La cour administrative d’appel de Lyon a rendu un arrêt le 27 février 2025 portant sur le droit au séjour d’une ressortissante étrangère majeure. L’intéressée est entrée à Mayotte en 2008 à l’âge de douze ans puis a rejoint le territoire métropolitain au cours de l’année 2018. L’autorité administrative a refusé de délivrer un titre de séjour et a assorti sa décision d’une obligation de quitter le territoire français. Le tribunal administratif de Lyon a rejeté la contestation de cet acte par un jugement prononcé le 4 juillet 2024, provoquant l’appel. La requérante invoque notamment la durée de sa présence en France et l’atteinte portée à son droit à une vie privée et familiale. La question posée à la juridiction est de savoir si le séjour à Mayotte avant 2014 compte pour la protection contre l’éloignement. La cour administrative d’appel de Lyon répond par la négative en soulignant l’inapplicabilité du code spécial à cette époque sur ce territoire. L’étude de cette solution conduit à analyser l’exclusion du séjour mahorais de la résidence habituelle avant d’examiner la rigueur des protections contre l’éloignement.
I. L’inopposabilité du séjour mahorais antérieur à l’extension législative du code
A. L’application différée du cadre normatif de l’entrée et du séjour
Le litige repose sur l’interprétation de l’article L. 611-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers concernant les protections contre l’éloignement. La cour administrative d’appel de Lyon précise que « les dispositions de ce code n’étaient pas applicables à Mayotte avant le 26 mai 2014 ». L’ordonnance du 7 mai 2014 a en effet étendu et adapté le droit commun des étrangers à ce territoire d’outre-mer de manière tardive. Cependant l’absence de cadre législatif unifié avant cette date empêche la comptabilisation des années de résidence antérieures pour bénéficier de protections spécifiques.
B. L’exclusion de la notion de résidence habituelle sur le territoire national
L’intéressée « ne peut être regardée comme résidant en France » au sens des dispositions relatives à la protection contre une mesure d’éloignement d’office. Cette solution consacre une rupture d’égalité territoriale fondée sur la date d’entrée en vigueur des normes législatives dans les différentes parties de la République. Ainsi la durée de séjour accomplie à Mayotte sous un régime dérogatoire n’offre pas les mêmes droits que la présence sur le continent. La transition vers l’examen des garanties individuelles permet d’illustrer la sévérité des juges administratifs face aux situations de précarité administrative prolongées.
II. L’appréciation rigoureuse des garanties individuelles contre l’éloignement
A. La limitation des obligations d’examen spontané de l’administration
La requérante soutient que l’administration aurait dû examiner sa situation personnelle au regard de dispositions dont elle ne s’était pas expressément prévalue. La cour administrative d’appel de Lyon écarte ce moyen en relevant que l’intéressée s’était bornée à solliciter « une carte de séjour salarié ou liens familiaux ». Dès lors l’autorité préfectorale n’est pas tenue de procéder à une recherche spontanée sur des fondements juridiques non invoqués par la partie demanderesse. Cette position jurisprudentielle renforce l’obligation pour l’étranger de préciser clairement l’objet de sa demande lors de l’instruction de son dossier administratif.
B. La validité de la mesure d’éloignement au regard de la vie privée
Le grief tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme est également rejeté par les juges. La cour administrative d’appel de Lyon adopte les motifs des premiers juges pour écarter l’existence d’une atteinte disproportionnée à la vie privée. Toutefois la présence de membres de la famille titulaires de titres de séjour ne suffit pas à compenser le caractère récent de l’installation. En définitive la juridiction confirme le rejet de l’ensemble des conclusions de la requête en validant l’arrêté d’éloignement pris par le représentant de l’État.