Cour d’appel administrative de Lyon, le 3 juillet 2025, n°23LY03186

La cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 3 juillet 2025, une décision précisant les conditions de refus d’une autorisation environnementale pour un projet éolien. En l’espèce, une autorité préfectorale a opposé un refus à une société pétitionnaire souhaitant implanter cinq éoliennes de grande dimension sur un territoire rural. L’administration a estimé que le projet entraînait des risques d’écrasement et de surplomb pour les habitations voisines, altérant ainsi la commodité du voisinage. La société requérante a alors saisi la juridiction administrative afin d’obtenir l’annulation de cet arrêté en invoquant une insuffisance de motivation. La question posée au juge consistait à déterminer si l’impact paysager et visuel pouvait légalement fonder un refus malgré le respect des distances minimales. La juridiction confirme la légalité de la décision administrative en soulignant l’importance de l’angle de perception et l’insuffisance des mesures de compensation proposées. L’étude de cet arrêt conduit à analyser d’abord l’appréciation concrète de l’atteinte aux paysages (I), avant d’examiner la validation du pouvoir de police environnementale (II).

I. L’appréciation concrète de l’atteinte aux paysages et à la commodité du voisinage

A. La caractérisation d’un impact visuel disproportionné par l’effet d’écrasement

Le juge administratif fonde son analyse sur les éléments de fait précis fournis par l’étude d’impact et les avis des différentes autorités environnementales. Il relève que pour certains hameaux, « le parc éolien présente son plus grand développement : l’angle d’occupation sur l’horizon dépasse les quatre-vingt-dix degrés ». Cette situation géographique crée une proximité visuelle problématique malgré le strict respect de la distance réglementaire minimale de cinq cents mètres prévue par le code. La cour souligne que les machines présentent « une grande échelle visuelle par rapport aux motifs paysagers environnants », entraînant une altération manifeste de la commodité locale. L’angle de perception de cent cinq degrés mentionné dans le dossier constitue un élément déterminant pour qualifier l’impact de fort sur les habitations proches. L’appréciation souveraine des magistrats permet ainsi de sanctionner un projet dont les dimensions démesurées nuisent gravement à l’équilibre esthétique des territoires ruraux concernés.

B. L’inefficacité constatée des mesures de réduction de l’impact environnemental

La société pétitionnaire a tenté de limiter les nuisances paysagères en proposant la plantation d’un nouveau linéaire de haies arborées composé de diverses essences locales. Cependant, la juridiction administrative estime que ces prescriptions additionnelles ne permettent pas d’assurer la conformité de l’exploitation aux exigences de protection de la nature. Le juge affirme qu’il n’apparaît pas que « les plantations envisagées par l’exploitant seraient suffisantes pour restreindre notablement les effets négatifs du projet » sur l’environnement. Cette position illustre la sévérité du contrôle exercé sur l’adéquation des mesures d’évitement et de réduction proposées par les différents porteurs de projets industriels. La taille imposante des turbines, comprise entre cent soixante-quinze et deux cents mètres, rend toute mesure de camouflage végétale largement inopérante dans ce cas. L’autorité préfectorale a donc pu légalement conclure que l’installation porterait une atteinte excessive à la conservation des sites et aux paysages environnants.

II. La validation de la rigueur du contrôle de l’autorité préfectorale

A. La confirmation d’un large pouvoir de refus fondé sur la protection des intérêts locaux

L’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Lyon confirme l’étendue des prérogatives de l’administration en matière de délivrance d’une autorisation environnementale complexe. Le préfet dispose d’un pouvoir de refus lorsque les installations projetées peuvent présenter des inconvénients majeurs pour les intérêts protégés par le code de l’environnement. Cette appréciation concrète de l’ensemble des caractéristiques de la situation permet d’opposer un refus même sans violation directe de règles techniques de distance. Le juge valide la décision préfectorale en retenant que les mesures proposées ne permettaient pas de « prévenir les dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés ». Cette approche privilégie une protection effective du cadre de vie des riverains face au déploiement massif des installations de production d’énergie renouvelable. L’administration exerce ici une mission de régulation visant à concilier les impératifs économiques de transition énergétique avec la sauvegarde de l’intégrité paysagère.

B. Une solution renforçant la portée des seuils de nuisance visuelle en droit éolien

La solution retenue par les magistrats s’inscrit dans une jurisprudence exigeante quant à l’insertion paysagère des parcs éoliens de grande dimension en zone bocagère. Elle précise que le respect de la distance d’éloignement légale ne garantit pas automatiquement la délivrance de l’autorisation si l’impact visuel demeure excessif. La reconnaissance de l’important « effet d’écrasement et de surplomb » sur les habitations constitue un précédent notable pour l’évaluation juridique des nuisances esthétiques et psychologiques. Cette décision renforce la sécurité des refus administratifs motivés par des considérations qualitatives liées à la configuration particulière des lieux et au relief modeste. Le droit positif confirme ainsi que la protection du patrimoine paysager demeure un motif légitime de restriction à la liberté d’entreprendre des sociétés. L’arrêt souligne enfin que la simple motivation concise d’un acte administratif suffit à satisfaire aux exigences légales de transparence et de régularité.

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Hassan KOHEN
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