopérer. Les juges valident l’analyse préfectorale selon laquelle le comportement passé de l’intéressé justifie légalement l’absence de délai accordé pour quitter le pays de manière volontaire. Cette application de l’article L. 612-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile renforce l’effectivité des mesures d’éloignement administratif.
B. La primauté de la légalité administrative sur les circonstances humanitaires invoquées
L’état de santé du frère du requérant ne suffit pas à invalider le refus de délai de départ volontaire dès lors que le risque de fuite est établi. La Cour administrative d’appel de Lyon estime que la préfète a pu, « sans méconnaître les dispositions précitées, refuser d’octroyer à l’intéressé un délai de départ volontaire » malgré le contexte médical. La protection de la santé publique et le soutien familial ne sauraient justifier le maintien sur le territoire d’une personne ayant délibérément ignoré les lois sur l’immigration. La juridiction administrative confirme ainsi que les circonstances humanitaires ne font pas obstacle à l’exercice normal des prérogatives de puissance publique en matière de gestion des flux migratoires. Le rejet du surplus des conclusions du requérant scelle la légalité de l’intégralité de l’arrêté préfectoral attaqué concernant l’éloignement immédiat et la destination.