Cour d’appel administrative de Lyon, le 6 février 2025, n°24LY00281

La Cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 6 février 2025, un arrêt relatif à l’exécution d’un jugement et à la légalité d’un refus de séjour. Une requérante étrangère déclarait être entrée sur le territoire national en 2002 avant de solliciter la délivrance d’un titre de séjour en février 2020. Le tribunal administratif de Lyon avait annulé un premier refus implicite le 23 novembre 2021 en enjoignant à l’autorité préfectorale de procéder à un réexamen. Faute de réponse apparente, l’intéressée a saisi la juridiction d’une demande d’exécution tout en contestant les nouvelles décisions défavorables produites ultérieurement par l’administration. Le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur l’exécution puis a rejeté les conclusions aux fins d’annulation par un jugement du 7 novembre 2023. L’appelante soutient que le jugement initial n’a pas été exécuté car les décisions du 31 mars 2023 ne lui auraient pas été régulièrement notifiées. Le litige porte ainsi sur le caractère exécutoire d’un acte administratif révélé lors d’une instance contentieuse et sur la proportionnalité de l’atteinte au droit au séjour. La juridiction d’appel confirme la solution des premiers juges en estimant que le réexamen effectif de la situation met fin au litige relatif à l’exécution.

L’analyse de cette décision suppose d’étudier la reconnaissance du caractère exécutoire d’une décision produite en cours d’instance avant d’envisager la confirmation de la légalité du refus de séjour.

I. La reconnaissance du caractère exécutoire d’une décision produite en cours d’instance

A. L’effet extinctif du réexamen de la situation administrative

L’exécution d’un jugement d’annulation imposant un réexamen est satisfaite dès lors que l’autorité administrative prend une nouvelle décision, quel qu’en soit le sens. La Cour constate que l’administration a effectivement réexaminé la situation de la requérante en prenant des arrêtés de refus de séjour et d’obligation de quitter le territoire. « La préfète ayant ainsi réexaminé la situation (…), la demande tendant à l’exécution du jugement (…) était devenue sans objet lorsque le tribunal administratif de Lyon a rendu son jugement ». Le prononcé d’un non-lieu à statuer s’impose mécaniquement puisque l’injonction de faire a été suivie d’une manifestation de volonté de la puissance publique. Cette solution classique rappelle que le juge de l’exécution ne contrôle pas la légalité de la nouvelle décision mais seulement l’existence réelle d’un nouveau réexamen.

B. La notification indirecte par la voie de la procédure contentieuse

L’originalité de l’arrêt réside dans l’affirmation que la production d’un acte au dossier de procédure supplée l’absence de notification directe à l’administré. La requérante contestait l’exécution en invoquant le défaut de notification personnelle des décisions prises à la suite de l’annulation prononcée par les premiers juges. Les magistrats lyonnais écartent ce grief en soulignant que la connaissance acquise par le conseil de la partie lors de l’instance rend l’acte parfaitement exécutoire. « La circonstance que les décisions n’aient pas été directement notifiées (…) mais à son conseil, via l’instance en cours devant le tribunal, étant sans incidence sur leur caractère exécutoire ». Cette position sécurise l’action administrative en évitant que des vices de forme externes ne fassent obstacle à la reconnaissance d’un réexamen administratif effectif.

II. La confirmation de la légalité des mesures d’éloignement et de refus de séjour

A. L’appréciation de l’atteinte à la vie privée et familiale

Le bien-fondé du refus de titre de séjour est examiné au regard de l’ancienneté de la présence en France et des attaches familiales de la requérante. L’intéressée invoquait une méconnaissance des stipulations de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La Cour administrative d’appel de Lyon rejette cette argumentation en considérant que les éléments produits ne suffisent pas à caractériser une erreur manifeste d’appréciation. La durée de séjour, bien qu’importante depuis 2002, ne saurait à elle seule conférer un droit automatique à la régularisation sans autres attaches stables. Les juges confirment ainsi que l’administration dispose d’un large pouvoir pour apprécier si l’éloignement porte une atteinte disproportionnée aux buts légitimes poursuivis par l’État.

B. La validation par adoption de motifs des décisions préfectorales

La juridiction d’appel utilise la technique de l’adoption de motifs pour rejeter les moyens de légalité interne dirigés contre les décisions portant refus de séjour. Elle considère que les critiques formulées par la requérante ne diffèrent pas de celles déjà soumises aux premiers juges lors de l’instance de première instance. « Il y a lieu d’écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif » concernant les griefs tirés de la violation de la loi. Cette méthode de rédaction juridictionnelle souligne la pertinence de l’analyse initiale effectuée par le tribunal administratif de Lyon sur la situation individuelle de l’appelante. L’arrêt conclut à l’absence d’illégalité tant pour le refus de titre que pour l’obligation de quitter le territoire français et l’interdiction de retour.

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Hassan KOHEN
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