Cour d’appel administrative de Lyon, le 6 mai 2025, n°25LY00071

La Cour administrative d’appel de Lyon, dans son arrêt rendu le 6 mai 2025, précise les conditions de recevabilité du recours d’un département contre une autorisation environnementale. Par un arrêté du 7 novembre 2024, le représentant de l’État avait autorisé l’exploitation d’un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et de deux postes de livraison. Estimant que ce projet portait atteinte à ses intérêts, la collectivité départementale en a demandé l’annulation devant le juge administratif de second ressort. La question posée consistait à déterminer si les compétences générales d’un département lui confèrent un intérêt à agir suffisant pour contester une installation classée. Les magistrats rejettent la requête en considérant que la collectivité ne justifie d’aucune atteinte directe à ses attributions spécifiques ou à sa situation propre.

I. Une conception restrictive de l’intérêt à agir des collectivités territoriales en matière environnementale

L’exigence d’une affectation directe des compétences législativement attribuées

La juridiction lyonnaise rappelle que l’intérêt à agir des tiers est conditionné par l’existence d’inconvénients ou de dangers pour des intérêts précis. Pour une personne morale de droit public, la recevabilité n’est admise que si les dangers invoqués sont « de nature à affecter par eux-mêmes sa situation ». Cette formulation souligne la nécessité d’un lien concret entre le projet autorisé et les missions exercées par la collectivité sur son territoire. Le juge refuse ainsi d’accorder un droit au recours automatique fondé sur la seule souveraineté politique ou administrative de l’entité requérante. Les compétences dévolues par la loi doivent être effectivement mises en cause par les caractéristiques environnementales ou techniques de l’installation contestée.

L’occultation des missions de solidarité territoriale au profit d’intérêts environnementaux énumérés

Le département invoquait sa mission de promotion des solidarités et de cohésion territoriale pour justifier sa contestation du parc éolien. La Cour écarte cet argument en soulignant que ces principes « ne figurent pas au nombre des intérêts protégés par l’article L. 511-1 du code de l’environnement ». Le cadre juridique de l’autorisation environnementale restreint le débat aux seules conséquences physiques, écologiques ou paysagères du projet sur son environnement immédiat. Une compétence sociale ou de solidarité ne saurait donc suffire à établir un intérêt direct à l’annulation d’une décision de police administrative. Cette approche distingue nettement les missions politiques globales des intérêts particuliers protégés par le droit des installations classées pour la protection de l’environnement.

L’analyse de la recevabilité impose alors un examen détaillé des compétences techniques invoquées pour vérifier leur éventuelle perturbation par le projet éolien.

II. Une appréciation concrète et rigoureuse de l’impact du projet sur les intérêts locaux

La neutralisation des compétences touristiques et patrimoniales face à l’échelle du projet

La collectivité se prévalait de sa politique de développement du tourisme et de la protection du patrimoine historique pour fonder son action. Les juges relèvent cependant que le parc éolien présente une « ampleur limitée au regard du territoire départemental » dans son ensemble. L’existence de chemins de randonnée ou de monuments historiques à proximité ne suffit pas à démontrer un risque d’entrave à l’activité touristique. Le département ne justifie pas spécialement être responsable des sites mentionnés ou d’une atteinte réelle à leur mise en valeur. La preuve d’une dégradation de l’image de marque du territoire reste ainsi soumise à un haut degré d’exigence probatoire.

L’insuffisance de la qualité de propriétaire du domaine public routier pour fonder le recours

Le département soutenait enfin que sa qualité de propriétaire de deux routes départementales situées à proximité du projet lui conférait un intérêt. La Cour administrative d’appel de Lyon rejette cette prétention en l’absence d’une « altération des conditions de circulation sur ces voies » clairement établie. La simple visibilité des éoliennes depuis le domaine public routier ne constitue pas une atteinte aux intérêts protégés par le code de l’environnement. La sécurité publique n’étant pas manifestement compromise, le droit de propriété sur la voirie ne saurait ouvrir un droit de critique général. Cette décision confirme la volonté du juge de limiter les contentieux éoliens aux griefs présentant une incidence matérielle sérieuse.

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Hassan KOHEN
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