Cour d’appel administrative de Lyon, le 6 février 2025, n°24LY01926

La cour administrative d’appel de Lyon, par un arrêt rendu le 6 février 2025, se prononce sur le droit au séjour d’un ressortissant étranger. Un ressortissant guinéen a sollicité l’annulation de l’arrêté du préfet de la Drôme portant refus de titre, obligation de quitter le territoire et fixation du pays. Le requérant invoque sa vie privée et familiale en France, mettant en avant la naissance d’une enfant ainsi qu’une relation sentimentale avec une résidente. Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande initiale par un jugement rendu le 11 juin 2024, estimant la requête non fondée en droit. L’intéressé soutient devant la cour d’appel une méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il avance également l’existence de motifs exceptionnels de régularisation et conteste la compétence du signataire de l’acte administratif pour prendre une telle mesure d’éloignement. Le litige soulève la question de la proportionnalité de l’atteinte à la vie privée face aux impératifs de contrôle des flux migratoires sur le territoire. La juridiction administrative rejette l’appel en considérant que la réalité des liens invoqués ne justifie pas la délivrance d’un titre de séjour permanent. L’analyse portera sur l’examen rigoureux des attaches familiales avant d’aborder la validation de la procédure et des conditions de l’admission exceptionnelle au séjour.

I. Une appréciation rigoureuse de la réalité des liens privés et familiaux

A. L’insuffisance des preuves relatives à l’entretien et à l’éducation de l’enfant

L’arrêt souligne que la seule présence d’un enfant né sur le territoire ne suffit pas à garantir la délivrance d’un titre de séjour. La cour administrative d’appel de Lyon relève que l’intéressé « n’établit pas son implication dans l’entretien de cette enfant » par ses seules pièces. Les magistrats écartent les tickets de caisse pour l’achat de matériel pédiatrique car certains documents figurent au nom de la mère de l’enfant. Cette exigence de participation effective aux charges d’entretien constitue une condition classique pour l’application des stipulations conventionnelles protectrices de la vie familiale. Par ailleurs, la relation sentimentale entamée avec une ressortissante malgache est jugée trop récente pour fonder un droit au séjour stable et pérenne. Le juge administratif exerce ici un contrôle concret sur la consistance des liens personnels dont se prévaut l’étranger pour contester son éloignement.

B. La prépondérance des attaches conservées dans le pays d’origine du requérant

La décision administrative de refus de séjour s’appuie sur la durée de vie de l’intéressé dans son pays d’origine avant son entrée. La cour administrative d’appel de Lyon observe que le requérant « a vécu jusqu’à l’âge de trente ans en Guinée où réside son premier enfant ». Cette circonstance atteste du maintien de liens sociaux et familiaux intenses avec la société guinéenne malgré plusieurs années passées sur le sol français. La présence en France de la mère de son second enfant ne saurait compenser cette situation puisque celle-ci séjourne également de manière irrégulière. Le juge considère ainsi que le retour dans le pays d’origine ne rompt pas l’équilibre de la vie privée de manière manifestement excessive. L’existence d’une promesse d’embauche en qualité de plaquiste est jugée insuffisante pour contrebalancer l’absence d’attaches familiales structurantes et stables localement.

II. La validation de la légalité formelle et des conditions de régularisation

A. La régularité de la délégation de signature accordée au secrétaire général

Le requérant soulevait un moyen tiré de l’incompétence du signataire de l’acte pour contester la légalité formelle de la décision de refus. La cour administrative d’appel de Lyon écarte ce grief en constatant l’existence d’une délégation de signature consentie par un arrêté préfectoral régulier. L’acte de délégation avait été publié au recueil des actes administratifs, garantissant ainsi son opposabilité et sa validité juridique à l’égard des tiers. Cette précision technique illustre l’importance de la régularité procédurale dans l’exercice de la puissance publique par les autorités préfectorales lors des mesures d’éloignement. Le juge vérifie systématiquement que les agents signataires disposent de l’autorité nécessaire pour engager l’administration dans ces décisions affectant la liberté individuelle. Par conséquent, le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’acte manque en fait et ne peut qu’être rejeté par la juridiction.

B. Le pouvoir discrétionnaire du préfet concernant l’admission exceptionnelle au séjour

La cour rappelle que l’admission exceptionnelle au séjour au titre de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour relève du pouvoir discrétionnaire. L’étranger ne dispose d’aucun droit automatique à la régularisation, même s’il invoque des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels tirés de son insertion professionnelle. L’arrêt précise que l’intéressé « ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du ministre de l’intérieur du 28 novembre 2012 » pour obtenir son titre. Cette position jurisprudentielle constante confirme que les circulaires ministérielles dépourvues de caractère réglementaire ne créent pas de droits au profit des administrés étrangers. Le préfet n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation en refusant de régulariser la situation d’un individu dont les circonstances personnelles ne sont pas exceptionnelles. La décision de la cour administrative d’appel de Lyon confirme ainsi la souveraineté de l’administration dans le contrôle des flux migratoires sur le territoire.

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Hassan KOHEN
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