Cour d’appel administrative de Marseille, le 15 avril 2025, n°24MA00129

La Cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 15 avril 2025, un arrêt relatif à la situation d’une ressortissante étrangère présente sur le territoire national depuis plus de vingt-cinq ans. Cette dernière sollicitait la délivrance d’un titre de séjour mentionnant la vie privée et familiale auprès de l’autorité préfectorale compétente. L’administration a rejeté cette demande par un arrêté du 5 avril 2023, en assortissant sa décision d’une obligation de quitter le territoire français. Le Tribunal administratif de Marseille a ensuite rejeté le recours formé contre cet acte par un jugement rendu le 19 décembre 2023. La requérante soutient que la mesure d’éloignement méconnaît son droit à une vie familiale normale en raison de l’ancienneté de sa résidence. La question juridique posée au juge d’appel porte sur la caractérisation d’une erreur manifeste d’appréciation face à un ancrage territorial particulièrement ancien. La juridiction d’appel décide d’annuler les décisions administratives contestées en invoquant le caractère disproportionné de l’atteinte portée à la situation personnelle de l’intéressée. L’analyse de l’ancrage territorial précède l’étude des conséquences juridiques attachées à l’annulation de la décision de refus.

I. L’ancrage territorial prolongé comme fondement du droit au séjour

A. La valorisation de la durée exceptionnelle de présence effective

La requérante réside sur le sol français depuis l’année 1998 sous couvert d’un visa régulièrement obtenu au moment de son entrée initiale. Les juges soulignent qu’elle « y a vécu la majeure partie de sa vie d’adulte aux côtés de son frère » de nationalité française. Cette présence continue durant un quart de siècle constitue un élément factuel déterminant pour apprécier la légalité du refus de séjour opposé. La Cour constate également que l’intéressée justifie depuis plusieurs années d’activités associatives bénévoles témoignant d’une insertion sociale réelle et durable. Ces éléments de fait permettent d’établir une intensité des liens personnels qui dépasse le cadre d’une simple présence précaire sur le territoire.

B. La censure de l’appréciation erronée des attaches familiales

L’autorité préfectorale a méconnu la réalité de la situation en ordonnant l’éloignement d’une personne dépourvue d’attaches familiales significatives dans son pays d’origine. La juridiction administrative affirme que l’administration « a commis une erreur manifeste d’appréciation » en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité par la requérante. Cette erreur résulte de l’absence de prise en compte globale des circonstances de l’espèce et de la durée importante du séjour en France. La Cour censure ainsi un raisonnement administratif qui privilégiait une application rigide des critères de séjour au détriment de l’équité factuelle. Cette reconnaissance de l’erreur manifeste d’appréciation entraîne nécessairement des conséquences majeures sur le devenir juridique de la mesure d’éloignement.

II. L’autorité du juge administratif dans la régularisation de la situation

A. L’annulation nécessaire de la mesure d’éloignement injustifiée

L’annulation du refus de séjour entraîne par voie de conséquence l’illégalité de l’obligation de quitter le territoire français prise à l’encontre de l’intéressée. Le juge d’appel estime que le Tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit en rejetant la demande d’annulation en première instance. La Cour écarte l’ensemble des motifs soulevés par l’administration pour justifier le maintien de la décision de renvoi vers le pays d’origine. Cette décision de justice rétablit la requérante dans ses droits en censurant un acte administratif dont les conséquences étaient manifestement excessives. La protection des droits fondamentaux commande ici de neutraliser les effets d’une mesure qui séparerait la requérante de son seul noyau familial.

B. La portée contraignante de l’injonction de délivrance du titre

Le présent arrêt implique nécessairement « la délivrance à la requérante d’un titre de séjour » dans un délai fixé à deux mois. Le juge administratif utilise son pouvoir d’injonction pour contraindre l’autorité préfectorale à régulariser la situation administrative de la personne concernée par le litige. Cette injonction est assortie de l’obligation de délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le temps nécessaire à l’instruction définitive du dossier. La Cour administrative d’appel de Marseille confirme ainsi son rôle de protecteur des libertés individuelles face aux erreurs d’appréciation des services préfectoraux. La solution retenue assure une stabilité juridique à une résidente dont l’intégration sociale et familiale n’était plus sérieusement contestable au dossier.

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Hassan KOHEN
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