La cour administrative d’appel de Lyon, par un arrêt rendu le 22 janvier 2025, se prononce sur la légalité d’un changement d’affectation imposé à un agent hospitalier. Un aide-soignant exerçant de nuit a fait l’objet d’une mutation d’office vers un poste de jour après des altercations répétées avec ses collègues de travail. L’administration a justifié cette décision par la nécessité de rétablir un climat serein au sein du service de soins. Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté, le 6 avril 2023, la demande d’annulation formée par l’intéressé contre cette mesure de réorganisation interne. Le requérant soutient en appel que son changement d’affectation constitue une sanction disciplinaire déguisée et méconnaît gravement ses prescriptions médicales. La question posée aux juges d’appel concerne la qualification juridique d’une mesure de changement de service motivée par des tensions relationnelles persistantes. La juridiction rejette la requête en estimant que la décision querellée a été prise exclusivement dans l’intérêt du service public hospitalier.
I. La qualification de la mesure de changement d’affectation A. L’exclusion de la sanction disciplinaire déguisée Le juge administratif vérifie si le changement d’affectation cache une volonté de punir l’agent sans respecter les garanties procédurales obligatoires. La cour relève qu’aucun grief n’a été formulé à l’encontre du comportement fautif de l’intéressé lors de son entretien préalable. Elle souligne qu’il est constant qu’aucun « manquement ni aucune faute disciplinaire ne lui ont été reprochés » par sa hiérarchie directe. Le dossier ne permet pas de démontrer une intention punitive de l’autorité investie du pouvoir de nomination malgré la perte financière induite. La mesure s’analyse donc comme une simple mesure d’ordre intérieur dépourvue de caractère infamant pour la carrière de l’agent titulaire.
B. La préservation de l’intérêt du service comme motif déterminant L’administration hospitalière dispose d’un large pouvoir pour organiser ses services et assurer la continuité ainsi que la qualité des soins. Les tensions survenues en janvier 2020 entre l’agent et ses collègues ont « révélé un climat de tensions au sein du service » de nuit. Le changement d’affectation vise ici à restaurer le bon fonctionnement de l’unité de soins en séparant les protagonistes du conflit. La cour estime que les rapports internes ne présentent pas le caractère de pièces disciplinaires malgré les allégations contraires du requérant débouté. La décision demeure légale dès lors qu’elle répond à un besoin organisationnel objectif identifié par le directeur du centre hospitalier.
II. Le contrôle restreint de l’adaptation du poste à l’état de santé A. La preuve insuffisante de l’inaptitude aux fonctions de jour Le fonctionnaire hospitalier bénéficie d’un droit à l’adaptation de son poste de travail en cas d’altération constatée de sa santé physique. La cour écarte toutefois les certificats médicaux produits tardivement ou n’ayant pas été communiqués à l’administration avant l’édiction des actes contestés. Elle juge qu’une attestation établie un an après les faits n’est pas « suffisante pour établir la contrariété de l’affectation de jour » avec l’état de santé. Les documents médicaux versés aux débats ne permettent pas de caractériser une erreur manifeste d’appréciation de la part de l’employeur public. Le juge exige une corrélation temporelle stricte entre l’avis médical et la date de la décision administrative pour annuler la mesure.
B. Le rejet des moyens tirés du détournement de pouvoir et de la dignité L’agent invoque une atteinte à sa dignité humaine ainsi qu’un détournement de pouvoir visant à l’écarter arbitrairement du service de nuit habituel. La juridiction considère que le retour ultérieur de l’agent sur un poste nocturne confirme l’absence de volonté de nuire de l’administration. Les mentions relatives à des pressions hiérarchiques ne suffisent pas à établir que la décision procède d’un motif étranger à l’intérêt général. La cour confirme ainsi le jugement de première instance et valide la procédure suivie par le centre hospitalier. L’absence d’éléments probants condamne le moyen tiré du détournement de pouvoir malgré les difficultés professionnelles rencontrées par le requérant.