La Cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 23 juillet 2025, un arrêt relatif à l’exécution forcée d’une décision de justice devenue définitive. Cette affaire s’inscrit de manière classique dans le contentieux abondant de l’entrée et du séjour des étrangers sur le territoire national. Un ressortissant étranger a sollicité un titre de séjour en qualité de conjoint de français, demande que l’autorité administrative a expressément rejetée. Saisi d’un recours, le tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté le 20 juin 2024 en enjoignant la délivrance d’un titre de séjour. Malgré le rejet de l’appel formé par l’administration, l’injonction prononcée par les premiers juges est demeurée totalement lettre morte pendant plusieurs mois. Le requérant a donc saisi la juridiction d’appel afin d’obtenir l’exécution effective du jugement initialement rendu en sa faveur. La question posée concerne les modalités de mise en œuvre des pouvoirs de contrainte du juge administratif face au silence persistant de l’administration. La juridiction décide d’assortir l’injonction d’une astreinte journalière pour contraindre le représentant de l’État à régulariser enfin la situation de l’intéressé. L’examen de cette décision conduit à analyser le constat de l’inexécution prolongée de la chose jugée avant d’étudier le prononcé de l’astreinte comme instrument de coercition.
I. La caractérisation d’une inexécution prolongée de l’injonction judiciaire
A. La méconnaissance flagrante de l’autorité de la chose jugée
L’article L. 911-4 du code de justice administrative dispose que la partie intéressée peut demander à la cour d’assurer l’exécution d’une décision. La Cour administrative d’appel de Lyon relève que le tribunal administratif de Dijon avait enjoint la délivrance d’un titre de séjour sous un mois. Le juge administratif constate explicitement que « le jugement n’ayant pas été exécuté », l’autorité administrative a méconnu les obligations découlant de la chose jugée. Cette carence manifeste porte atteinte aux droits reconnus au ressortissant étranger par une décision juridictionnelle devenue pourtant exécutoire et définitive. Le refus persistant d’agir de la part des services de l’État constitue une entorse grave au principe fondamental de légalité des actes administratifs.
B. L’absence de justification sérieuse opposée par l’administration
L’administration n’a produit aucun mémoire pour justifier son inertie ou pour faire valoir d’éventuelles difficultés matérielles empêchant l’exécution de la mesure prescrite. La Cour administrative d’appel de Lyon souligne que l’autorité compétente a été régulièrement invitée à présenter ses observations sans jamais répondre aux sollicitations. Le jugement initial prévoyait pourtant une réserve en cas de changement substantiel dans les circonstances de fait ou de droit entourant la situation. L’absence de réponse de l’administration empêche le juge de vérifier si des éléments nouveaux pourraient légitimement faire obstacle à la délivrance du titre. La persistance de ce mutisme institutionnel confirme ainsi la nécessité de passer à une phase supérieure de coercition pour garantir le respect de l’ordre juridique.
II. L’astreinte journalière comme remède à la carence administrative
A. Le cadre juridique du pouvoir de contrainte du juge
Le code de justice administrative confère au magistrat des prérogatives spécifiques pour contraindre l’administration à respecter le sens et la portée de ses décisions. Selon les dispositions législatives précitées, la juridiction saisie peut définir les mesures nécessaires et prononcer une astreinte financière à l’encontre de la personne publique. La Cour administrative d’appel de Lyon use de ce pouvoir pour mettre un terme définitif à une situation de blocage administratif particulièrement préjudiciable. L’astreinte constitue ici l’outil privilégié pour assurer l’efficacité concrète de la justice administrative face aux résistances observées au sein des services préfectoraux. Cette mesure garantit que les droits individuels consacrés par le juge ne demeurent pas de simples promesses théoriques sans aucune traduction dans la réalité.
B. La portée comminatoire de la sanction financière prononcée
La juridiction d’appel décide de fixer une astreinte de « 200 euros par jour de retard » pour encourager une exécution rapide des obligations en suspens. Le montant retenu possède une dimension comminatoire évidente destinée à vaincre l’inertie persistante des services étatiques responsables de l’application de la décision initiale. Le délai d’un mois accordé après la notification de l’arrêt permet une ultime tentative de régularisation spontanée avant le déclenchement effectif de la sanction. Cette solution illustre la fonction de gardien des libertés dévolue au juge administratif qui ne saurait tolérer qu’un arrêt de justice reste lettre morte. La décision renforce ainsi l’autorité de l’institution judiciaire et assure la protection nécessaire des administrés contre les éventuelles carences prolongées de l’exécutif.