La Cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 14 mars 2025, un arrêt relatif aux modalités de preuve des heures supplémentaires et à l’irrecevabilité de l’appel incident tardif. Un agent hospitalier affecté à une structure mobile d’urgence sollicitait le paiement d’heures de travail effectuées entre 2017 et 2020 ainsi que l’octroi d’une bonification indiciaire. Le requérant affirmait avoir réalisé plus de deux mille heures supplémentaires durant ses fonctions de nuit sans avoir perçu la rémunération correspondante de la part de son employeur. L’administration contestait ces prétentions en produisant des bulletins de paie mentionnant le versement régulier d’indemnités pour travail de nuit et heures de dépassement. Saisi de l’affaire, le tribunal administratif de Toulon avait annulé la décision de rejet concernant les heures supplémentaires et enjoint leur paiement le 22 février 2024. L’établissement hospitalier a interjeté appel afin d’obtenir l’annulation de cette condamnation tandis que l’agent a formé des conclusions incidentes concernant le bénéfice de la bonification indiciaire. La juridiction d’appel devait déterminer si les pièces versées permettaient d’identifier des périodes de service impayées et si l’appel incident respectait les critères de recevabilité procédurale. La Cour annule les articles favorables au requérant et rejette l’intégralité de ses demandes en précisant les conditions de l’appel incident sur un litige distinct.
**I. Un encadrement rigoureux de la preuve des heures supplémentaires**
**A. La répartition de la charge de la preuve entre l’agent et l’administration**
L’arrêt précise qu’il appartient d’abord à l’agent d’apporter des éléments suffisants pour permettre à l’employeur de répondre sur les horaires effectivement réalisés par le salarié intéressé. Le juge peut alors « former sa conviction » après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles à la manifestation de la vérité. Cette règle probatoire impose une collaboration entre les parties sous le contrôle du magistrat afin de vérifier l’existence de services accomplis au-delà des bornes horaires normales. L’administration doit être en mesure de justifier l’organisation du temps de travail sur la base des cycles de travail définis par le chef d’établissement hospitalier.
**B. L’exigence de précision des éléments étayant la demande de paiement**
Le requérant doit « étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires qu’il estime avoir réalisés » durant la période de service considérée par le litige. Les plannings annuels ne mentionnant pas l’identité de l’agent ou les extraits de logiciels concernant d’autres personnels ne constituent pas des justificatifs probants pour cette instance particulière. L’examen des bulletins de salaire démontre que les revenus tirés des heures supplémentaires ont été intégrés aux montants nets malgré certaines exonérations de cotisations sociales applicables. La Cour relève ainsi l’absence de preuves démontrant que des heures supplémentaires seraient demeurées impayées sur la période de quatre années invoquée par le fonctionnaire.
**II. Une limitation procédurale de l’appel incident et l’issue du litige**
**A. L’irrecevabilité d’un appel incident portant sur un litige distinct**
L’appel incident formé par l’agent concernant la nouvelle bonification indiciaire est rejeté comme tardif car présenté après l’expiration du délai d’appel de droit commun contre le jugement. Ces conclusions présentent un « litige distinct de celui délimité par l’appel principal » qui ne portait que sur la question spécifique de la rémunération des heures supplémentaires. La recevabilité d’un appel incident tardif suppose un lien de connexité étroit entre les points contestés par l’appelant principal et ceux soulevés par l’intimé à l’instance. Le juge administratif assure ici une application stricte des règles de procédure afin d’éviter l’extension artificielle du champ du litige par la voie de l’appel incident.
**B. L’infirmation du jugement de première instance et le rejet des prétentions**
La Cour administrative d’appel de Marseille décide d’annuler les articles du jugement du tribunal administratif de Toulon ayant fait droit à l’annulation de la décision de rejet. Le centre hospitalier est fondé à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont enjoint le paiement d’une somme correspondant à la totalité des heures. Les conclusions indemnitaires et les demandes d’injonction présentées par l’agent sont intégralement rejetées en raison du manque de justificatifs probants concernant la réalité du travail supplémentaire allégué. Cette décision met à la charge du requérant une somme de mille cinq cents euros au titre des frais exposés par l’établissement hospitalier durant la procédure contentieuse.